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Le chant du violon / Le chant des machines

Publié le 06 février 2013 par Masterpitch

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Le chant du violon

L’ascension avait été difficile. Mes genoux n’étaient plus aussi souples. Mon dos ne se courba pas avec autant de facilité. Mes yeux eurent du mal à percer l’obscurité du grenier, et redécouvrir la petite malle aux contours arrondis, au cou raccourcis, à la couleur du temps qui passe. Je me souviens maintenant qu’il faisait gris ce jour-là.

Ou plutôt bleu. C’était le début du printemps, ou alors la fin de l’hiver. Et le soleil tentait de percer quant à lui une tenace couche de nuage gris. La rosée blanche du matin disait adieu aux jeunes bourgeons et pourtant mes larmes ne tarissaient pas. Quelques heures auparavant les marches de l’échelle avaient plié sous le poids de mes pas. Nous nous étions dit adieu. Je lui avais dit adieu. Ces trop longues années d’études avaient été des années de souffrance. C’est donc sûre de moi que je rangea une dernière fois mon violon dans son étui. Je ne m’étais jamais sentie aussi vide. Et je ne savais pas si cela était du soulagement, ou une amputation.

J’entends aujourd’hui le tapotis des gouttes qui s’écrasent à quelques centimètres de mes cheveux blancs. Les ardoises bleues du toit me protègent des gouttes du ciel. Et celles de mes yeux viennent une nouvelle fois éclaircir l’étui de bois verni.

Laissez vous happer les yeux fermés ou hypnotiser par les flash des stroboscopes.

(Interdit d’écouter cela avec des enceintes d’ordinateur portable évidemment. Principe de précaution oblige)

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Le chant des machines

Le vacarme est terrifiant. Que peut-on faire face à cette fureur, à l’avancée implacable de l’acier ? Nous essayons pourtant bien de le tremper, dans du chrome, du nickel ou du cobalt. Il reste pourtant froid, sombre. Il vous regarde de ses éclairs noirs. Il vous broie de sa main de fer. Aucun gant ne peut lui être mis. Aucun velours ne serait assez doux. Aucun pelage ne serait assez soyeux. Il est la force. Tout s’écroule sous poids. Que peuvent faire quelques ondes face à ce géant aux pieds de béton ? Le regarder dans les yeux? Apporter toujours plus de volupté? Faire vibrer les âmes? Laisser remonter des sentiments enfouis sous nos couches de culpabilités? Esquisser les contours de nos peurs? Peindre les couleurs de nos joies? Le faire plier sous nos doigts? Le faire grincer dans notre voix? Le faire fuir devant le balancement de nos hanches? Le faire déchanter devant la fragilité de notre verbe?

« Last Christmas
I gave you my heart
But the very next day you gave it away
This year
To save me from tears
I’ll give it to someone special »

J’ai voulu « traduire » ce court refrain en commençant par : en gros c’est l’histoire d’une nana ou d’un mec, d’un mec ou d’une nana, qui se fait plaquer le lendemain d’une nuit de noël…mais je crois qu’il faut laisser à Shakespeare ce qui est à Shakespeare, en particulier quand on nous parle de larmes et d’amour.


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