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Qui paye le plan de sauvetage des banques ?

Publié le 05 mars 2013 par Perceval

Les États européens se sont vus contraints les uns après les autres, moyennant des sommes astronomiques, de venir en aide aux banques pour compenser les pertes subies suite à des prêts pourris. Mais qui sont les bénéficiaires de telles opérations?

C’est en posant cette question très simple qu’Harald Schumann, essayiste en économie et  journaliste au Tagesspiegel, sillonne l’Europe. Et obtient des réponses pour le moins sidérantes. Car ceux qui ont été « sauvés » ne se trouvent pas – comme on tend à vouloir nous le faire croire – dans les pays en détresse, mais surtout en Allemagne et en France.

- En effet, une part importante des sommes débloquées finit dans les caisses des créanciers de ces banques sauvées. Quant aux financiers qui ont fait de mauvais investissements, ils se retrouvent protégés contre toute perte aux frais de la collectivité. Et ce contrairement aux règles de l’économie de marché. Pourquoi ? Qui encaisse l’argent ?

- 50 milliards d'euros en Grèce, 70 milliards en Irlande, 40 milliards en Espagne : au sein de la zone euro, les États se sont vus contraint les uns après les autres - moyennant des sommes astronomiques - de venir en aide aux banques pour compenser les pertes subies suite à des prêts pourris.

A voir donc, ce documentaire - "Quand l'Europe sauve ses Banques, qui paye ?" ARTE.

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Cette enquête met en valeur le caractère absolument scandaleux et antidémocratiquequi se déroule depuis le début de la crise avec le renflouage des banques... de plus, il est intéressant que le journaliste allemand constate lui-même que ce n'est pas l'Allemagne qui a sauvé l'Irlande, mais bien le contraire. La France et autres créanciers ne sont pas épargnés. Toute la classe politique européenne est visée.

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Le propos dans ce documentaire, n'est même pas une critique du capitalisme... En effet, la BCE a indirectement forcée l'Espagne et l'Irlande a rembourser les dettes de leur propres banques pour que celles ci remboursent les dettes qu'elles doivent aux banques françaises et allemandes. Il s'agit d'éviter que les banques françaises et Allemandes subissent les pertes conséquentes à un mauvais investissement, et on déroge ainsi à un principe fondamental du libéralisme qui est que celui qui investit doit être prêt à subir les pertes conséquentes à son investissement.

 La conclusion du reportage attire l'attention du téléspectateur sur l'un des aspects qui n'est pas le moindre, à savoir les tensions générées entre États Européens.

 Reste, une question en suspend qui serait d'évaluer les effets d'une chute de certaines banques irlandaises et espagnoles. Est ce qu'elles affecteraient véritablement d'autres banques, des entreprises, des particuliers de manière dramatique? et si c'est le cas, ne serait-il pas judicieux d'utiliser les investissement de la BCE et des Etats pour indemniser les autres acteurs qui sont vulnérables face à la chute de ces banques?

 On pourrait aussi discuter qui, du prêteur ou de l'investisseur ou du salarié ou du consommateur, doit supporter le risque inhérent aux activités économiques.. ?

 « Là où tous les autres ont renfloué les banques et laissé les citoyens en payer le prix, l’Islande a laissé les banques aller à la faillite et a, en fait, augmenté son filet de protection social »

Paul Krugman, prix Nobel d’économie dans le New York Times. 2011

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Si vous n'avez pas le temps de regarder toute la vidéo, en voici les grandes lignes :

- Les banques irlandaises ou espagnoles sont "sauvées" dans la plus grande opacité. Les listes de créanciers sont tenues secrètes, alors que des milliards d'argent public sont en jeu.

- Les créanciers sauvés sont en grande partie de grandes banques ou de grands assureurs allemands, français, ou d'autres pays considérés comme en meilleure santé que les autres au sein de l'UE. Lorsqu'un Wolfgang Schaüble (interviewé dans le documentaire) affirme qu'il est normal que les Irlandais paient pour leurs mauvaises dettes, il oublie juste de préciser qui était le dealer.

- Les pertes dans les bilans des banques espagnoles en cours de renflouage sont très sous-estimées. Les investissements immobiliers fantômes sont encore comptés à un pourcentage ridiculement élevé de leur valeur initiale au sein de leurs bilans : anticiper de nouvelles pertes serait sage.

- Les officiels interrogés (Schaüble, Almunia, Guindos...) manient la langue de bois comme personne, mais n'utilisent in fine que la rhétorique de la peur pour justifier l'absence totale de transparence de leurs opérations.

- Le transfert des pertes des banques irlandaises sur les contribuables irlandais a été imposé au gouvernement irlandais à la suite d'un véritable chantage.

- Au final, quand les États irlandais et espagnols seront rendus insolvables par ces transferts massifs de mauvaise dette, alors ce seront les contribuables d'Europe du Nord qui seront appelés en renfort... Et la pression sur la BCE pour annuler les créances qu'elle détient deviendra très forte.

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- L'Europe reste une grande idée, mais l'Europe des "bailouts" pourrait aboutir à la fin de l'UE, ce qui serait dramatique.

Le documentaire n'est pas parfait (j'aurais aimé qu'un banquier central hors union européenne, comme Mladjan Dinkic, nous explique que l'on peut parfaitement liquider des banques prétendument systémiques...), mais il dit l'essentiel de façon assez compréhensible même pour un non initié. Ceux qui avaient suivi mes papiers sur lacrise souveraine apprendront peu de choses nouvelles, mais c'est une bonne entrée en matière sur un sujet que peu comprennent.

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Sur le web.Lien raccourci: http://www.contrepoints.org/?p=116518


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