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Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 3/-

Publié le 04 mai 2018 par Perceval

Avant la révolution française, un groupe de femmes aristocrates, la plupart membres de loges maçonniques, organisent avec enthousiasme une vie culturelle... Elles imaginent les premiers musées ( le terme musée vient du grec Mouseîon, temple et lieu consacré aux Muses, divinités des arts....), organisent des rencontres comme celles près de Marly par les poètes libertins de la ''Caserne '', Evariste de Parny, Antoine Bertin, Michel de Cubieres

Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 3/-Rosalie Duthé (1792) par Henri-Pierre Danloux

Parmi les premières, citons Mme de Rochechouart ou Mme de Kolly... Elles revendiquent un raffinement de vie, un goût marqué pour les beaux-arts et l’esthétique... Elles protègent les artistes, organisent le mécénat, et contribuent à faire connaître pastellistes, joailliers, ébénistes, paysagistes ou musiciens.

Mme Thilorier crée des places gratuites à l'Ecole royale de dessin, Mlle Dervieux s'efforce d'imposer l'architecte Belanger, tandis que Julie Carreau, future Mme Talma, soutient Brongniart. Les musiciens Hermann, Paisiello, Saint-Georges, Martini, Steibelt sont attirés dans les salons libertins de Sophie Arnould ou de Mme de Chambonas, laquelle vit séparée de son mari absorbé par un mystérieux Ordre Hermaphrodite, dit de la Sublime Félicité.

Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 3/-

Cet ''ordre de la Sublime félicité '' servira d'ailleurs à décrédibiliser le mouvement d'un nouvel ordre amoureux... Chambonas fondateur de l'Ordre est – dit-on - perclus de dettes, violent et une réputation fort équivoque. (Voir Journal des inspecteurs, de M. DE SARTINES, ...) Leurs assemblées sont plus que galantes... On distingue quatre grades au sein de la Félicité : « mousse », « patron », « patron salé » et « chef d’escadre », et ses membres se qualifient entre eux de chevaliers et de chevalières.

Ces femmes reçoivent dans leurs hôtels, des quartiers : la Chaussée d'Antin, la Grange-Bateliere... La liberté de ton règne dans leurs salons... Et, on y veille a respecter les opinions et les choix de vie de chacun.

Ces salons royalistes, d'esprit ''libertin'', ont quelque chose de moins empesé que chez Mmes Necker ou de Gramont.

Ces salons ne sont pas – certes - tous dédiés aux arts ; certains le sont aux jeux, par exemple...

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Mme de Sabran - Buste par Houdon

Des dames comme la belle Mme de Sabran immortalisée par le ciseau de Houdon, et connue pour sa longue liaison avec le chevalier de Bousiers, tout comme sa fille Mme de Custine, sont représentatives de l'esprit libertin et frondeur qui souffle a cette époque.

Ensemble, hommes et femmes suivent des réunions littéraires et scientifiques, avec Pilatre de Rozier - plutôt scientifique -, ou Jean-François de la Harpe (1739-1803) qui donne des cours de littérature.

Les pamphletaires vont dévaloriser pendant et après la révolution, ces femmes qui se disent ''libertines'', c'est à dire ''affranchies'' et qui ne craignent pas de parler culture, et même d'amour au sens du plaisir sexuel...

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J. B. Elie de Beaumont et son épouse Anne-Louise

Mme Elie de Beaumont (1729-1783, née Morin du Mesnil) femme affranchie, et à l'avant-garde sur les questions de la place de la femme dans la société, ouvre avec son mari un salon ouvert à de nombreux avocats. Elle-même est journaliste, rédactrice en chef d'un journal politique, et elle est aussi la présidente du Lycée des femmes qui ouvre ses portes en 1790 au Palais-Royal. Le salon libéral de Mme de Montesson à Romainville est assez brillant , et il est doté d'un théâtre de société …

Mlle Sophie Goury de Champgrand - fille naturelle de Sophie Arnould - aux arcades du Palais-Royal, no 9, anime sous la houlette de son père un brillant salon essentiellement tourné vers le jeu et la musique, où afflue la société libertine du Palais-Royal. Ce salon, comme beaucoup d'autres du Palais-Royal, devient une officine contre-révolutionnaire et plusieurs de ses habitués monteront à l'échafaud, en particulier le jeune Jules Guétennoc de Rohan-Rochefort, soupirant de Mlle Goury de Champgrand.

Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 3/-
Louise-Julie_Carreau

Un autre salon très à la mode à la veille de la Révolution est celui de la spirituelle Julie Carreau, rue Chantereine, dans un hôtel qui sera acquis par Mme Bonaparte sous le Directoire. Cette jeune femme qui a commencé une carrière de danseuse à l'Opéra s'est fait remarquer dans la haute galanterie par son charme et sa beauté, ( comme en témoigne un portrait en miniature d'après Vigée-Lebrun), mais aussi par son esprit et sa culture.

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Louise-Julie Careau (Talma) danseuse

Cette courtisane partie de rien est doublée d'une femme d'affaires avisée qui sait investir dans la pierre les revenus de l'amour que le prince de Soubise lui a voué et, lorsqu'en 1789 elle épouse le grand comédien Talma, elle a acquis une petite fortune. Leur salon, entre libertinage et politique, fréquenté par les Condorcet, Olympe de Gouges, Vergniaud, Julie Candeille..., est un des plus intéressants de Paris à l'époque de la Révolution.

Chevaliers et Dames, vers une nouvelle aristocratie au XVIIIe siècle – 3/-

Nicolas-Marie Dalayrac (1753-1809) est membre de la loge maçonnique des « neuf sœurs » et compose en 1778 la musique pour la réception de Voltaire et celle de la fête en l'honneur de Franklin chez Madame Helvétius.

Pour clore cette liste des salons connus et appréciés des libertins on peut encore citer celui de Paul Savalette de Lange, qui demeure dans un vaste hôtel particulier situé rue saint-Honoré. Garde du Trésor royal comme son père Savalette de Magnanville - dont les origines roturières ont inspirè la pièce de Mercier intitulée ''La Brouette du vinaigrier'' -, Paul Savalette de Lange est un libre penseur, libertin, et l'un des animateurs les plus en vue de la franc-maçonnerie parisienne, « modèle de bonnes manières, de politesse élégante, de respect des usages établis » il attire dans son salon les mélomanes de Laris, et la loge maçonnique qu'il dirige - la loge Olympique - est connue pour ses concerts et son soutien à l'art musical et aux artistes...

Les sources, de cette présentation courte et partielle, proviennent essentiellement des ouvrages très documentés de Olivier Blanc, en particulier : '' L'amour à Paris au temps de Louis XVI ''


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