Magazine Journal intime

Twister

Publié le 29 août 2008 par Corcky

J'avais envie de te balancer quelques photos pétantes de bleu azur, débordantes de palmiers luxuriants et dégoulinantes du gros sel de la mer des Caraïbes, et puis je me suis ravisée.

Pour la carte postale, tu peux toujours aller sur n'importe quel site touristique spécialisé dans l'attrape-gogos, qui te fera à coup sûr baver d'envie devant la plage de Varadero (ses putes, ses gigolos, ses touristes gras du bide en mal de chair fraîche couleur chocolat), devant les bâtiments coloniaux de la Vieille Havane (ses groupes folkloriques jouant "Hasta Siempre" en boucle, son minuscule pâté de maisons repeint à la hâte, sa Bodeguita del Medio où le prix du Mojito avoisine le PIB de la Guinée Bissau, et sa misère crasse dès qu'on quitte la rue Obispo), ou devant les photos du plus célèbre et du plus incompris des mercenaires à deux balles, l'éternel Che Guevara (son béret, sa barbe, son musée à Santa Clara et son tombeau, devant lequel quelques illuminés internationalistes boboïsants viennent encore parfois s'arracher hystériquement les cheveux en braillant l'Internationale).

En fait, c'est marrant, mais j'ai jamais réussi à acheter l'image de cette île telle qu'on essaye de te la vendre depuis que les touristes européens ont remplacé les "conseillers culturels" soviétiques en tant que poules aux oeufs d'or.

Alors, au lieu de te lécher servilement les orteils et de te servir la soupe en te vantant les mérites éternels d'une Révolution qui se termine en eau de boudin, au lieu de te faire une description dithyrambique des vieilles bagnoles américaines qui roulent tant bien que mal avec des moteurs de Lada sur les pavés défoncés, et plutôt que de te raconter connerie sur connerie quant à l'optimisme légendaire et la joie de vivre de mes concitoyens, je préfère te raconter, cher lecteur, comment pendant mon putain de Carnet de retour au pays natal à moi, je n'ai eu qu'une seule inquiétude.

Un truc qui m'a obsédée pendant trois semaines.

Pendant que la télé cubaine d'Etat m'apprenait que les Géorgiens, ces nazis des temps modernes, génocidaient atrocement environ trois millions d'Ossètes désarmés (alors que Fox News, à l'hôtel, me disait que les Russes, en dignes héritiers de Staline, égorgeaient des foetus Géorgiens jusque dans le ventre de leurs mères et violaient le bétail du brave paysan Caucasien), pendant que la télé d'Etat me montrait ces salopards de juges olympiques parfaitement infoutus de donner à nos athlètes socialistes les médailles qui leur revenaient de droit (alors que CNN me soufflait que Usain Bolt devait être dopé, unique raison pour laquelle il avait dépassé les coureurs yankees), tandis que la tempête tropicale "Fay" se bornait à nous noyer sous des litres de flotte pendant deux jours (alors que nos mères respectives, collées devant la météo d'Evelyne Dhéliat sur TF1, une chaîne réputée pour son sens de la mesure et son éthique à toute épreuve, faisaient littéralement péter le standard du Consulat de France à La Havane), pendant ce temps, ami lecteur...

Mais tiens, d'ailleurs, je ne résiste pas au plaisir de te faire découvrir le célèbre petit jingle de la télé cubaine, qui a bercé mon enfance et n'a pas changé depuis l'époque où Fidel Castro cirait les pompes de Leonid Brejnev.


  

Chouette, hein?

Bref.

Pendant ce temps, disais-je, cette obsession ne me quittait pas.
Passant des neurones aux tripes, et des tripes au rectum coeur.

Une question unique vous taraude, et vos vacances sont foutues.

Ni le rhum, ni cette merde de reggaeton qui est devenu l'unique fond sonore de ma ville natale, ni les arnaques familiales multiples et variées, ni la chaleur moite et étouffante, ni mes accrochages kafkaïens avec mes camarades policiers et douaniers, n'auront eu raison de mon angoisse (tout juste auront-ils permis à quelques bordées de jurons franco-espagnols de s'envoler hardiment dans l'air saturé de gasoil, et je te prie de croire qu'il n'est pas si évident de mélanger les mots "enculé", "bâtard", "maricon", "pinga" et "comemierda" dans la même phrase).

Enfin.

Tout ça, c'est du passé.

Parce que finalement, ce qui compte, c'est que j'ai enfin la réponse à l'angoissante question que je me posais depuis la fin du mois de juillet.

Oui.

Mozinor a enfin sorti une nouvelle vidéo.





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