Magazine Journal intime
Primary Colors
Publié le 24 octobre 2008 par Corcky(Ceci est un message personnel et amical à caractère légèrement sardonique, merci de ne pas te sentir visé, cher lecteur, par les propos tenus ci-après, qui ne te concernent bien évidemment en rien, sois-en assuré, je te lèche servilement les pieds comme à mon habitude et te prie d'agréer mon respect éternel et ma très profonde admiration.)
Cher Benoît,
Je t'aime.
Tu sais ça?
Je dirais même plus: je t'adore.
Depuis quelques semaines, toi qui te faisais royalement chier en ta Doulce France quelque peu anesthésiée par le ronronnement médiatique et la crise financière, tu as retrouvé une deuxième jeunesse.
Tu es gonflé à bloc.
Tu revis.
Ton existence a enfin repris sens.
Au printemps 2006, déjà, quand tu avais pris part avec exaltation aux manifestations anti-CPE, tu m'avais fait part de ton bonheur de trouver enfin un moyen de faire ton Mai 68 à toi, frustré que tu étais de n'être venu au monde que bien après les barricades, les pavés et la plage.
Peu importait, au fond, que tu n'aies pas saisi tous les enjeux politiques et sociaux du mouvement de l'époque, moi j'étais heureuse de te voir heureux, tout simplement, quand tu hurlais "Mort aux vaches" dans le cortège (ce qui t'avait attiré les regards quelque peu dubitatifs de nombreux manifestants).
Et on a vu fleurir, sur tes fringues, sur le capot de ta voiture, sur ton blog, des stickers et des images courageusement engagées, citoyennes, militantes à souhait.
Et puis les choses se sont tassées, Villepin a cédé, le CPE a été abandonné.
Et tu as recommencé à t'emmerder.
L'année dernière, tu as sans hésité pris part à la bataille électorale des Présidentielles et mis toute ton énergie à dénoncer la dictature rampante que Sarkozy nous préparait, pire que le Chili, tu disais, et comme tu te souvenais très bien d'Allende et du coup de la Moneda, tu t'es proposé pour servir de garde du corps à Ségolène Royal, faisant preuve d'une bravitude peu commune. D'ailleurs, à t'écouter, si Sarko était élu, tu choisissais illico l'exil en Patagonie avec Florent Pagny.
Et on a vu fleurir, sur tes fringues, sur le capot de ta voiture, sur ton blog, des stickers et des images courageusement engagées, citoyennes, militantes à souhait.
Et puis Sarko a été élu, et tu n'as finalement pas quitté l'Hexagone (mais tu n'es pas le seul, même ce grand militant qu'est Yannick Noah est resté, malgré ses menaces de délocaliser ses albums aux Bahamas, où l'on aurait vu grandir une génération de bisounours scandant "Saga Africa" le poing levé).
Et tu as recommencé à t'emmerder.
Au printemps dernier, tu as épousé la cause des anti-OGM, parce que tu avais pu visionner "Le monde selon Monsanto" et que ça t'avait littéralement révolté de voir comment une multinationale hégémonique menaçait de foutre dans ton assiette des petits morceaux de cancer radio-actifs en ruinant au passage les pays du Tiers-Monde
Et on a vu fleurir, sur tes fringues, sur le capot de ta voiture, sur ton blog, des stickers et des images courageusement engagées, citoyennes, militantes à souhait.
Et puis on a moins vu José Bové à la télévision, l'affaire est un peu tombée dans les oubliettes médiatiques...
Et tu as recommencé à t'emmerder.
Aujourd'hui, Benoît, je te vois enfin sourire à nouveau, et ça me fait plaisir.
Ton militantisme forcené, ton engagement parfaitement altruiste et ton sens de la justice planétaire ont enfin retrouvé un terrain d'expression digne de la ferveur qui t'anime.
Parce les élections régionales approchent lentement mais sûrement, que les élections européennes sont pour bientôt, que le chômage augmente, que les inégalités en France se creusent et que ça t'insupporte, parce que tu es un citoyen responsable, acteur volontaire dans la dynamique globale de ton pays, et que tu sais que d'ici quelques semaines se jouera l'avenir de la France.
Et on voit fleurir, sur tes fringues, sur le capot de ta voiture, sur ton blog, des stickers et des images courageusement engagées, citoyennes, militantes à souhait.