Tu m'as fait cavaler, Betty.
Tu m'en as fait voir, du paysage.
J'en ai passé, des heures, des journées entières à te chercher, à te courir après, à
feuilleter des milliers de pages dans les musées, à me fader mille sites internet et trois-cent courriers électroniques.
Sans rire, Betty, je suis même allée me cailler les miches par moins dix-huit degrés chez
les Polaks pour essayer de trouver cette putain de trace de toi.
Tout ça parce qu'en 1945, un voisin a raconté à Grand-Mère qu'il t'avait aperçue à travers
les barbelés, pas encore morte, plus tout à fait en vie, et qu'il fallait qu'on puisse mettre un point final à tout ça.
Alors j'ai pris l'avion et je suis passée sous la grille qui proclame que
"Arbeit March Frei", et je peux te dire que j'avais les chocottes, Betty, je faisais pas ma fière, ce
jour-là.
Ouais, tu m'as sacrément fait cavaler, Betty.
Mais j'ai fini par te mettre la main dessus.
Allez.
Bonne nuit, cousine.
Berthe "Betty" MOHR
Dora 22/08/1922 - Auschwitz 20/10/1942