Magazine Journal intime

L'Armée des Ombres

Publié le 05 novembre 2008 par Corcky


Il y a quelque chose qui me chagrine.
Tu me répondras qu'il y a TOUJOURS quelque chose qui me chagrine, vu la quantité de râleries souvent puériles que je déverse sur ce blog à intervalles réguliers.
Mais quand même.
Le gouvernement français convoque une conférence européenne sur l'immigration et l'intégration.
C'est pas nouveau, on est dans la politique du chiffre et le but de notre ami Brice Hortefeux est un peu similaire aux objectifs d'un jeu vidéo basique pour geek boutonneux et puceau: Dégager un maximum d'immigrés clandestins en un minimum de temps ("A'gade, Nicolas, a'gade, je pète les scores et j'en dégage dix mille avec mon arme secrète méga-bonus: la délation du fonctionnaire zélé!")
Ce qui surprend, c'est la ville choisie pour abriter ladite conférence, puisqu'il s'agit de Vichy, capitale des carottes persillées du même nom, des cures thermales et accessoirement, haut lieu de la Collaboration et siège du gouvernement du Maréchal Pétain (Travail, Famille, Patrie et pantalon sur les chevilles pour une meilleure pénétration de l'occupant nazi).
Que ce choix puisse choquer, c'est plus que normal, et on peut même se demander s'il s'agit d'un hasard complet ou si le Petit Nicolas a voulu faire un clin d'oeil aux amis du Borgne en faillite (à ce propos, j'espère que notre ami Dieudonné a pensé à renvoyer l'ascenseur au parrain de sa fille en renflouant un peu les caisses du F.N qui en ont tant besoin).
Personnellement, ça me met un peu la gerbe, je dois l'avouer, et je suis bien contente de savoir que des gens ont manifesté un peu partout pour protester, vu le climat actuel de chasse aux sans-papiers et la violence qui accompagne les arrestations, sans parler des conditions de rétention tout juste dignes des prisons de Bokassa ou de Kadhafi (deux grands amis de la France, il faut le reconnaître, ceci expliquant peut-être cela).
Là où, par contre, j'ai un peu tiqué, c'est quand j'ai vu ces quatre gusses déguisés en déportés, avec toute la panoplie made in Auschwitz (du pyjama rayé à l'étoile jaune), qui braillaient que "Rafles, camps, déportation: L’Europe assassine!".
Ne vas pas me prendre pour une intégriste des génocides, ami lecteur, je t'ai déjà expliqué ce que je pensais de l'idée de Sarkozy, qui consistait à faire parrainer un enfant déporté par un gosse bien vivant (et donc à peupler la France de futurs psychotiques dépressifs à tendances suicidaires embourbés dans la morbidité la plus délétère, fermez la parenthèse).
Mais je t'avoue que sur ce coup-là, je m'interroge.
J'ai toujours pensé que les amalgames grossiers étaient contre-productifs, voire franchement nuisibles, même s'il m'arrive d'en user et d'en abuser parfois moi-même (j'ai souvenance d'avoir mesquinement fait remarquer, lors d'une rediffusion du
Nessum Dorma de Puccini, que Luciano Pavarotti n'avait rien à envier à Carlos, et vice-versa).

Je m'interrroge donc, malgré tout.
Je ne suis pas certaine que cette récupération un peu facile, et même carrément vulgaire, du génocide nazi, puisse contribuer à faire prendre conscience aux gens des conditions inhumaines dans lesquelles on arrête, retient puis expulse les immigrés clandestins en 2008.
Même si nos bonnes vieilles années 30 sont, comme tu sais, dans l’époque, l’épouvantail dont s’emparent, quel que soit le sujet, ceux qui sont en manque d’arguments un tant soit peu convaincants. Et pourtant, des arguments, on n'en manque pas quand on en vient aux violations quotidiennes des Droits de l'Homme en notre Doulce France de l'An de grasse Grâce 2008, notamment en ce qui concerne le traitement réservé aux sans-papiers (mais pas que).

Et puis quoi, après, on va nous expliquer qu'il y a du Zyclon dans les Centres de Rétention, qu'on extermine les sans-papiers, qu'on fait du savon avec leur graisse et des abats-jours avec la peau de leurs enfants?

Il faut se réveiller, les copains, parce que c'était ça, les rafles, les déportations et les camps de l'Europe nazie, alors si nos petits Jean Moulin d'opérette (en mal d'actes héroïques, sans doute nés soixante ans trop tard pour pouvoir se la péter avec Rol Tanguy) pouvaient arrêter de se toucher, et plutôt essayer de trouver des analyses et des justifications autrement plus sérieuses, on n'en serait peut-être pas à se foutre gentiment de leur gueule, peut-être même que les manifestants seraient plus nombreux dans les rues (quatre-vingt  altermondialistes pelés dans les rues de Vichy, c'est presque risible, quand tu compares à la manif' officielle qui avait lieu un peu plus tard).

A force de dire n'importe quoi, on transforme la plus noble des causes en fatras indescriptible, et ce genre de bouillabaisse indigeste, personnellement, je n'y goûterai pas (d'autant qu'on entre de plein pied dans la période cruciale des épidémies de gastro-entérites).
N'est pas Pierre Brossolette ou le colonel Fabien qui veut.


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