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Vent de douceur sur la scène française

Publié le 24 mai 2009 par Dalyna

Quel est ce vent étrange qui souffle sur la scène féminine française ces dernières années ? A l’évidence, quel que soit le nom de l’artiste ou l’air de sa chanson, ce vent a toujours la même odeur. Un parfum à l’arôme bonbon si fort qu’il en devient vite écœurant. A chaque fois, c’est pareil. On nous présente la petite dernière, issue de la « nouvelle scène française ». Sauf que la nouvelle scène n’a rien de d’innovant. Et pour en faire partie, nul besoin d’inventivité, il y a juste une marche à suivre.

Myrtille

Myrtille

Rose

Rose

Un nom de fruit ou de fleur

Tout d’abord, il faut commencer par se trouver un nom d’artiste. Et là, inutile de vous casser la tête longtemps… Prenez un dictionnaire sur la faune et la flore, et choisissez-en un au pif. Faîtes comme Rose et Myrtille, le but étant toujours de choisir un nom qui fait petite fille mignonne-tout-plein. Si parmi la flore, rien ne vous attire, il vous reste toujours la possibilité de choisir un prénom parisien très en vogue, mais attention, toujours dans la thématique « mignonnette », n’oubliez pas. Dans ce cas, vous pourrez opter aisément pour Camille ou Anaïs. Plus récemment, une petite nouvelle a fait preuve de grande originalité, puisqu’elle a choisi ni une fleur, ni un prénom parisien, mais fort heureusement, elle a eu la présence d’esprit de rester dans la thématique mimi : elle s’appelle Cœur de Pirate. Je salue l’audace, mais bien lui en a pris d’être restée dans notre dominante à l’eau de rose, je vous avoue que j’ai eu très peur en découvrant son clip tout à l’heure. Imaginez, un instant, j’ai cru voir un truc nouveau.

Bon maintenant pour Myrtille, Rose, Anaïs, Camille et Cœur de pirate, c’est cuit, vous ne pouvez pas les utiliser puisqu’ils sont copyrightés. Mais je crois que Huile de coco et Camomille sont dispos. Passons donc à la deuxième étape.

Camille

Camille

Un physique lisse

Je vous le dis tout de suite : les cheveux frisés, les lunettes, la coupe afro, le teint mat, jaune, gris ou rouge, les rondeurs, oubliez tout de suite. On vous a dis : faut être mi-gnon-nette. Et il semble que cela ne va pas de pair avec les excentricités ou simples variantes qu’offre la nature. De plus, pour pouvoir s’appeler Myrtille ou Fleur de cactus, on doit forcément être pure et lisse, sinon ça ne colle pas. Donc, démerdez-vous comme vous voulez, faîtes-vous blanchir la peau comme Beyoncé, un régime carotte-concombre, ou un brushing toutes les 2 heures, mais je ne veux voir que des filles filiformes aux cheveux châtains clairs à blonds, lisses comme de la soie, et de préférence longs mais ce n’est pas obligé. Pour le visage aussi : pas de lunettes, pas de cicatrices (ça marche bien le laser), pas de gros nez ou de détails pouvant choquer l’auditoire. Le mot d’ordre est lisse-lisse-lisse, n’oubliez pas. A côté de la scène française féminine, la Nouvelle Star fait presque office de programme Punk-Rock : Camelia-Jordana avec ses grosses loupes, La tortue et son physique loin du jeune premier, Larry et sa coupe afro ou encore Dalé… On n’a jamais vu des chanteurs avec un tel look passer en prime. Même à 2 heures du mat’ juste après Chasse et Pêche, on n’avait jamais vu.

Anaïs

Anaïs

La mignonnette : une femme-enfant

pochette-coeur-de-pirate

C’est là qu’on comprend tout l’intérêt de s’appeler Canne à sucre et de porter une frange blonde.  Pouvoir exploiter un univers sucré et pétillant de petite chose fragile. Oui, la nouvelle chanteuse française est une éternelle gamine, qui croît au père Noel et au Prince Charmant, qui aime les petits chatons et la nature, et qui nous pond des chansons d’amour mièvre. Extraits.

-   Rose, « la liste » :

Jeter tout par les fenêtres
T’aimer de tout mon être
Je ne suis bonne qu’à ça
Est ce que ça te dé-çoit ?
J’ai rien trouvé de mieux à faire
et ça peut paraître bien ordinaire
Mais c’est la liste des choses que je veux faire avec toi

-   Myrtille, « Quelque chose dans l’air »

Quelque chose dans l’air comme
Quelque chose dans l’air comme
Un parfum saisissant
Il y avait quelque chose dans l’air comme
Quelque chose dans l’air comme
Un parfum saisissant

-   Cœur de pirate, « Comme des enfants »

On se prend la main, comme des enfants
Le bonheur aux lèvres, un peu naïvement
Et on marche ensemble, d’un pas décidé
Alors que nos têtes nous crient de tout arrêter
Mais il m’aime encore, et moi je t’aime un peu plus fort
Mais il m’aime encore, et moi je t’aime un peu plus fort

Après, c’est une question de goût. Il est évident que ce n’est pas ma tasse de thé, mais je respecte les goûts de chacun et ce n’est pas le fait que cela ne me plaise pas qui motive mon article. Ce que j’ai du mal à accepter, c’est surtout cette mouvance qui se perpétue. L’idée que dans l’art, il y ait des règles, un code à suivre. Je l’ai décrit ici en exagérant légèrement le trait, mais faut pas se leurrer, à voir la programmation musicale sur W9, M6, et les stations de radios, nul doute qu’on n’est pas loin de ces manigances. Ca me soule de voir ces petites chanteuses à la tête toute lisse venir nous chanter leurs histoires de gamines mignonnettes aux rêves enchantées. La vie, ce n’est pas ça. La vie, c’est une diversité des parcours et des physiques, des messages, des histoires. La musique non plus, ce n’est pas ça. Ca, c’est du marketing et un gros foutage de gueule. Quand je pense qu’on nous soule avec Hadopi et la rémunération des artistes, mais mettre 20 euros dans un CD de mignonnette ou pour écouter que « Le premier amour, c’est n’importe quoiAAAAaaaaaaaAAAAh », pour moi, c’est juste impossible. Je dois avoir un cœur de pirate dans le fond.


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