¨*Vacances : cessation des activités ordinaires…
La ville est nue. Sous les pavés que survolent des vespas, les souvenirs s’allègent. Finies les pénitences. Les terrasses dégoulinent. Les femmes sont belles. Toutes coloriées de jours d’été. Comme des abeilles, elles promènent en riant leur taille de guêpes émoustillées. Elles partagent leur parfum d’un mouvement de hanche. Comme un souffle de vent qui ferait fuir les papillons. Inutile de leur passer le message. Elles savent… Butinent de jour comme de nuit. Et vivent les vacances. Mais à qui s’intéressent ces divas ? Pas aux vieux beaux en pâmoison qui font sonner leur pognon. Quel intérêt d’en avoir plein les poches sous les yeux ? Pourquoi aimer les auréoles d’une réussite trop nette ? Mais de qui rêvent ces belles dames ? Pas de ces petits jeunes aux gestes maladroits. Leurs soupirs fanfarons ont des allures de fausses promesses, d’aventure à la va vite. Excepté, de temps à autre, entre deux sommeils, en encas. Mais en aucun cas par habitude. A qui réservent elles les dérapages de leur rouge à lèvre rubicond ? Pour qui leurs lentilles colorées se feront-t-elles gentilles ? Un regard d’elles et je me damne. Arrêt du cœur. Je meurs illico sur le premier pot de fleurs. Me relève et me jette sous un tram nonante au tout dernier moment en criant « je vous aimais toutes ». Et pendant les deux cents mètres du freinage, accroché par le pantalon, je deviens mobile comme un Calder. Le cri des freins du tram enragé couvre le chant de leurs prénoms que je tente de prononcer dans mes derniers souffles. Ma mémoire défaillante perd le fil de mes amours saute mouton. Trop tard, je risque de passer en mode mal aimé. De devenir nain de jardin lubrique, propriété publique. Que des garces arroseront de leurs moqueries, en passant sans s’émouvoir.
Je divague. Naturellement. Vague impression de surimpression. Un été qui en recouvre un autre qui lui-même… Comme ces poupées slaves qui boivent leur petit lait à la russe. Beautés sauvages, beautés légendes. Prêtes à tout pour nous faire des bébés ? Comme je vous comprends. A dada sur les genoux de bon papa. Dans quelques années, vous rejoindrez le front des mères de la mer du Nord. Votre progéniture s’ennuiera sur les plages en attendant la pluie. Vos maris, restés à Bruxelles, en pères esseulés, iront par paire, comme de faux jumeaux. Encore un verre. Ca ne mange pas de pain. Jusqu’à pas d’heure. La merveilleuse solitude entre copains. Quand la ville se réveille à peine et en pleine nuit, sans pleine lune. Quand les endroits branchés somnolent et ferment. Quand les amis sont aux abonnés absents. Quand il ne vous reste que les plaisirs solitaires. L’horoscope, le sudoku ou le mal au cou? Un cinéma ? Même mon chien soupire. Un court instant il montre les dents. La chaleur rend son humeur soupe au lait. Je n’ai pas le courage de le mordre. A la télé, le journal passe en boucle, en break, prisonnier entre deux séries perdues. Ni nouvelles, ni scoops à se mettre sous la dent. Pas de rumeurs. Tout le monde, il est pas là. Même mon gsm s’ennuie et fait semblant de recevoir des messages. Fait trop chaud pour écouter la météo. Mon rosé est tiède. La maison est sale. Je refuse de passer l’aspirateur. J’aurais peur de perdre les dernières preuves de mon existence.
Sous les pavés, il n’y a plus de plage. Retour des juilletistes, des aoûtiens et des embouteillages. Inutile de piquer ma crise, l’autre est déjà là. Je me couche et j’éterne. Oui j’éterne. Je me roule en boule et je dors du sommeil injuste. J’attends le retour de l’hiver et ses froidures. Je veux que les femmes se rhabillent, perdent leurs couleurs, que la météo du temps rejoigne celle des affaires ordinaires. Je veux tourner la page des vacances.