Magazine Humeur

Sur la taxation carbone

Publié le 02 septembre 2009 par Saucrates

Réflexion trois (2 septembre 2009)
Alors que le gouvernement Sarkozy-Fillon lance publiquement la taxe carbone, et que le débat monte au sein du Parti Socialiste, quels sont les enjeux du débat autour de la taxe carbone ...

La taxation carbone va vraisemblablement voir le jour dès 2010, avec un montant de 14 euros par tonne de carbone entreprises. Selon le premier ministre, il s'agira d'un trasnfert de fiscalité, non d'une fiscalité nouvelle. Les entreprises bénéficieront d'un allègement de la taxe professionnelle sur les investissements, tandis que les ménages devraient bénéficier d'un allègement des prélèvements sur les salaires ou d'un allègement de l'impôt sur le revenu.
http://www.liberation.fr/terre/0101588453-taxe-carbone-14-euros-par-tonne-et-l-electricite-epargnee
Le conditionnel est de rigueur. Autant je n'ai aucune interrogation sur la suppression de la taxe professionnelle pour les entreprises et sur le fait que les entreprises seront privilégiées dans ces transferts de taxe, autant les promesses de ce gouvernement en faveur des ménages me paraissent fragiles. Les seuls allègements de prélèvements qui pourraient bénéficier aux ménages concerneraient les charges sociales salariales (environ 20 à 22% des salaires bruts) mais il me semblerait plus conforme à l'idéologie d'un gouvernement libéral favorable aux grandes entreprises de vouloir faire diminuer les charges sociales patronales, qui représentent plus de 50% des salaires bruts, mais qui ne bénéficieraient qu'aux entreprises et absolument pas aux ménages. Je ne serais pas étonné que in fine, les allègements de charges sociales décidées touchent principalement les charges patronales au lieu des charges salariales.
De même pour l'impôt sur le revenu, il est également probable que l'allègement de l'impôt sur le revenu privilégiera une fois encore les hauts revenus. Et il est aussi probable que le gouvernement privilégiera l'allègement de l'impôt, qui bénéficiera également aux revenus du capital et aux très hauts revenus, que les allègements de charges sociales, à moins que ces dernières ne soient favorables à la rentabilité des entreprises (et donc qu'il s'agisse d'allègements des charges sociales patronales sans incidence sur les ménages).
L'opposition du Parti Socialiste sur cette mesure de taxation, par la voix de Ségolène Royal puis de sa première secrétaire, Martine Aubry, est assimilée par certains, à l'UMP ou chez les écologistes, comme une annonce démagogique, au moment même où l'on commence à réfléchir, dans les partis politique d'opposition, à une alliance anti-Sarkozy.
Je partage l'opinion socialiste. Il faut effectivement un système de taxation environnementale, plus qu'une taxe carbone, mais elle ne doit pas viser principalement les ménages. Une telle taxe doit viser les activités polluantes elles-mêmes et non pas frapper les utilisateurs de ces biens, en les considérant comme responsables des émissions de carbone.
Pour rappel (je l'ai déjà écrit précédemment), la solution de la taxation peut peut être retenue dans les cas notamment où il y a atteinte à l'environnement. Il est évident que le niveau fixé pour la taxe permet de désinciter plus ou moins fortement une entreprise polluante à produire dans un endroit donné, ou à rechercher des technologies plus propres. Mais les taxes environnementales peuvent simplement conduire des entreprises multinationales à effectuer leurs productions polluantes dans des états moins fiscalisés (notamment les pays en voie de développement), avec les conséquences que cela peut avoir sur l'emploi dans les pays à fiscalité environnementale.
On s'aperçoit donc ici que le traitement d'une externalité environnementale peut avoir d'autres externalités sociales, sans effet sur l'environnement mondial global (puisque la production polluante aura malgré tout lieu). Une telle solution s'apparente simplement pour les pays développés à une exportation d'activités polluantes. Pour avoir un effet valide sur l'environnement, de telles actions se doivent donc d'être appliquées au niveau multinational.
Plus largement, une simple taxation sur le contenu carbone d'un produit n'est pas suffisante. Il faut réfléchir à un système de taxation qui frappe de manière privilégiée les matières premières pour en renchérir le prix, qu'elles aient un contenu carbone comme le pétrole ou le charbon, ou non. Il faut penser un système de taxation qui traite le caractère limité de nos ressources en matières premières, pour que nos économies puissent privilégier leur remplacement par des matières recyclables et renouvelables. Et ce système de taxation doit être mondial, et conduira à renchérir fortement les prix de ces matières premières, au bénéfice du financement de développement au niveau mondial, et non de transferts de taxations existantes.
La proposition française de taxation carbone de l'UMP ne serait pas problématique si elle ne reposait pas sur cette volonté d'éviter les entreprises et de porter sur les seuls ménages. Les diverses interventions de l'Elysée ou de Matignon ne peuvent que nous inquiéter sur l'idée cachée derrière cette belle mesure. Initialiement, le gouvernement avait déclaré que les entreprises devaient être exonérées de ces mesures parce qu'elles étaient déjà touchées par le système des permis négociables carbone (ou droits carbone), alors que les droits carbone sont justement une mesure à coût nul pour l'ensemble des entreprises ; les droits des uns étant rachetés sur un marché par les autres. Par ailleurs, la taxation carbone a très tôt été envisagée comme un substitut de la taxe professionnelle dont le gouvernement a annoncé la suppression. In fine, tout le monde sait enfin que les ménages seront les seuls financeurs de cette taxe carbone, en tant que seuls consommateur final, alors que les entreprises de toute façon peuvent librement répercuter dans leurs prix les hausses des prélèvements fiscaux. Mais les ménages sont et seront toujours les payeurs finaux de toute forme de taxation (hormis sur les bénéfices).


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Saucrates 232 partages Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine