C’est aujourd’hui que Barack Obama va donner un discours pour expliquer les contours de sa réforme de l’assurance maladie aux Etats-Unis. Si la nécessité, et même l’urgence, d’un changement en profondeur concernant leur système de santé apparaît comme une évidence pour les habitués de la Sécurité sociale à la française, aux Etats-Unis, cela continue de coincer pour beaucoup. On avance ici et là des arguments, des comités d’opposition se montent… Sans doute, l’occasion pour des républicains en mal de John Mac Cain, de montrer surtout leur opposition à la politique des démocrates. Il ressort également de ces manifestations beaucoup d’inquiétude sur le coût qu’une telle Réforme pourrait engendrer dans un pays déjà affaibli par la crise. Je pense aussi, plus simplement, qu’il est plus que probable que ces manifestants disposent déjà d’une assurance maladie, et que vu qu’ils ont les moyens de se la payer, se fichent un peu du sort des autres.
Y’en a marre de ces salauds de pauvres. Ceux qui ne font qu’être malades et coûter de l’argent à l’Etat. En France aussi, nous avons nos champions. Là où les Etats-Unis se socialisent un tant soit peu, la France décide au contraire de s’américaniser. C’est un drôle de paradoxe pour un Président qui s’est fait élire sur l’idée d’un retour aux valeurs Françaises. A ce moment-là, hélas, certains français ne parlaient pas le même langage que leur candidat favori. Lui ne parlait pas Jaurès, Blum, éducation, santé, formation, respect du travailleur. Lui, il était plus sur le registre des valeurs du Cac 40, de celles des grands patrons (licencier pour mieux profiter), des banquiers qu’il fait mine de gronder tout en leur glissant des enveloppes de milliards que nos petits-enfants rembourseront sans doute encore. C’est étrange comme les caisses ne sont pas si vides que ça par moment. C’est bien connu, on ne prête qu’aux riches. Aux restaurateurs, vous ferez allégrement grâce de 2.5 milliards d’euros de TVA. En revanche, à un malade qui a en plus le malheur d’être pauvre, s’il doit payer 140 euros de forfait hospitalier pour 7 jours au lieu de 112, vous lui rétorquerez sans problème que le responsable est le trou de la sécu. Donc, c’est encore un peu de sa faute, puisqu’il est malade, le bougre. Et c’est reparti pour un tour… Aux entreprises de France, on fera cadeau de 11,4 milliards de taxe professionnelle. Je rappelle que le trou de la sécu s’élevait en 2008 à 10,2 milliards d’euros et sera de 20 milliards en prévision pour 2009. Et puis, de l’autre côté, en pleine prévision de pandémie grippale, donc de forte consommation de médicaments, on envisage de baisser de 20 % le remboursement de médicaments de consommation courante : aspirine, paracétamol. Que c’est astucieux. On aurait pu aussi, je ne sais pas moi… surtaxer la chirurgie esthétique, histoire de s’assurer que l’argent sortira chez ceux qui en ont les moyens. Mais finalement, non, Carlita n’était pas d’accord, on a préféré taxer encore une fois la population dans son ensemble, sans distinction de revenus, puisque de toute manière, on tape, on tape, on tape, mais personne ne dit rien, et l’opposition est morte. Et comme on a un Ministre du Budget particulièrement lumineux, on a eu droit au « pompom sur le gateau » comme dirait l’autre. Dans Libération, on apprend de la bouche de Woerth que l’autre piste pour réduire les dépenses de la Sécu est la réduction des arrêts maladies. « Une plaie en France », dit-il, avant d’ajouter : « On a d’ailleurs connu une augmentation très forte cette année. Il y aura donc des mesures de plus en plus sévères pour lutter contre ceux qui prennent des arrêts qui ne sont pas justifiés sur le plan médical ». Ben oui, c’est vrai Eric t’as raison, c’est de la faute aux malades si la France est endettée. C’est la faute aux 2/3 fraudeurs qui se sont faits arrêter 2 semaines au lieu d’une. Et puis, tant qu’on y est, la crise, c’est eux aussi. Du Kerviel, du cadeau pour les potes bien placés, du Wonder Sarko pour sauver les banques et j’en passe, ce n’est pas de l’argent tout ça. Mais les malades, suspectés en plus d’être des fraudeurs en puissance, qu’on les pende sur la place publique, ces voleurs-qui-font-semblant.
A quoi sert d’avoir des acquis sociaux s’ils sont sans cesse contestés et dénigrés par les dirigeants ? Entre les retraites des mères, le travail le dimanche, la fin des 35 heures, le travailler plus pour gagner pareil, les licenciements sauvage, et maintenant la santé, à quoi va-t-on s’attaquer encore ? Comment expliquer qu’au pays même du libéralisme, les américains tentent d’avancer vers une once de social, quand chez nous, ce gouvernement crache à la figure de notre système, pourtant si enviable, en tapant un peu plus chaque jour sur ceux qui en ont le moins dans ce pays ?
Je vous renvoie vers ce reportage, sur les dommages collatéraux du 11 septembre 2001 intitulé « Les oubliés du 11 septembre », disponible sur Dailymotion. Ce reportage, s’il ne traite pas directement du système de santé américain, montre tout de même le quotidien d’un malade aux Etats-Unis. Et ce qu’il ne faut surtout pas reproduire chez nous.