Il ne s’était pas écoulé beaucoup de temps, depuis que j’avais avalé la lie de mon dan’up d’un trait, et sombré dans un semblant de sommeil à même de me soustraire à la lourdeur du temps, et au farouche des regards qui m’enviaient ma couverture « spéciale », que je fus réveillé par un brouhaha qui se faisait de plus en plus bruyant, au fur et à mesure que ces commanditaires, s’avançaient un peu plus dans le vestibule qui conduisait dans la geôle. Une horde de flics débarqua d’un coup, encerclant trois gars d’une taille très imposante, tous torses nus, les bras tailladés et jurant par tous les Dieux de se venger de je ne sais quel fils de pute. Eux, ne se sont pas trop fait traiter comme j’ai vu se faire malmener tous ceux qui ont été introduit ici après moi !
Les policiers avaient du mal à les contenir, et semblaient même les prier de ne pas s’en faire. Cela peut paraitre drôle, mais même un flic du haut de ses pouvoirs chimériques, a la trouille face à un gaillard de ce genre. Ils les appelaient par leurs prénoms et leur firent les bises, une fois que le calme vint à se réinstaller et que les trois malabars daignèrent se plier à la procédure. La fouille corporelle et le retrait de ceinture, lacets et autres objets, leur fût même épargnée. Ce n’est que lorsque l’un d’eux a commencé à se lacérer le bras gauche à l’aide de son pendentif en forme de plaque d’immatriculation militaire, qu’ils furent délestés de tous leur arsenal interdit et fin prêts à entrer nous disputer un espace déjà rétrécit par les anciens locataires. Une peur justifiée me prit le cœur, quand j’en suis venu à penser qu’ils pouvaient facilement me briser les os si je refusais de leur céder ma place, moi qui étais face aux barreaux, portais une chemise rose, avais les cheveux plaqué au gel et sentais Fahrenheit. J’étais facilement repérable comme le Zbida des Zbidas, la cible la plus facile de toutes, et je commençai à angoisser même avant que mes trois cauchemars n’eurent franchi la porte…
Ils sont entrés dans la geôle en toisant tout le monde, ils regardaient chacun de nous dans les yeux qui cherchaient vite un détour pour ne pas croiser leurs regards et par là, subir leurs foudres qui devaient inexorablement s’abattre sur quelqu’un ou quelques uns. C’était cela la loi à l’intérieur, et la nature n’avait en rien arrangé l’instinct humain à travers la supposée évolution. J’aurais aimé transcrire, les monologues que se sont mis à débiter les trois géants pour provoquer le chef en titre des lieux, mais je ne peux ce faire, hélas, sans transfigurer, pour ne pas choquer, car il y’en avait pour nos oreilles et celles de nos mère respectives, sœurs et autres parents. C’était un passage forcé, un rituel pour l’honneur et le respect, toujours selon le code des lieux, et tant que le caïd de la cellule ne se manifestait pas, ils allaient continuer à tous nous harceler d’une menace imminente d’attaque pour une raison ou une autre…En pur fils de l’ancienne médina de Kenitra, je me décidai à ne pas me laisser faire si l’un d’eux essayait de s’attaquer à moi. Toute la hogra que j’avais essuyée depuis ce matin était entrain de remonter à la surface de mon…quand soudain… La bagarre éclata ! Mou3awiya s’est jeté d’un seul coup, sans préambules ni geste qui pouvait montrer qu’il se préparait au combat, sur le premier qui s’approcha de lui. Les deux autres essayèrent de prêter main forte à leur copain, pris de cours par le coup de boule qu’il a encaissé en pleine face, mais se heurtaient à un mec qui ne semblait pas chu de la dernière pluie. Avant même de l’avoir approché, ils se sont retrouvés par terre, fauchés par quelques tacles savamment administrés par je ne suis plus combien de mecs qui ont sursauté au même moment, et frappé à la même vitesse. Je restai bouche bée devant un spectacle qui se prolongea un moment, et la bastonnade n’eut qu’un sens, celui que vous imaginez, avant que les esprits soient calmés par l’entrée des policiers dans les lieux, eux qui jusque là, étaient entrain de s’amuser à regarder faire, peut être même qu’ils ont pris des paris sur qui de qui allait gagner… Mou3awiya avait donc sa propre armée, et ce n’était pas le chef par hasard, mais au mérite de ses troupes, qu’il semblait commander même dehors, car je doute fort que cela soit juste une rencontre de geôle. C’était bien orchestré, bien étudié et j’avoue que j’ai feint d’applaudir tellement c’était beau de voir un tyran se faire arranger le portrait…