Ce tableau... Ce couple...
Elle avait tempêté, vociféré mais, au fond, elle sentait bien que le problème était ailleurs. Elle sentait bien que cette petite gorgone qui s'était installée au creux de son ventre ne se satisfaisait pas de cette sortie. Elle ne s'apaisait pas. Elle continuait à tourner insidieusement.
Et puis les larmes étaient enfin venues, irrépressibles et salvatrices...
Ce n'était pas la colère, c'était le doute et la douleur...
Elle ne savait ni pourquoi la bête s'était nichée là, ni comment l'en déloger mais elle était là et elle ne pouvait plus l'ignorer.
Il assistait à ce déballage, subissait les assauts, ne savait plus comment prendre les choses.
Par moments, il avait envie de toute envoyer balader.
A sa mesure, il essayait de faire des efforts alors qu'il ne rêvait que de se glisser dans le confort d'une relation établie et sereine.
Il préférait ne rien dire de peur de la blesser. Elle préférait se risquer à dire et à égratigner de peur que le silence ne gangrène la blessure.
Il craignait le conflit qui trouble et chamboule et la lassitude qui peut en découler. Elle craignait l'absence de discussion (même si elle devait être conflictuelle) quand on n'arrive plus à communiquer, à extraire le grain de sable de l'engrenage avant qu'il ne casse le système entier.
Il était sûr de lui et l'avait montré, cela suffisait, c'était pourtant simple et elle devait bien savoir, comprendre les sous-entendus, les non-dits. Elle se sentait accablée par ce qu'elle prenait pour de l'indifférence.
Elle avait conscience de son humeur changeante et des difficultés que cela engendrait. Il ne savait pas comment gérer ces changements intempestifs alors il préférait attendre de reconnaître un comportement moins "dangereux" pour reprendre la communication.
Elle avait une peur viscérale de retrouver l'indifférence des années passées où chacun n'était plus que transparence pour l'autre. Il craignait la trahison, le coup de Jarnac, encore.
Elle attendait le geste, les paroles qui prouveraient, qui rassureraient. Il prenait cette attente, ce non-geste de sa part pour de l'indifférence, pour une punition à son encontre, une défiance.
A ce moment là, alors qu'elle se répandait sous les coups répétés de ses peurs, de ses doutes, il sentit instinctivement que, même si c'était douloureux, même s'il n'avait rien à se reprocher ou à se faire pardonner, il fallait qu'il la prenne dans ses bras, qu'il la serre en tenant son visage contre le sien, qu'il la rassure comme un enfant réveillé par un cauchemar, en pleine nuit.
Il se sentait heurté par toutes les émotions qu'elle lui livrait et qu'il ne comprenait pas forcément car dénuées de sa logique cartésienne.
Elle avait besoin de cet enlacement, de s'abandonner contre lui et qu'il lui dise qu'elle était toujours précieuse à ses yeux.
Elle sentait qu'il lui insufflait sa force de même que, le jour où il serait en état de "faiblesse", de manque de confiance, elle pourrait, à son tour, lui transmettre la force de son soutien.
D'ailleurs, à ce moment là, il aurait peut-être, lui aussi, eu besoin d'un geste ou d'une parole particulière mais il ne dit rien et elle le serra contre elle en espérant qu'elle répondait ainsi à ses attentes.
Leur étreinte était forte, tendre et passionnée.
Oui, aujourd'hui, elle se sentait petite et fragile mais, instinctivement, elle savait qu'un jour les rapports s'inverseraient, que c'était la force leur couple de pouvoir s'appuyer sur l'autre après avoir soutenu. Il n'y avait pas de sens unique à leur relation.
Elle était femme, demain ou après-demain, elle pourrait être homme. Il était fort, demain ou après-demain, il pourrait avoir besoin de se blottir tout petit contre elle.
Non, elle n'oubliait pas qu'il y avait un évènement à fêter, aujourd'hui, et ils le fêteraient !
Elle l'espérait...
Elle ne savait pas comment ni quand mais elle le voulait, refusant que la passivité et la facilité du quotidien ne vienne tiédir leurs sentiments.
Elle savait aussi qu'en plantant son regard dans le sien, elle pouvait y puiser tout ce dont elle avait envie, besoin... Rien n'était gagné, loin de là, mais il y avait tellement de chance sur leur chemin, tellement de petits signes qui leur murmuraient qu'ils avaient tout pour être heureux à condition de le vouloir, de faire attention, tous les deux ensemble !
Ce tableau... Ce couple... ou pas !
A bientôt !
La Papote