Réflexion quarante-quatre (21 janvier 2010)
Du pouvoir populiste ...
Peut-on aujourd'hui parler de pouvoir populiste en France ou ailleurs en Occident (aux Etats-Unis par exemple) ? Le populiste se reconnaît aux grands gestes des mains dont il accompagne ses discours ... dixit Franck Herbert dans «La maison des mères», le cinquième tome de son cycle Dune. A ce titre, Nicolas Sarkozy devrait être considéré comme un leader populiste.
Selon Wikipédia, le terme 'populisme' a en politique une acceptation pratiquement péjorative ...
«Le populisme met en accusation les élites ou des petits groupes d'intérêt particulier de la société. Parce qu'ils détiennent un pouvoir, le populisme leur attribue la responsabilité des maux de la société : ces groupes chercheraient la satisfaction de leurs intérêts propres et trahiraient les intérêts de la plus grande partie de la population. Les populistes proposent donc de retirer l'appareil d'État des mains de ces élites égoïstes, voire criminelles, pour le mettre au service du peuple. Afin de remédier à cette situation, le leader populiste propose des solutions qui appellent au bon sens populaire et à la simplicité, mais ignore complètement les réalités de la décision politique (notamment le fait qu'elles doivent être inscrites dans un agenda, qu'elles doivent tenir compte des avis parfois contradictoires de la société civile), comme la complexité des situations décrites. Ces solutions sont présentées comme applicables tout de suite et émanant d'une opinion publique présentée comme monolithique.
Les populistes critiquent généralement les milieux d'argent ou une minorité quelconque (ethnique, politique, administrative etc.), censés avoir accaparé le pouvoir ; ils leur opposent une majorité, qu'ils prétendent représenter. S'ils accèdent au pouvoir, il peut leur arriver de supprimer les formes traditionnelles de la démocratie, au profit d'institutions autoritaires, présentées comme servant plus authentiquement « le peuple ».
Des comportements populistes peuvent affecter toutes les activités de la société, cela amène des organismes, des institutions ou des associations à favoriser des positions réputées « populaires ». Elles peuvent montrer paradoxalement un certain mépris pour le peuple, le vulgus latin, pensé comme la populace, la foule, les masses, le troupeau. Ceci est particulièrement notable en publicité où « le peuple » est mis en scène, souvent sous la forme de personnages ignorants ou idiots.
On attribue souvent aujourd'hui la qualification de populisme comme synonyme de démagogie ou d'opportunisme politique, surtout vis-à-vis de mouvements d'opposition.»
Voilà une définition que je trouve particulièrement intéressante, notamment en raison de sa parfaite opérabilité pour étudier le comportement du président de la république française, Nicolas Sarkozy.
1) La mise en accusation des élites ou de petits groupes d'intérêt particulier de la société ... Si vous ne vous en rappelez pas, Nicolas Sarkozy s'attaquait régulièrement, avant son élection à la présidence de la république, souvent aux énarques ainsi qu'aux banquiers ... Elu, il s'est également parfois attaqué à la franc-maçonnerie ... Tous groupes auquels il ne semble pas avoir appartenu et contre lesquels il semblait avoir une certaine rancoeur ... il est notamment l'un des rares présidents ou premiers ministres de la période récente à n'avoir pas fait l'ENA, même si l'on compte néanmoins des énarques parmi ses ministres ou ses conseillers ...
2) Des solutions qui appellent au bon sens populaire et à la simplicité ... présentées comme applicables tout de suite et émanant d'une opinion publique présentée comme monolithique ... Les discours du présidentiable puis du président Nicolas Sarkozy correspondent parfaitement à cette présentation, agrémenté d'une gestuelle des mains et des bras qui le font ressembler à un moulin à vent ... Répondre à l'évènement par des promesses simples, frappées (ou présentées comme frappées) du bon sens populaire ... Des promesses pratiquement jamais mises en oeuvre, puisque le rythme de prise des décisions politiques, liées aux débats parlementaires, n'est pas compatible avec la règle de simultanéité de l'actualité ... L'absence de prise en compte des avis parfois contradictoires de la société civile ... Mais qui sont-ils donc, ces civils, qui osent remettre en doute la compréhension immédiate de l'opinion publique dont dispose le président de la république, grâce notamment aux sondages dont son équipe élyséenne est abreuvée ... qui osent remettre en doute l'opinion d'un homme sanctifié par le suffrage populaire !!!
3) Les populistes critiquent généralement les milieux d'argent ou une minorité quelconque (ethnique, politique, administrative) ... Cela est particulièrement vrai comme je le rappelais initialement, surtout concernant le milieu des banquiers ... Pour les minorités ethniques, les procédures de reconduites à la frontière sont là pour nous le rappeler, même s'il ne les accuse pas vraiment d'avoir pris le pouvoir en France ... Il se contente de chasser sur les terres du Front national, sans forcément en reprendre l'essentiel des thèmes et des argumentations ... Sa vision ethnique est limitée par son argumentation sécuritaire ; les minorités ethniques étant seulement accusées d'être responsables de la montée de la délinquance ...
4) On attribue souvent aujourd'hui la qualification de populisme comme synonyme de démagogie ou d'opportunisme politique, surtout vis-à-vis de mouvements d'opposition ... C'est François Bayrou qui fut le premier accusé de prendre des positions populistes par Nicolas Sarkozy et ses affidés juste avant les élections européennes ... Un comble en considérant l'auteur de ses critiques ... Il semble interdit de prétendre mieux comprendre le peuple que le président de la république, surtout depuis que celui-ci à oublier, pour un temps, jusqu'aux prochaines élections présidentielles, ses aspirations en faveur du peuple ...
5) Retirer l'appareil d'état des mains de ces élites égoïstes, voire criminelles, pour le mettre au service du peuple ... Il ne faut quand même pas rêver, Nicolas Sarkozy ne l'a pas fait ... Certains ont pu y croire en l'entendant parler de ruptures, en écoutant son discours ... Mais Nicolas Sarkozy a conservé l'appareil d'état entre ses mains, en n'oubliant pas ses amitiés parmi les plus grosses fortunes de notre beau pays, patrons des plus grands groupes commerciaux de la bourse française, profitant pour ses vacances ou ses escapades de leurs yatchs ou de leurs avions d'affaire ...
6) Des comportements populistes peuvent affecter toutes les activités de la société ... Ce genre de comportement ne se limite effectivement pas à Nicolas Sarkozy et à la présidence de la république française. Ce genre de comportement est simplement plus visible dans le cas des hommes politiques en raison de la médiatisation dont ils font l'objet, en raison de la couverture médiatique dont ils bénéficient ... Mais ce genre de comportement est observé à de très nombreux niveaux, dans de très nombreuses associations caritatives ou autres, dans des syndicats, dans des écoles ou ailleurs ... dès lors qu'il y a un peu de pouvoir à la clef en jeu, quelques occasions de se faire mousser ... quelques considérations à obtenir ... Il est dès lors tentant pour certains de flatter les bas instincts de quelques personnes pour se faire élire, pour manipuler quelques voix, pour être maintenu à un poste auquel on souhaite s'accrocher ...
C'est ce que l'on appelle la politique ...
Pour en revenir au domaine des hommes politiques, on pourrait comparer Nicolas Sarkozy et Barak H. Obama ... Evidemment pas par la taille, ni par la prestance, ni par leur pouvoir respectif, ni par leur image ... mais plutôt par leurs discours, ou du moins par les idées qu'ils essaient de faire passer, de véhiculer ... Mais autant Nicolas Sarkozy semble populiste dans son discours, semble manipulateur de l'opinion, semble faux, creux ... Autant les discours de Barak H. Obama semblent charrier de véritables idées personnelles, de véritables valeurs, à l'opposé de Nicolas Sarkozy ... Lorsque Barak H. Obama prononce un discours où il attaque les banques, les mesures qu'il promet, qu'il propose, qui auront peut-être autant de difficultés à être appliquées que celles de Nicolas Sarkozy, ce discours ne paraît pas populiste ... Il semble concerner un véritable problème, une véritable déviance de l'économie actuelle ... Lorsque Nicolas Sarkozy, avant ou après, s'attaque aux banques dans un discours comparable, cela n'y ressemble pas. Est-ce dû aux gesticulations de ce dernier qui viennent polluer son discours, qui lui donne une terrible proximité fasciste ? Est-ce simplement subjectif ? Est-ce dû au fait que ce genre d'attaque venant de Nicolas Sarkozy ne semble tout simplement pas vrai, trop en position avec sa réalité strass et paillettes d'ami de milliardaires ? N'aurait-il pas affiché de la même manière son amitié pour certains hommes d'affaires milliardaires dès son élection acquise que l'on l'aurait pu facilement cru ? En tout état de cause, l'absence d'application des mesures préconisées contre les dérives de la finance et de la banque ne s'explique pas par une opposition parlementaire contre ces mesures, comme Barak H. Obama, mais bien par une absence de volonté politique d'aller contre les intérêts des puissants et des siens propres ... D'un côté donc un Barak H. Obama grandiloquant ... De l'autre un Nicolas Sarkozy faux et populiste ??? Ou bien est-ce trop simpliste ?
Saucratès
Parties précédentes :
1. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2007/12/23/morale-et-politique.html
2. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/03/22/morale-et-politique-deux.html
3. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/04/30/morale-et-politique-trois.html
4. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/11/26/morale-et-politique-quatre.html
5. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/04/18/morale-et-politique-cinq.html