Je recommence à rêver. Ce qui ne m'était plus arrivé depuis peut-être dix-huit mois. J'ai passé une longue période à combattre le sommeil, pour éviter de laisser libre cours au subconscient. Je crois qu'à force de vouloir réprimer mon affect, j'étais parvenu à l'atrophier malgré moi. Et puis j'ai baissé la garde. J'avais retrouvé la sérénité, et suffisamment de confiance dans les hasards de la vie, pour laisser libre cours à nouveau aux manifestations de mes désirs.
Du coup, j'ai de nouveau rêvé d'elle, cette nuit. D'une manière peu équivoque. Dans mon délire onirique, je me retrouvais avec elle, et elle me parlait de "nous". Avec tendresse, et un petit peu d'appréhension. Alors j'ai feint de rire avec mépris à la main qu'elle me tendait, en tournant la tête pour lui cacher cette violente envie de déglutir. Un peu plus tard, je l'avais quittée en l'ignorant magistralement ("parle à mon cul, ma tête est malade"), satisfait d'un orgueil qui avait su dominer la passion comme une vieille chienne peureuse et docile. Je me retrouvais alors seul, tapi dans l'ombre d'un buisson, l'observant en train de pleurer derrière une vitre en compagnie d'une ou deux de ses amies. J'avais chargé un fusil de précision. J'étais résolu à mettre un terme à son existence, parce que je ne voulais plus vivre avec cette sempiternelle ambivalence. A plus d'un kilomètre, j'ai fait mouche. J'ai dégommé à trois reprises consécutives... Son téléphone portable. J'avais dévié mon tir. En guise d'avertissement, comme pour vouloir dire "sors de ma vie". A travers la lunette, je l'ai vue triste, mais pas paniquée; comme si elle attendait que la quatrième balle fusse la bonne. Je l'ai regardée avec beaucoup d'affection, avant de ranger l'arme dans l'étui. La problème, c'était pas elle. Le problème, c'était moi. Je ne devais pas la tuer.
-_- :-S
Actually, "you can run, but you cannot hide". Alors je vais arrêter de courir. Je vais m'ancrer là où j'en suis arrivé, me retourner, attendre de trouver la manière la plus redoutable et la plus cruelle de détruire ces images omniprésentes que je n'ai jamais voulu déchirer jusqu'ici. Parce que c'est au cours de la journée que j'ai pris conscience de la symbolique de mon rêve. Celui-ci me rappelle qu'il est temps d'arrêter de poireauter, quand bien même je le fais sans le savoir. C'est plus de l'amour, non non. C'est de la rémanence. C'est une partie de moi-même que je n'ai pas voulu assassiner. C'est pas toujours facile de s'amputer d'une partie de soi. Parce que le nouveau moi se porte comme un charme, mais traîne l'ancien moi derrière lui comme un véritable boulet. Il faut que je brise le fil du temps; larguer les amarres en contemplant la beauté d'un port dans lequel je ne naviguerai plus jamais; mais conscient du bonheur, une fois dans ma vie, d'y avoir jeté l'ancre.
Résultat, ma grasse matinée s'est achevée vers 6H du matin. J'ai l'impression de n'avoir pas dormi, je suis complètement crevé. Je n'aurais pas du regarder "Eternal sunshine of the spotless mind", hier soir; tout ça c'est sa faute. En même temps, j'aurais été parfait dans le rôle principal. Peut-être pas grand comédien, mais je l'aurais joué avec les tripes. Ben ouais, les filles au printemps ont des "papillons dans le ventre". Moi j'ai des mouches à merde en train de me pondre dans la tête.
Moralité: le subconscient est plein de ressources. On peut toujours le fuir, tant qu'on a assez de souffle. Mais un jour ou l'autre, on finit par en être épuisé. Trop épuisé pour prétendre pouvoir encore l'affronter. Alors autant se retrousser les manches et "lui niquer sa race" pour de bon. Moi aussi, j'ai plus d'un tour dans mon sac à malice.
Its hard to say that i'd rather stay awake when i'm asleep... Cause everything is never as it seems, when i fall asleep...