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Le porteur de drapeau,

Publié le 02 juin 2010 par Colettesays

Le 1er Avril c’est le jour des farces. Toi qui aimait rire – t’es mort.

Un coup de téléphone dans l’après-midi pour dire que tu ne vas pas bien. Un autre le soir pour dire que tu n’es plus.

Et dire que t’as jamais pu bouffer une moule de peur d’en mourir.

Le père fouettard est mort – peu importe je n’ai plus l’âge de bouffer des bonbons.
Et si les absents ont toujours tort, désormais il se fout bien d’avoir raison.

Dans 3 jours on t’enterre.
Je rentre pour l’occasion.

En arrivant à la gare, un coup de klaxon me rappelle que je n’ai pas le permis. Dans la voiture, on parle de banalités – je vais bien.

Je trouve la porte d’entrée de la maison ouverte. Et avant de monter, je décide de faire une halte à la cave. La porte aussitôt fermée, j’inspire profondément : aucune odeur n’est plus apaisante à mes yeux que celle de cette cave – si je pouvais, j’en ferais un parfum. La lumière qui filtre par la petite fenêtre donnant sur la cours, me rassure. Seule, assise entre ces murs de bétons, témoins de toutes mes bavures, je détaille tes dessins une dernière fois. Rien n’a bougé depuis des années et devant moi s’étend une étendue délavée recouverte de tes personnages préférés. J’ai jamais compris pourquoi même sur les murs, tu dessinais au crayon de papier.

Je ne mentirai pas pour les apparences en disant que tu vas me manquer, même si là j’ai les yeux qui piquent un peu, le coeur serré et qu’à mon grand dam, j’ai découvert à la deuxième note de ton Ave Maria que ma dignité n’avait pas la tenue de mon mascara.

Ce que je garde de toi tient dans une boîte de cigares de marque obscure : j’ai pris ton vieux jeu de poker illustré porno de 1970 – tes deux vierges bleues de baptême et la chaîne qui va avec – ton zippo pour ne pas oublier que tu niais fumer en bloc, même une cigarette à la main – une photo de toi bouffée par le temps et deux billes que t’avais dû me voler.

J’ai refermé la boîte.
J’ai refermé la porte.

Je rentre à Paris, bizarrement chargée.

“ "There is something i want to say to him… I am like you. The silence in you has entered into my own body. Perhaps you will tell me something” ". (Gérard Malanga)



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