Aujourd’hui je suis heureuse de transformer mon blog en QG de la Mère joie, son utérus, son Légio et ses deux enfants et demi!
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Il était une fois une maman qui en était à huit mois et demi de sa seconde grossesse. Ce jour-là, elle avait un drôle de pressentiment…
Ca fait une heure que nous sommes revenus du cinéma. Je sens que ça coule dans mon Sloggi taille 48. Mon Légionnaire dort à poing fermé.
J’attends.
Une contraction puis deux.
J’attends. Je suis pas une Bleue, je vais pas m’affoler pour deux gouttes dans le slibard et quelques contractions. Des contractions, j’en avais déjà plus de vingt par jour dès le quatrième mois.
J’attends donc.
Aïe, les voilà les salopes, celles qui ne me laissent pas de doute sur le fait que le travail a commencé. Je fais une petite toilette, tordue en deux, je m’habille (j’ai le sentiment d’être une sainte, seule dans le noir pour laisser à l’homme le plus longtemps possible son sommeil) toujours pliée sous le poids de la douleur et j’embrasse tendrement mon Légionnaire pour le réveiller en douceur.
« Légio, je crois que je suis en train de perdre les eaux et que je vais accoucher.
Hein ?! Quoi ??? Comment ça on est au zoo et l’éléphante va accoucher ???!!! »
Une fois que mon Légionnaire a repris ses esprits, il va jusqu’à la chambre de Mademoiselle Commandante et lui annonce la nouvelle. Mademoiselle Commandante est émue et pleure. Pis il l’amène chez nos voisins et nous partons tous deux jusqu’à l’hôpital soit une heure de route. J’ai l’impression de faire un safari tellement la moindre secousse sur la route rejaillit sur mes reins en compote.
« Moins vite, Légio. Plus calmement. Nan plus vite, j’ai maaaaaaaaaaaaaaaaaaaal ! Oh ce que j’ai mal. Conduis-moins sec, bon sang !!! »
Enfin la voiture se gare. Je fonce sur la porte en marchant comme un pingouin qui vient de se faire casser le cul (mon Légionnaire me suit d’un pas digne, lui) et je sonne à l’interphone.
« Bonjour, je crois que je vais accoucher. »
On sait jamais, le Grognard veut peut-être finalement rester dedans, je m’emballe pas et j’émets une hypothèse…
On m’ouvre avant que je n’hurle « Oh, les lopettes, vous me laisser entrer ou j’appelle mon papa qu’est policier ?! »
Après les formalités-à-la-con-que-t’as-qu’une-envie-c’est-signer-des-papiers-et-tout-et-tout une sage-femme vient à ma rencontre et me place sur un lit provisoire pour contrôler la régularité et l’intensité de mes contractions. Je crois comprendre qu’il est deux heures du mat’, un dimanche et qu’ils sont débordés avec un taux de césariennes depuis hier soir qui frise l’apocalypse. Franchement, c’est pas trop le moment que je ponde ; je tombe mal. D’ailleurs elle trouve que c’est pas un vrai travail, ça. Bon comme j’habite loin et que j’approche du terme et qu’accessoirement j’ai aussi la poche des eaux fissurée, elle me garde et m’installe dans une chambre. Je crois tout de même que ou la sage-femme n’a pas été sage et s’est bourré la gueule avec l’interne ou l’appareil de monitoring déconne. Parce que là, j’ai plus de doute : va falloir que ça sorte d’une manière ou d’une autre. J’essaie de me mettre dans la caboche que non, le Grognard ne pourra pas passer par les fesses, même si j’ai l’impression que sa tête se trompe présentement de passage tant ça me résonne dans l’anus.
Je suis donc dans une grande chambre avec mon Légionnaire. Je souffre beaucoup. Il me dit de souffler. Il me lève du lit, me recouche, tentant l’impossible pour me soulager. J’arrive parfois à me plaindre en dehors des larmes et des petits gémissements que j’essaie de contrôler (j’ai promis à Mademoiselle Commandante d’être forte et m’accroche à son regard embué de larmes avant de tracer).
« Légio, je veux pas morfler pour que dalle pendant seize heures comme la dernière fois. On m’a dit qu’à cause de la césa précédente, on pouvait pas me laisser travailler trop longtemps. ALORS POURQUOI CES ENCULES ILS M’ONT PLANTE LA ???!!! »
La sage-femme qui semble de plus en plus fatiguée par sa biture avec l’interne passe de temps en temps voir si tout va bien.
« Ca va ?
NON, CA VA PAS, GROGNASSEU !!! »
Elle contrôle l’état du col. Ah, il a bougé de trois millimètres. Je sens que je ne vais pas encore dilater. Je le sens… Je sais que là, je suis en train de douiller uniquement pour que le col soit suffisamment ouvert pour me poser la péridurale.
Il est onze heures et ça fait précisément onze heures que je me tords dans tous les sens quand le médecin de garde arrive.
« Bon, la petite dame elle souffre, l’anesthésiste va s’occuper d’elle et la soulager. »
A 11h40, je suis en salle de travail. Un déluge s’abat le long de mes cuisses dodues. Je m’attends à ce que mes grandes lèvres s’ouvrent pour laisser passer le morpion comme dans la prophétie mais rien ne vient.
A 12h10, l’anesthésiste, ce héros à la gueule vérolée me pique. J’ai envie là, tout de suite, de faire l’amour charnel avec lui.
Mon Dieu, je revis !
J’ai un timing à respecter. Je dois dilater de tant par heure. Si à 16h00, je n’ai pas un grand trou béant dans la zézette, je passerai sur le billard. Le contrat est clair. Je demande où je dois signer.
Les heures passent et c’est étrange. Je regarde la pendule et sait que vers 17h00 au plus tard, je rencontrerai le Grognard. Je suis détendue et je raconte des bêtises à la sage-femme qui a pris le relai de la pochtronne et à mon Légionnaire. L’atmosphère est calme et sereine. Je suis crevée mais apaisée.
A l’heure H, j’ai atteint péniblement les 2,5 centimètres. J’ai déjà battu mon record, je suis contente.
Je vois une lame de rasoir s’avancer vers mon pubis.
« Bon, va falloir bientôt y aller, hein. Je vais vous raser. »
Comme je suis jamais allée chez l’esthéticienne pour ça, je suis vachement heureuse d’avoir une coupe au poil gratos.
« Vas-y, rase ! Et que ce soit bien net ! »
Tous les préparatifs effectués (badigeonnage de Bétadine, perf’ supplémentaire etc.), je dis Adieu à mon Légionnaire qui va prévenir les voisins de venir avec Mademoiselle Commandante et je descends au bloc, vidée par une nuit blanche et excitée par la future rencontre avec mon fils. Mon fils, il va venir mon messie fils !
[…]
On me tend la bête hurlante, on la colle à moi.
« Reculez-le, je ne peux pas le voir, il est trop près ! »
Quelle connerie d’être aussi devenue hypermétrope avec l’âge…
« Lui, il a surtout besoin de vous sentir. »
On le recule rapidement pour lui donner les premiers soins. J’aperçois qu’Il a le visage bleu et tuméfié comme un boxeur. En réalité, il était très mal positionné avec le cordon ombilical entouré autour du pied ; il n’aurait jamais pu sortir par les voies naturelles, m’apprendra mon Légionnaire quand je le retrouverai trois quarts d’heure plus tard, Mademoiselle Commandante à ses côtés, heureuse comme je ne l’ai jamais vue.
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