Magazine Journal intime

Automne, poésie et oeil du tigre.

Publié le 11 novembre 2010 par Kevinades

   Z’avez vu, c’est l’automne ! C’est dur à l’école avec ces pluies à répétition, les récrés sont humides… Mais moi, cette saison m’inspire, ça me donne envie de versifier… Allez, j’ose.

L’automne.

En cette saison, rien ne m’étonne,

Les feuilles tombent, les Kevin bourgeonnent.

Oh ! cruel mois de novembre,

Tu fais trembler tous mes membres !

Le froid…

   Mouais, bon. On va peut-être en revenir à ce qui nous intéresse véritablement, à savoir les kevinades. Remarquez, en parlant de novembre, une délicieuse anecdote me revient à l’esprit. Vous allez voir, c’est très frais même si ça a quelques années.

   Dans l’école où j’exerce à cette époque, le soir, c’est aide aux devoirs. Le principe est assez simple : une poignée d’élèves triée sur le volet reste une heure supplémentaire après la classe pour faire ses leçons. Croyez-moi sur parole, ça rigole pas : on sélectionne la crème de la crème. Rien que du Kevin de compète. Pour être clair, l’élite de la France de demain, ben ce n’est pas eux.

homework by monokin

   On a tous les âges, toutes les classes, tous les profils. Parmi tous ces gamins, j’en prends cinq sous mon aile. Soyons honnêtes, il n’est pas ici question d’en faire les têtes de classe, mais si déjà ils font leurs leçons, on aura réussi quelque chose.

   Nous sommes donc fin novembre (quelle cohérence !), il fait évidemment un temps pourri, sinon c’est moins drôle et l’histoire perd un peu de son intérêt.

   L’heure d’aide aux devoirs vient de s’achever, tout s’est très bien passé : les élèves ont appris un tas de trucs formidables grâce à des méthodes pédagogiques ancestrales et révolutionnaires connues seulement d’une poignée d’initiés. Je n’ai plus, théoriquement, qu’à ranger mes petites affaires et à rentrer dans mon humble demeure. Merveilleux.

   Le problème avec la théorie c’est que c’est un peu foireux quand on passe à l’application concrète. Du coup, j’ai du mal à rentrer chez moi, vu que sur mes cinq ouailles il m’en reste un sur les bras. Au hasard, appelons-le Kevin.

   Il faut savoir qu'en plus Kevin est un dangereux multirécidiviste de six ans, une ou deux fois par semaine, sa charmante mère n’est pas présente à l’heure pour venir le chercher. Aucune logique dans son manque de ponctualité, elle a un retard qui varie entre le « c’est chiant mais je survivrai » et le plus dramatique « bordel mais je vais encore rater la roue de la fortune avec Dechavanne ! »

   Ce soir là, on est plutôt dans le second registre. Je le rappelle quand même, on est en novembre. Autrement dit on a tous les ingrédients pour vivre un moment charmant : pluie, froid, Kevin, nuit qui tombe, Kevin qui s’impatiente… La totale je vous dis ! Cinq minutes, dix minutes, quinze minutes… Bon, là, c’est vraiment la loose. Quand sa mère va arriver, je vais te la pourrir !

   Quand soudain, oh joie, une silhouette se détache au bout de la rue. Elle arrive, d’un pas vif, alerte et néanmoins légèrement titubant, une détermination farouche dans le regard vitreux. Une espèce d'œil du tigre, mais catégorie tigre en fin de carrière.

teh polarliger is sick by polarliger

   Je ne sais pas pourquoi, mais depuis que je bosse, les mères d’élèves plutôt agréables à regarder ben j’en ai pas eu des masses. Bizarre… faut bien qu’elles mettent leurs mômes à l’école pourtant, mais où ? Bref, je ne dois pas avoir de bol. C'est un mystère qu'il me faudra éclaircir à l'occasion.

   Bon, dans le cas présent, c’est du haut niveau : un p’tit bout d’bonne femme dont je suis bien incapable d’évaluer l’âge. Elle a l’air ravagé, mais je ne sais pas par quoi, ou par qui.

Elle (essoufflée) : − Bonjour !

Cette fois, c’est la dernière fois que je supporte un tel retard ! Cette fois, pas d’excuse à la con, je vais te l’engueuler comme jamais, chui un fou moi, elle va voir de quel bois je monte sur mes grands chevaux !

Moi : − Bonjour… Dites-moi…

Mais je rêve! C'est la goutte de cerise qui fait déborder le gâteau! Voilà qu’à la longue liste des infractions perpétrées, elle ajoute « coupage de parole intempestif » ! Elle vient d’étouffer dans l’oeuf un sermon qui allait pourtant rester dans les annales !

Elle (l’air désolé) : − Je m’excuse pour mon retard…

Moi (passablement énervé) : − Oui, ben justement…

Elle (ne m’écoutant pas) : − C’est parce qu’en fait j’étais en train de faire caca !

   Ah… D’accord… Du coup je n’ai pas réussi à l’engueuler, je l’ai laissée partir sans rien dire. Ça arrive des fois de perdre un peu ses moyens quand on rencontre un membre de la famille de Kevin. Ils sont vachement balaizes pour désarçonner un enseignant, même parmi les plus endurcis.  

   En tout cas, à partir de désormais, vous aussi vous connaissez The Ultimate excuse à sortir quand votre moitié vous fait une scène pour un retard abusif ! Merci qui ?


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