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Suis-je normale?

Publié le 23 novembre 2010 par Bizz
À prime abord, comme ça, vous avez sans doute envie de répondre non. Surtout si vous suivez mes histoires depuis un bon moment. Remarquez, je ne vous en tiens pas rancune, je me considère moi-même assez loin de la normalité, plutôt excessive, avec un certain penchant pour l'exagération, l'autodérision est mon école de pensée et j'ai une imagination un peu trop débordante. Bref, je considère que je suis une personne très originale (façon politically correct de ne pas dire étrange, je suis polie avec moi-même). Avec le temps, je me suis habituée à entendre des "Ok?" interrogateurs et sceptiques concernant ma santé mentale après que j'aie dit ou fait quelque chose "d'original". Donc, vous pouvez affirmer que je ne suis pas normale, ça me va.
En fait, je pose la question parce que tout récemment, j'ai eu droit à deux épisodes de regards pas trop sûrs de mon équilibre mental. Habituellement, ce genre de regards ne m'interpellent pas vraiment, je réussis même plutôt bien à les ignorer la plupart du temps. Sauf quand ils me sont lancés à quelques heures d'intervalle, par deux personnes qui sont sensées m'accepter dans toute mon étrangeté.
Épisode 1: Quand l'amoureux se questionne sur l'achat ou non d'une camisole de force pour Bizz.
Nous sommes en voiture (la mienne, pour préciser), en route chez ma mère revenue de son roadtrip en Ontario pour regarder des belles photos et manger comme des porcs. Comme d'habitude, un morceau de ma voiture demande avidement à être remplacé et/ou réparé. Cette fois-là, c'est la suspension arrière du côté gauche, ce qui a pour résultat un claquement loin d'être subtil chaque fois qu'on roule sur une imperfection. Imperfections qui sont nombreuses puisque nous sommes sur un chemin de terre (oui, au Bas-St-Laurent, il existe encore des chemins de terre qui servent de rangs habités). Bébé fille est donc à l'arrière, tentant de faire une sieste forcément interrompue par les bruits sourds de la vilaine suspension. L'amoureux, en digne amoureux qui s'inquiète de la survie de sa femme et de sa fille, me questionne:
- L'amoureux: Quand est-ce que tu vas te décider à aller faire réparer ta suspension? C'est dangereux, tu peux perdre ta roue!
- Moi: Arrête de t'en faire, j'irai au garage dès que j'aurai une minute.
- L'amoureux: Aussi bien dire jamais.
- Moi: T'es de mauvaise foi, je te jure que j'y vais dès que j'ai une minute, promis.
- La voiture: BANG!
- L'amoureux: Essaie au moins d'éviter les trous, franchement.
- Moi: Y'a que ça, des trous sur cette route-là!
- L'amoureux: Bébé fille ne peux même pas dormir avec tout ce vacarme, pauvre puce.
- Moi (sarcastique): C'est vrai que cette enfant-là a tellement l'habitude de dormir de toute façon! Et puis, ça met du challenge dans nos promenades en voiture.
- L'amoureux: Ah oui? Je vois vraiment pas comment.
- Moi (enlignant la voiture sur une série de trous assez profonds): Regarde bien!
- La voiture: BANG! BANG! BANG! BOUM! KABOUM! BANG!
- Moi (hurlant pour couvrir les bruits de suspension qui cogne): Cache-toi Bébé fille, les mitraillettes nous ont trouvés! Tous aux abris!
- L'amoureux:........................ (avec un regard du genre ça-y-est-la-maternité-l'a-rendue-folle).
Épisode 2: Quand ma meilleure amie se demande si le meilleur cadeau de Noël à m'offrir ne serait pas de m'interner dans un hôpital psychatrique.
À l'heure du souper. À la table, Bébé fille, ma meilleure amie et moi. Comme toujours, nous discutons de bébés et projets de bébés (ma meilleure amie pense sérieusement à se lancer dans l'aventure des couches, c'est donc notre sujet de conversation préféré). Elle qui hésite, moi qui tente de la convaincre, Bébé fille qui lui lance un peu de pâté au poulet sur le chandail, détruisant d'un coup les solides arguments que je viens d'énoncer. Le classique de la conversation entre mère et pas-encore-future-mère-mais-bientôt-peut-être. Puis, nous arrivons au sujet chaud: l'amour inconditionnel. Moi qui fais des éloges de ma fille et du lien qui nous unit, ma meilleure amie dont les yeux brillent à la pensée d'un tel amour à partager avec sa progéniture, Bébé fille qui lance sa nourriture par terre, moi qui la gronde, Bébé fille qui réplique avec un cri perçant de bébé fâché, la tension qui monte entre nous deux, ma meilleure amie qui n'est plus trop sûre. Vite, je dois rattraper la situation. J'y vais donc d'une confession.
- Moi: Des fois, je pense que j'aime trop Bébé fille. Je ne me lasse jamais de sa présence.
- Meilleure amie: C'est normal, je suppose, c'est ta fille.
- Moi: Oui, mais je me demande si ce n'est pas trop d'amour pour elle, je ne voudrais pas l'étouffer non plus.
- M.A.: Tu es tout à fait normale, je suis sûre.
- Moi: Par exemple, si l'amoureux m'annonce samedi matin qu'il souhaite qu'on fasse garder Bébé fille l'après-midi même pour une sortie en amoureux, je refuse catégoriquement.
- M.A.: Pourquoi?
- Moi: Parce que ça ne m'a pas laissé assez de temps pour me faire à l'idée que je serais séparée d'elle.
- M.A.: T'es sérieuse là?
- Moi: Tout à fait. Ça me prend un minimum d'une semaine d'avis pour que la pilule passe.
- M.A.: Peut-être que je serai pareille moi aussi, je peux pas vraiment juger si tu es normale ou pas, je ne suis pas une maman.
- Moi: Le pire...
- M.A.: Parce qu'il y a pire?
- Moi: Oui. Des fois, je me couche le soir et je m'ennuie.
- M.A.: Ça arrive à tout le monde, moi aussi je m'ennuie des gens que j'aime et que je ne vois pas souvent quand je me couche le soir. Je pense souvent à ma mère et...
- Moi: Non, je m'ennuie de Bébé fille.
- M.A.: Ça se peut, après une journée séparées, toi au travail, elle à la garderie et la course du soir, t'as l'impression de ne pas l'avoir assez vu.
- Moi: Non. Même après une journée passée avec elle à la maison. Je me couche et je me dis que le matin est si loin, je m'ennuie d'elle et j'ai juste envie de l'avoir à côté de moi. Tu penses que c'est normal?
- M.A.: Euh....ça t'arrive souvent?
- Moi: À tous les soirs, presque.
- M.A.:...........................
Et je me suis mise à débarrasser la table pour éviter son regard.
Alors, je suis normale ou pas?

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