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Coup de coeur à l’odeur de mimosas

Publié le 23 décembre 2010 par Docteurho

Coup de coeur à l’odeur de mimosas

Elle était étendue, devant moi, devant ce regard qui s’est ouvert sur sa véhémence, mais sans l’avoir jamais, réellement contemplée, s’il l’apercevait depuis toujours. Elle était hautaine dans sa posture de Jules César, offrant toute la générosité de son corps à la caresse langoureuse de tous les éléments de cette nature qui la berce et dont, elle, est la signature de la beauté.   Elle était belle, et elle n’avait pas d’âge. Quand je la regardais, je peinais à définir mes sentiments pour elle, car si des fois je me sentais lié à elle, par quelque passion, d’autres c’est une aversion à peine murmurée, qu’elle me suggérait, par sa cruauté qui se mêlait à sa tendresse débonnaire, en un mélange fallacieux qui me rappelait, toujours, toute la subjectivité de l’Homme, même vis-à-vis de son propre ressenti.   Elle sentait l’odeur des mimosas, et c’était là, un parfum que je lui ai toujours reconnu. Elle en changeait, de temps à autre, au fil des saisons comme par un effet de mode ou par la force de sa sensualité trop affirmée, voire outrageante, mais quand je la humais, quand je la prenais dans mes bras ou que ce fut elle qui m’enlaçait, c’est l’éternelle et la même senteur qui me taraudait l’olfaction. Elle sentait le mimosa à planer!   De jour comme de nuit, quand je la touchais, ou quand elle me berçait en effleurant mes sens et mon corps par sa chair abondante, j’avais envie d’elle. Je passais des heures à errer dans ses méandres, à courtiser ses faveurs, mais je n’osai jamais un pas de plus, sans doutes parce que je mesurais le poids de nos différences, et de tout le silence qui se tenait en faction, sur le chemin de nos amours. Et quand, des fois, je pensais à la quitter, parce que son amour me devenait fatal, parce qu’elle me castrait et parce que je voulais devenir un homme, je partais, le cœur serré, dans un songe qui m’emmenait loin d’elle. Une douleur fictive qui m’était un garde fou, tant elle me rappelait à cet ordre établi, à l’évidence.   Elle, c’est mon amour d’enfance, celui de l’innocence. L’amour puéril qui grandit avec le cœur. Or le cœur tend à la jeunesse en vieillissant, en mûrissant…car l’Homme redevient enfant, quand il mûrit, ou cherche à le devenir s’il ne l’a jamais été. La vraie sagesse, c’est de retrouver l’enfant en soi, quand on a grandit, et de faire la part des choses entre l’amour et le désir. L’enfant aime. L’adulte désire. L’enfant apprend. L’adulte prétend savoir. L’enfant dit la vérité, toujours. L’adulte, la nie ou la masque par vanité. L’enfant est l’origine, et on finit toujours par revenir à ses sources, sinon on se perd. Et cette perte est irréversible!   Elle, donc, je l’ai aimée avec mon cœur d’enfant, avec tous mes sens d’enfant, et ainsi grandit mon amour, au fil des jours, tous les jours, toujours. Un amour innocent, comme celui qu’on porte à son insu, et qui devient une coutume, un réflexe plus qu’autre chose. Il se sanctifie, comme un monument qui marque une place. Au départ on s’en émerveille, mais on finit par s’en accoutumer. On se dit qu’il est là, et puis…bref !   Elle, de toute sa patience, ne m’a jamais réclamé une preuve de cette passion, bien qu’il était évidente quoique tue, atténuée par l’accoutumance. Elle me berçait toutes les nuits, irradiait mon visage de l’éclat du sien chaque matin où je me réveillais en son sein, et cela faisait qu’elle connaisse tout le contenu de mon cœur, mais ne voulait pas me brusquer à le lui déclarer. Elle m’était plus douce qu’une mère, plus passionnée qu’une amante, plus tendre qu’une amie, plus dévouée qu’une simple confidente. Elle était le secret que tout le monde me connaissait. Quand j’ai grandi, et par la force des choses, j’ai oublié de rester l’enfant que j’ai été avec elle, pour elle et grâce à elle. Je l’ai quittée. J’avais soif d’aventure, une soif que seule la transhumance pouvait étancher. J’ai, donc, voyagé. Je suis parti loin d’elle, j’ai connu l’amour, ou ce que je pensais être un autre amour que celui que je lui portais. C’était un choix, c’était mon avenir. J’ai troqué toutes les belles promesses que je lui faisais, contre l’appel de mon amour propre, ma vanité. J’étais content d’avoir une nouvelle vie, du moins, j’étais excité, et cela me permit de passer outre les barrières de ma passion pour elle. J’ai même été dur ! Je ne lui ai même pas dit au revoir, ou Adieu. J’ai juste fait mes valises, et je l’ai quittée, dans le creux d’un soir, vulgairement, comme l’on quitte une prostituée à qui on ne doit rien, sans regrets. Sauf, qu’à elle, je devais tout, moi. Presque tout. Je l’ai ignorée, par je ne sais quel élan d’ingratitude qui m’a fait oublier qui elle était pour moi, et ce que j’étais pour elle. Je l’ai quittée.   Et sur le chemin, sur le bord de la dernière parcelle de cette terre qui nous réunissait, elle et moi, la terre qui la faisait ce qu’elle était, et qui a enfanté l’homme que je suis devenu, elle m’attendit. Elle était là, pendant que le train qui m’emmenait loin d’elle, roulait dans l’indifférence de l’accomplissement du destin, elle était belle, dans sa robe noire qui scintillait sous les leurs d’or de l’aube, elle sentait certainement l’odeur des mimosas…   Je suis parti, et j’ai vécu un bonheur suave, inouï, celui du voyageur, celui du conquérant, mais aussi des malheurs, ceux de l’étranger, ceux du nostalgique. Il y a dans le jeu de la vie, une marrée qui fait tanguer l’esprit de l’être humain, de telle façon à ce qu’il apprenne à apprécier autant son bonheur et sa douleur, dans la perception évidente qui fait que sans l’un, l’autre est forcément insensé.   Je me suis souvenu de mon bonheur, celui que je vivais avec et à travers elle, quand ma nouvelle vie, matérialisée par ma nouvelle amante, s’est refusée à moi en ne daignant me donner son sein. Cela m’a choqué, car, elle, mon amour d’avant, bien si des fois,

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