En partant voir "Ariane à Naxos", avant-hier soir, dans le tram, je lisais la fin de ma biographie sur Churchill (le lion commence à se faire vieux...), quand une conversation m'a attiré l'oreille.
Trois étudiants ivoiriens à sciences-po discutaient de la situation en Côte d'ivoire et chacun prônait ses solutions pour redresser le pays.
J'ai fermé mon livre et me suis mise à les écouter.
Un moment après, l'un des trois m'a demandé si je trouvais leur conversation intéressante et, comme je répondais par l'affirmative, j'ai été incluse dans le "club".
Et, là, franchement, je serais bien allée jusqu'à "Claveaux" (terminus du tram) pour continuer avec eux.
Le débat s'est élargi à la crise que subissent les pays d'Afrique du Nord et du Moyen Orient depuis le début de l'année. Les révoltes égyptienne et tunisienne, l'élan qu'elles pouvaient produire et le coup de frein donné par les exactions libyennes et la fin de la grève général au Bahreïn. L'attitude de la France qui montre encore des réminiscences d'interventionnisme colonialiste et Nabot 1er qui cherche à entraîner l'Europe avec lui pour dissimuler ses erreurs diplomatiques.
Nous avons fait un peu d'histoire contemporaine et d'histoire des religions avec la fin des colonies, des parallèles avec les révolutions plus anciennes dans d'autres pays, en parlant des évolutions religieuses.
Nous avons joué aux apprentis sorciers en imaginant ce que pourraient être les "après-crise". La démocratie aurait-elle une chance ? Les gouvernements religieux sont-ils si nocifs que cela ?
Bref, vraiment, c'était passionnant et je crois que je me suis surprise à refaire un peu le monde...
C'est marrant, à écrire tout ça, je me dis que ce n'est pas possible que cela ait juste duré le temps du trajet en tram et pourtant, si.
A la fin, en voyant mon bouquin sur Churchill, ils m'ont demandé si je faisais une thèse sur lui... Les pauvres !
Et puis, ils m'ont demandé pourquoi ou comment nous, Français, pouvions râler autant, faire autant grève sur tout et ne pas réagir à tout ce qui se passe juridiquement et politiquement dans notre pays. Comment un pays qui avait fait la révolution française pouvait à ce point laisser bafouer les principes démocratiques sans réagir.
Je n'ai rien répondu mais j'ai eu honte...
Oui, je râle, je gesticule et tempête contre ce qui se passe. Parfois (rarement parce que je ne veux pas que le blog devienne une tribune politique et d'actualité), je fais un billet ici ou là mais, finalement, à ne pas faire plus, je cautionne le président qui reçoit les présidents chinois ou libyen, je cautionne les malversations ministérielles, je cautionne les dérapages verbaux de tous nos gouvernants, je cautionne la politique des gros sous, je cautionne les ventes d'armes dans le dos quand, de face, on tente de montrer patte blanche, je cautionne la poursuite des profits personnels, je cautionne la mise à sac de la séparation des pouvoirs.
A quel moment aurai-je le courage de vraiment me révolter, de demander des comptes à ces gens qui me représentent mais dans lesquels je refuse de me reconnaître ?
Est-ce qu'avant de refaire le monde extérieur auquel je ne connais pas grand chose, je ne devrais pas commencer par refaire mon monde intérieur qui n'est pas si parfait que ça ?
Avant-hier soir, nous avons refait le monde dans un tram et, depuis, j'ai pris mon courage à deux mains pour essayer de regarder mon petit monde à moi en face, bien droit dans les yeux !
A bientôt !
La Papote