Jeudi le 4 août 2011. 23h16. Les nouvelles, le journal ou le blogue? Je me suis laissée allée. Pas une ligne dans mon journal depuis le 21 juillet. Pas une ligne dans ce blogue depuis plus longtemps encore. Les nouvelles, je n’ose même pas en parler, j’en frissonne d’angoisse et de honte. J’ai écrit un peu de théâtre par contre. Je sais, c’est bizarre ce changement de cap soudain, alors que je m’acharne depuis des mois sur un recueil de nouvelles, mais je dois avoir mes raisons faut croire.
Au début de l’été, je faisais des bonnes blagues. Lors d’une journée de jardinage où j’avais mal étendu ma crème solaire, j’avais inventée une nouvelle expression : «La marque du célibataire». Ça désignait cet endroit inatteignable au milieu du dos qui a douloureusement rougi et perdu une couche de peau. Parce que j’étais seule, sans personne pour l’atteindre à ma place. Puis, une amie me refile ce tuyau lumineux : «Prends une spatule à gâteau, ça fait ben la job!» Je rigole, mais j’essaie. Euréka ça marche! Je clame mon indépendance totale sur tous les réseaux sociaux. Pas besoin d’homme j’ai ma spatule! Je suis morte de rire, l’autodérision vient encore de gagner la partie. Je suis libre, je suis heureuse. Pas besoin d’homme; j’ai mon jardin qui me murmure à l’oreille des mots de délices, d’espoir et de plénitude. Pas besoin d’homme, j’ai mes amis et ma famille qui me tiennent compagnie, me font rire, partagent certains de mes repas et me comblent. Pas besoin d’homme, j’ai mon travail qui me passionne m’enthousiasme et me stimule. Pas besoin d’homme, j’ai mon chien et mon chat qui assurent une présence dans la maison. Pas besoin d’homme, j’ai mes loisirs qui me poussent à dépasser mes limites. Et surtout, pas besoin d’homme, j’ai l’écriture, toujours qui emplie chaque recoin de vide et fait de ma tête et mon cœur des endroits luxuriants et fertiles. Une seule raison pour laquelle j’ai besoin d’un homme et les «temps en temps» comme ma mère les appelle, me conviennent parfaitement pour ça.
Je déteste les conventions. Surtout en ce qui concerne l’amour et le couple. «Quand on s’aime on est fidèles». Barfpfffffftssss! Ça c’est la première convention que me tue! Et tout le monde me comprend de travers lorsque je dis ça. Les hommes me voient comme une maîtresse potentielle aux mœurs frivoles et les femmes me craignent comme une croqueuse d’homme sans morale. Je n’ai rien contre l’idée de faire l’amour toute ma vie avec la même personne. Si c’est agréable, beau et transcendant, où est le problème? Non, l’idée qui me rend dingue derrière cette sacrosainte norme rigide, c’est la possession et le contrôle du corps de l’autre. C’est la peur. Le manque de confiance en soi qu’elle dissimule. Et je connais trop de gens qui exigent de leur partenaire une fidélité sans faille alors qu’eux courent la blonde et la brune (ou le blond et le brun, je ne voudrais pas faire de distinction de sexe ici) sans se gêner. Contrôle. Possession. Peur du chaos. Je n’ai rien contre le fait de faire l’amour toute ma vie avec la même personne… Si c’est moi qui décide, pas lui qui l’exige. La ligne est mince. Invisible. Inexistante parfois. Souvent trompeuse.
Pour faire une histoire courte. J’avais peur. J’avais enfin de l’air. Je découvrais à peine qui j’étais, seule et indépendante. Je me voyais éclore, je trouvais ça beau, je ne voulais pas me retrouver taquée dans une armoire à papillon.
Mais là. Ben c’est ça. Saint ciel! J’ai rencontré quelqu’un. Par ma faute en plus. Par ma très grande faute. Mea culpa. Mea maxima culpa. J’ai fait les premiers pas. Je les ai fait en me disant que je n’aurais qu’à dresser un mur de barbelés, quelques barrières et un champ de mines pour éloigner toute possibilité d’amour et d’engagements. Alors j’ai déblatérés les traditionnels «Je ne suis pas prête à m’engager», suivi du ridiculement cliché «j’aime qu’on passe du bon temps ensemble sans se demander plus». Bref, je lui ai servi les canons des célibataires endurcis. Mais voilà, j’avais trouvé chaussure à mon pied et il m’a kické le cul en beauté si vous me permettez l’expression. Sans violence, aucune, il a délicatement démonté barrières et barbelés et franchi le champ de mine sans que j’ai eu le temps de déployer l’armée de terre et il a envahi la tranchée pour y agiter des milliers de drapeaux blancs. «Je t’aime grande fille!» Mardeshitabarnacriss! Et moi je n’ai rien trouvé de mieux à faire que d’embrasser l’ennemi et de lui dire «je t’aime» en retour.
La semaine passée, il m’a crémé le dos. La spatule a pris le bord. Je ne suis plus célibataire. Ça n’était pas dans mes plans.
«S’abandonner au chaos ma noire, c’était pas ta devise?» Ben oui! Et là le chaos il t’envoie l’amour pas prévu, pas planifié, pas entrevu. Et tu le prends, et du l’enlaces et tu dis oui, parce qu’on dit pas non à ça. T’as pas besoin d’homme? Tant mieux! N’est-ce pas ça le vrai amour? Celui qui n’est pas basé sur un besoin, mais simplement sur un doux et sincère élan du cœur. N’est-ce pas ce genre d’amour qui justement peut rendre libre? Mais t’as peur quand même et t’as raison. Faut surtout pas perdre de vue ce que tu es. Ne pas commettre à nouveau les mêmes erreurs.
Alors tu vas continuer à désherber ton jardin. Tu vas voir tes amis. Tu vas écrire! Bon Dieu oui, tu vas recommencer à écrire! Tu sacrifieras des heures de sommeil s’il le faut! Mais un peu de constance Miss Sexinthecountry! Un peu de rigueur!
Je réalise un truc. Pour aimer sainement, il faut avoir une sacré discipline!