Et pendant que ça cuit, j’écris!
Ce matin alors que je prenais un taxi pour me rendre au boulot parce que bientôt RIP Margot, mon vaisseau d’or, a décidé pour une énième fois de faire un tour de remorqueuse, j’ai entendu à la radio que Jack Layton était RIP trop tôt. Je ne suis certainement pas la seule à avoir reçu un sale choc. Je vous parlerais bien d’un des rares hommes politiques qui n’a pas éveillé un seul soupçon de cynisme en moi, mais je ne suis pas politicologue. Je suis très peu politisée, je m’en confesse. Je n’ai que mes propres valeurs que je compare à celles des partis ou de leurs représentants pour éclairer mon choix lorsqu’il est temps de cocher. Bref, je vous parlerais bien de Jack, de son parti, des dernières élections, mais ça n’est pas ce qui m’a frappée. Ce que j’ai reçu en plein visage, c’était qu’un être humain était mort. Encore.
Je vous épargne la journée de merde qui a suivi. Quand ça commence avec le remorquage d’une voiture et la mort d’un grand, ça peut difficilement aller en s’améliorant. Toujours est-il qu’en retournant chez moi ce soir (je remercie d’ailleurs ma mère qui m’a offert gracieusement son temps et son essence à hauteur de 66 kilomètres) les dents serrées et l’amertume au cœur, je me suis demandé pourquoi je suis si peu inspirée depuis quelques semaines, pourquoi écrire ne m’arrive que dans de précieux et trop rares moments de grâce que je saisis comme une assoiffée tellement l’été fut aride pour moi. La réponse n’a pas tardé à poindre. Je ne suis pas dans mon assiette. Je suis préoccupée. Bref, je suis tournée vers mon osti de nombril! Je dissèque, j’observe, je juge mon pauvre petit moi et pendant ce temps le monde passe sous mon nez sans que je ne le voie. Ça ne va pas bien, ma tête est comme une vieille laveuse à spin, ça va passer, ça n’est pas si grave, je ne veux pas me faire plaindre, je veux simplement illustrer mon propos. Enfin, tout ça pour dire que j’ai décidé de faire du ketchup pour me changer les idées.
Et ce soir, c’est grâce à Jack et au ketchup vert que j’écris. Jack parce qu’il m’a tournée vers l’extérieur. Le ketchup parce que, je l’ai dit hier, agir sur le monde ça me replace dans le monde. Tout à l’heure, en cuisinant, j’ai vu ma chienne Wendy. Elle était étendue, ses grandes pattes minces allongées devant elle. Celle de gauche est amputée à la hauteur des premières phalanges. Ça m’a rappelé les conditions de son arrivée chez moi (elle avait été prise dans un piège de trappeur, c’est pourquoi il lui manque un petit morceau). Ça m’a aussi remis en mémoire son indécrottable bonne humeur, sa totale confiance et sa patience, alors que, pendant un mois, matin et soir, je devais m’assoir avec elle au coin du feu pour lui enlever son bandage et nettoyer sa plaie. Bref, ce soir, je n’ai pas regardé ma chienne pour éviter de lui marcher dessus, je l’ai vue. Je l’ai aimée. Je crois qu’il s’est passé la même chose avec Jack ce matin. J’ai reçu un choc parce que j’ai vu la mort d’un être humain et pas seulement celle d’un personnage.
Je reviens au ketchup, parce que j’ai envie de donner la suite de la recette d’hier, je crois l’avoir un peu mieux comprise aujourd’hui. Oubliez Le Secret et les bienfaits de la pensée positive, c’est de la foutaise à mon avis. J’ai une nouvelle recette de best seller psycho pop. Non, j’ai un simple petit conseil en fait, tout petit, mais si vrai : il faut poser des actes positifs. Dire «je t’aime» c’est bien beau, mais il n’y a rien comme faire «je t’aime». Ce soir, j’ai fait «je t’aime» à la vie, j’ai enfilé ma veste, je suis sortie avec mon cul de poule sous le bras, j’ai choisi de belles grosses tomates vertes et je les ai cuisinées. Les actes seuls ont le pouvoir de concrétiser la parole et la pensée et ça, je n’ai peut-être pas la fibre politique, mais j’ai l’intuition que Jack l’avait compris.
Je finirai avec ce lègue magnifique d’une parole pleine de sens. Un sens que nous avons le devoir de transposer en actes. Vous l’aurez surement déjà lu aujourd’hui, pardonnez-moi de le répéter encore mais jamais je n’avais vu si beau virus se propager sur internet : »Mes amis, l’amour est cent fois meilleur que la haine. L’espoir est meilleur que la peur. L’optimisme est meilleur que le désespoir. Alors, aimons, gardons espoir et restons optimistes. Et nous changerons le monde. » Jack Layton
P.S. (J’espère n’avoir offusqué personne en associant la mort de Jack au ketchup vert, je voudrais simplement préciser que pour moi les petites choses simples ont autant de noblesse et d’importance que toutes les richesses de la terre réunies)
P.S. 2 (Jamie Oliver à sûrement triché en ajoutant de la teinture sur la photo de ketchup qu’il y a dans son livre de recettes parce que mon ketchup, malgré l’utilisation de tomates vertes, est brun. Délicieux, mais brun. Et ceci n’était pas un play station deux, mais bien un deuxième post scriptum.)