Message 1
Objet: On a besoin d'air!
De: Tes poumons
À: Bizz
Chère Bizz,
Désolés de t'importuner par courriel, mais tu sembles faire la sourde oreille à nos appels à l'aide. Nous imaginons bien que tu as eu le souffle coupé en voyant un message de notre part et nous espérons sincèrement que tu ne te seras pas étouffée avec ta gorgée de café matinal. Nous irons droit au but. Il serait grand temps que tu parles à ton fils et que tu lui demandes de nous laisser respirer un peu. Il se fait vraiment insistant. Au début, ça nous faisait réellement plaisir de l'accueillir chez nous afin de nous assurer qu'il était confortable. Malheureusement, notre petite maison en cage thoracique est devenue trop petite pour nous trois. Nous avons bien tenté de lui faire comprendre qu'il prend maintenant trop de place dans notre intimité, mais il ne veut rien entendre. Nous ne nous sentons plus chez nous.
Nous espérons du plus profond de nos alvéoles que tu pourras nous aider à régler cette fâcheuse situation à l'amiable. Nous ne souhaitons pas en venir aux menaces physiques, mais s'il le faut, nous le ferons. Tu risques de ne pas apprécier la sensation de manque d'oxygène et les étourdissements qui l'accompagnent, sache-le. Puisque tu es sa mère, nous sommes convaincus que tu auras plus de veine (pulmonaire) que nous pour lui faire comprendre le bon sens.
Merci d'avance!Tes poumons
Message 2Objet: Je ne sais plus où donner de la têteDe: Ton cerveauÀ: Bizz
Bon matin Bizz,
Je ne sais pas trop par où commencer. Tu me connais, je saute facilement du coq à l'âne et j'ai toujours un peu de difficulté à rester concentré sur une seule chose à la fois. C'est donc possible que mon courriel ne soit pas des plus compréhensibles. J'ai discuté avec tes poumons cette nuit. Rectification: je les ai largement engueulés pendant ton sommeil. Quels connards! Tout ce qu'ils ont à faire, c'est de me fournir une quantité minimale d'oxygène pour que je puisse faire fonctionner tout le reste et ils ne sont pas foutus de faire leur travail comme il se doit. C'est pas difficile pourtant: gonfle, envoie l'oxygène, dégonfle, gonfle, envoie l'oxygène, dégonfle. Tu sais ce qu'ils m'ont répondu? Que c'est la faute de Bébé fiston! Celui-là même qui occupe mes pensées nuit et jour! Ils m'ont baragouiné que Bébé fiston prend trop de place, qu'ils ne se sentent plus chez eux, qu'ils t'en parleraient pour que tu règles la situation et bla bla bla. Deux flemmards, ces poumons, si tu veux mon avis.
On dirait qu'ils ne se rendent pas compte que TOUT LE MONDE ici doit faire des ajustements pour bien fonctionner tout en s'assurant que toi et le bébé, vous vous portez bien. Prends moi, par exemple. Déjà que tu es le genre de personne qui est extrêmement exigeante avec son cerveau, une fois enceinte, t'es terrifiante. Non seulement tu me demandes de veiller au bon fonctionnement de DEUX corps, mais en plus, je dois jongler avec les deux millions de contradictions, d'angoisses, d'inquiétudes et de questionnements qui t'habitent. C'est pas pour rien que tu fais des rêves aussi étranges ces temps-ci; faut bien que je décompresse un moment donné! En plus, je dois te concocter des projets de décoration pour la chambre de grande fille de Bébé fille ainsi que pour la chambre de bébé de Bébé fiston, tout en restant alerte aux anecdotes de ton quotidien de maman pour alimenter ton foutu blogue (qui me gobe déjà pas mal tout mon temps, en passant), sans oublier l'éducation de Bébé fille à laquelle je dois veiller à tout moment en plus de m'assurer que toutes tes tâches au boulot seront terminées à temps pour ton congé de maternité. J'aime être actif, mais là, t'exagères. Ne me boude pas si je te fais faire de l'insomnie, tu en es l'unique responsable, je tiens à le préciser.
Sans rancune,Ton cerveau
Message 3Objet: J'ai malDe: Votre estomacÀ: Bizz
Bonjour madame Bizz,
Je ne sais pas si j'arriverai à tenir le coup jusqu'à la fin de votre grossesse. Le poids que votre fils m'oblige à porter sur mes épaules est si pénible que j'en souffre physiquement. Mes brûlures ne font qu'empirer, je crois même qu'elles en sont au troisième degré. Mon ami l'oesophage menace de me quitter; je souffre tellement qu'il en a mal lui aussi.
Je me vois dans l'obligation de vous demander de cesser toute consommation de caféine, chocolat, sucre, épices, gras et tout aliment susceptible d'augmenter ma douleur. Je suis très sérieux: je risque la mort si ça continue. Serait-il possible de vous nourrir exclusivement de purée de pomme de terre jusqu'au terme de votre grossesse? Cela pourrait sans doute m'aider.
Bien à vous,Votre estomac
Répondre à tous:Objet: Gang de chialeuxDe: BizzÀ: Mes poumons, mon cerveau et mon estomac
Avez-vous fini de vous plaindre? J'ai sans doute mille fois plus hâte que vous tous réunit que cette grossesse se termine. Non seulement les inconforts physiques m'empêchent de prendre soin de ma fille comme je le voudrais et d'entretenir la flamme de mon couple comme dans mes rêves les plus fous, mais en plus, ils me privent d'un sommeil plus que nécessaire. Et je dois endurer TOUT ce que VOUS endurez.
@Mes poumons: Vos menaces ne me font pas peur. Je manque DÉJÀ d'oxygène et je souffre DÉJÀ d'étourdissements. Si mon fils est bien dans votre cage thoracique, il y restera, point final.@Mon cerveau: Tu te plaignais cet hiver de ton manque d'activité physique. Ben voilà, t'es servi!@Mon estomac: De la purée de pommes de terre? Tu peux toujours rêver. Jamais je ne me séparerai de mon café.
Sachez, chers amis, que malgré vos plaintes qui me bourdonnent dans les oreilles, j'apprécie tout le travail que vous faites pour moi et mon fils. Cependant, j'ai les hormones à fleur de peau, alors c'est vraiment pas le moment de jouer à celui qui fait le plus pitié, compris?
Parce que vous allez perdre de toute façon. C'est moi qui fais le plus pitié.
Votre commandante en chef Bizz