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Sois poli si t’es pas joli
Lundi dernier, en adultes aimants, on a décidé de donner des bonbons aux enfants pour l’Halloween. Comme c’est une activité pour les tout-petits, bien sûr, ça a lieu tôt. Je préparais donc le souper d’une main et donnais des bonbons de l’autre, avec Monsieur Bine à mes côtés, qui avait décidé qu’il allait surgir derrière moi en rugissant pour faire peur aux enfants. J’étais pas super confortable avec son plan, mais je choisis mes batailles et celle-là me paraissait tout compte fait assez futile. Résultat, trois minutes plus tard, Monsieur Bine essayait en vain de consoler une petite princesse vietnamienne de deux ans qui venait d’avoir la peur de sa vie.
Je lui ai donc confié la tâche de juste donner des bonbons gentiment pendant que j’allais finir le souper, en lui demandant de m’avertir quand il y en aurait des cutes. Non mais c’est vrai on va se le dire, il y en a qui valent plus le détour que d’autres. Tout ce qui a cinq ans et moins et qui est déguisé avec un suit en peluche est mille fois plus craquant qu’un grand gars avec un masque de Scream ou qu’une adolescente de 13 ans qui s’est gossé des oreilles de bunny en carton. C’est d’ailleurs là que j’ai compris que Monsieur Bine et moi n’avions pas la même définition du terme cute… Quand j’ai vu les deux grandes filles avec leurs oreilles home-made, traitez-moi de stuck up si vous voulez, mais je me suis retenue pour ne pas leur dire: « Vos mères le savent-tu que vous êtes déguisées de même? » Chacun ses goûts, vous me direz. Personnellement, j’ai un gros faible pour les enfants sages et mignons qui disent « s’il vous plaît » et « merci », pour les fillettes qui se déguisent pareilles et qui te disent que ça sent bon chez vous et pour les petits garçons déguisés en quelque chose d’incompréhensible, mais de clairement pas commercial. Et puis bon, tandis qu’on y est: maudit que les enfants asiatiques sont beaux! Les bébés asiatiques, c’est la chose la plus cute au monde. D’ailleurs, Monsieur Bine et moi avons décidé que quand on allait avoir un enfant, son premier costume en serait un de bébé chinois. Là-dessus, on s’est entendus.
Un peu plus tard, pendant que le souper finissait de cuire, je suis venue rejoindre mon chum au poste de distribution et c’est là que j’ai constaté que la pile de bonbons descendait drôlement lentement. Pourtant je n’en avais pas acheté tant que ça et la sonnette n’avait pas dérougi depuis une grosse demie-heure. Mathématiquement, on aurait dû être sur le bord d’en manquer. « Coudonc, combien de bonbons tu donnes? Donne pas juste un suçon par enfant! C’est plate! Je veux pas qu’on soit la maison cheap de la rue où ça vaut même pas la peine d’aller sonner… » Monsieur Bine m’a fait une face coupable et c’est là que j’ai compris qu’il s’en gardait! Il s’était fait une « petite » réserve sur le divan et écoulait le reste goutte à goutte. Découragée, je lui ai rappelé que dans douze heures, tout ça allait être en super vente à l’épicerie et qu’il pourrait aller s’en chercher des tonnes. J’ai l’air de chiâler, mais c’est comme ça que je l’aime, mon Bine.
Plus l’heure avançait, plus les enfants étaient grands et moins il y avait de parents sur le trottoir pour leur rappeler d’être polis. Résultat: de moins en moins de petites voix excitées qui criaient « Joyeux Halloween! » et de plus en plus de regards mornes qui ne faisaient que fixer la poignée de bonbons qu’on leur tendait. La meilleure façon que j’ai donc trouvée pour exprimer subtilement mon avis sur leur attitude et ainsi satisfaire mon sens de la justice, c’est en donnant plus ou moins de bonbons aux adolescents, selon leur niveau de politesse. C’est fou, mais ça m’a réellement amusée pendant un moment.
Les visites s’espaçaient et nous nous sommes mis à nous remémorer nos meilleurs souvenirs d’Halloween. Monsieur Bine m’a raconté la fois où il s’était déguisé en douche et moi, je me suis souvenue de l’année où ma cousine et moi nous étions habillées en soeurs siamoises, en passant toutes les deux la tête dans le même t-shirt extra-large et en se sortant chacune un bras. On avait toffé ça toute la soirée, à monter et à descendre les marches. Et j’avais au moins une tête de plus qu’elle. C’était la belle époque. Je me suis aussi souvenue de l’année où ma mère m’avait confectionné une belle robe de sorcière à partir d’un patron. Le temps qu’elle avait dû passer là-dessus! Je l’ai encore, elle est dans le garde-robe. On peut pas se défaire de ça.
On a été sortis de nos rêveries par la sonnette. À la porte, deux grandes filles de 14-15 ans sans costume, avec des sacs déjà tendus, prêts à recevoir leur butin. Désabusés et vaincus, on leur a donné 2-3 nananes et on a refermé la porte, blasés. J’ai demandé à Monsieur Bine: « Elles étaient déguisés en quoi? » il m’a répondu: « En connes. » La soirée était terminée.
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