Tout a débuté mercredi passé.
On est à la maison. Je lis un bouquin sur la (courte) vie de Steve « Pre » Prefontaine, le James Dean de la course à pied, tout en gardant un œil sur la marmaille. Mia joue à « going to work » pendant que Sebastian fout le boxon dans la chambre (il lance des jouets contre le mur afin de tester leur point de rupture). Soudain, Sebastian découvre une paire de bottes de pluie appartenant à Mia.
Aussitôt, je m’attend au pire : Mia va se rendre compte que Sebastian joue avec un truc qui lui appartient (elle doit posséder un $&@#! de radar), elle va lui arracher les bottes des mains, Sebastian va lui arracher les cheveux de la tête, les deux vont se mettre à hurler, je vais devoir poser mon livre et hurler encore plus fort…
Mais la réalité est toute autre. Plutôt que réalité, appelons la suite Science Fiction :
Sebastian saisit une des bottes de pluie et se dirige vers Mia.
- Miiiii-yaa ?
Mia lève un œil distrait vers son frangin avant de se replonger dans son aventure. Tenant la botte à bout de (son petit) bras, Sebastian insiste furieusement:
- Mi-ya ? Mi-ya ? Mi-ya ? Mi-ya ! Mi-ya-mi-ya-mi-ya-mi-ya? Mi-ya boots help! Mi-ya boots help! Mi-ya boots help! Mi-ya boots help! Mi-ya boots help! Mi-ya boots help!
(j’observe la suite avec intérêt)
Mia soupire:
- Okay Sebastian. I’m going to help you with the boot. Sit on the floor. Give me the boot (Sebastian lui tend la botte). I’m going to put the boot on your foot, it won’t hurt, don’t worry…
En effet, elle aide Sebastian à enfiler la botte de pluie (à l’envers, pas grave). Elle l’aide même à se relever. Sebastian se lâche complètement et lance un « dak-yu ». Dak-yu veut dire « thank you » en langage Sebastian.
Mia en rajoute : « You’re welcome, Sebastian ».
Je dois me pincer pour y croire. Une interaction positive entre mon fils et ma fille! La première en 18 mois…
Pire encore, cette scène étrange et mystérieuse s’est répétée à plusieurs reprises depuis mercredi.
Vendredi, Mia a déguisé Sebastian en princesse, avec un juste-au-corps violet, un tutu rose et du rouge à lèvre. Sebastian, drag queen devant l’éternel, s’est régalé.
Samedi, ils ont fait de la peinture ensemble.
Juré !
Dimanche, je leur ai foutu la paix. Résultat, ils ont vidé tous les tiroirs de la chambre à coucher par terre pour mieux se rouler dans les habits. Karen a passé 45 minutes à ranger la chambre…
J’adore.
Je crois que j’ai compris. Le dédain de Mia pour son petit frère n’avait rien à voir avec de la jalousie, de la rancœur ou de la compétitivité pour l’attention des parents (comme le prétendent la plupart des experts). Non, la réalité est bien plus simple et logique. L’intérêt de Mia pour son petit frère est simplement lié à la capacité du p’tit à s’exprimer avec des mots. Si nous, les parents, avons l’habitude de déchiffrer les messages tels que les couinements, la gestuelle, ou les (mauvaises) odeurs, pour une gamine de 3 ans, un être qui ne parle pas est un objet. Pendant 18 mois, Mia a simplement considéré Sebastian comme un animal en peluche. Un truc un peu inanimé et pas vraiment vivant.
Puis ce weekend, comme par miracle, Mia a découvert le côté humain de Sebastian. Depuis, ils sont inséparables…
Mi-Ya?
PS: @IbrahamLangevin – Merci pour le soutient!