Magazine Journal intime

Vie de village

Publié le 09 février 2012 par Sophie007

Depuis que vous avez quitté votre vie en appartement en plein coeur de Paris pour une vie dans une maison dans un petit village de Provence, vous le reconnaissez, vous n’êtes plus tout à fait la même. Ni pour les autres, ni pour vous-même. Preuves en treize points :

Preuve n°1 : vous passez subitement pour une inculte car vous ne savez pas comment tailler vos lauriers roses, et encore moins comment cuisiner le sanglier alors que la moitié des femmes de votre village n’a toujours pas apprivoisé la souris de l’ordi et ne connait même pas Haruki Murakami.

Preuve n°2 : Vous passez pour une super intello car vous connaissez Murakami mais que vous ne savez toujours pas comment tailler vos lauriers rose ;

Preuve n°3 : Vous vous demandez sérieusement comment les gens font pour avoir des amants ou des maitresses car vous, le jeudi soir où vous n’avez pas sorti vos poubelles d’emballages comme prévu, vous avez dû expliquer à trois voisins, que non, vous n’étiez pas malade, mais que vous aviez juste oublié.

Preuve n°4 : Vous avez envie d’embrasser le facteur (ou la factrice) à chaque fois qu’il (ou elle) vous dépose discrètement un colis sous votre porche alors que vous n’êtes pas là. Cela vous évite d’aller à la poste du village d’à côté et de vous taper dix bornes aller et dix bornes retour dans un créneau horaire plutôt serré.

Preuve n°5 : Vous trouvez vexant, mais finalement assez amusant, de vous voir inviter à un atelier-cuisine Tupperware. Comme il parait que ce genre de rencontres est devenu tendance, votre image de soi est presque sauve.

Preuve n°6 : Vous avez demandé cinq fois au garde-champêtre s’il ne s’était pas trompé d’adresse en vous apportant un magnifique coffret gourmand à Noël. “C’est sûrement que vous avez fait de bonnes choses pour la mairie” répétait-il à chaque fois. Après enquête (eh oui, les “bonnes choses” n’avaient rien d’évident !), il s’avérait que la mairie envoie ce coffret à tous les bénévoles de la bibliothèque ainsi qu’aux anciens et encore plein de bonnes âmes.

Preuve n°7 : Vous vous organisez pour aller “en ville” le jeudi, jour de la sortie des magazines. Avant c’était en bas de chez vous alors pas question de prendre la voiture juste pour aller au kiosque.

Preuve n°8 : Vous ne dites mot lorsque les gens commencent à parler des Corses, des Juifs ou de la Mafia alors que vous avez des milliers de choses à raconter sur les identités nationales et la politique d’immigration.

Preuve n°9 : Vous riez lorsque vous voyez l’ancienne institutrice de CP de votre fille en porte-jarretelle lors d’une représentation théâtrale. Vous la félicitez autant de sa prestation que de son audace (tout le monde n’aura pas apprécié).

Preuve n°10 : Vous vous surprenez à connaître malgré vous la vie sexuelle des habitants du village. Tromperies, divorces, rabibochages, moeurs spéciales… rien ne vous échappe alors qu’à Paris vous ne saviez même pas que le locataire du quatrième était un transsexuel et que votre gardien en était à sa quatrième ou cinquième épouse.

Preuve n°11 : Vous n’en revenez pas lorsque votre voisin vous prête spontanément tout ce que vous n’avez pas, ou pas encore (genre tondeuse, tronçonneuse ou brouette) et qu’il vous aide à couper les haies. Vous ne lui avez rien demandé mais il a anticipé votre besoin, un mot que vous ne connaissiez pas.

Preuve n°12 : Vous ne savez toujours pas comment vous habiller le matin ni comment -pire- habiller vos enfants en hiver. Comme il gèle souvent la nuit et le matin, la doudoune et le gros pull sont impératifs jusqu’à environ 10H30. Au delà de cette heure, le thermomètre peut grimper au point de vous retrouver en tee-shirt jusqu’à la fin de l’après-midi. Après, il vous faudra tout remettre car la température baisse et il fait à nouveau froid. “En pelure d’oignons” disent les gens . Facile à dire !

Preuve n°13 : Vous vous demandez comment vous avez pu supporter de vous réveiller tous les matins par les camions-poubelle qui passaient dans votre rue de 6H30 à 7H15, entraînant alors une symphonie de klaxons d’automobilistes furieux. Dorénavant, vous êtes réveillés par le chant des oiseaux que vous avez appris à reconnaitre et étrangement, vous êtes de meilleure humeur au petit matin, même avant d’avoir bu votre litre de thé. Oui, vous avez bel et bien changé !


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