Magazine Journal intime

La vie d'une autre

Publié le 09 mars 2012 par Papote

19860830Deux films en une semaine !
Si, si, je vous rassure, je bosse bien mais j'ai optimisé mon dernier week-end sans P'tite Louloute en faisant séance le vendredi soir et le samedi matin à 11h.

Ceci étant, les séances se suivent et ne se ressemblent pas... Mais alors pas du tout, du tout !
Après " La taupe", je suis allée voir "La vie d'une autre".
Après le film d'espionnage bien sombre, la comédie romantique.
Après le film international, la création française.
Après l'excellent, le très très moyen...

Pour faire plaisir à Delphine, voilà un extrait de ce qu'en dit Telerama :
" Leurs titres égrenés donnent ce cinéma français que l'on déplore : sage, mou, pas honteux ni même désagréable, juste calibré. Pas indispensable à nos vies."
Et, là, pour le coup, roulement de tambour, je serais assez d'accord, voire même peut-être un peu plus virulente...
C'est sage, c'est mou, c'est superficiel, pas vraiment désagréable mais quand on ressort de la séance, on a très vite tendance à se demander ce qu'on a fait pendant la dernière heure et demie.
Et je dis que c'est hyper dommage parce que je pense qu'il y avait du potentiel et, plus d'une fois, pendant le film, on aurait envie de prendre Sylvie Testud entre quatre yeux et de lui dire " Vas-y ! Creuse ton sujet... Approfondis ton analyse, ton point de vue !". Sauf qu'on n'est pas en cours de français ou de philo, qu'elle n'a pas 15 ans et qu'on n'est pas prof...
Au final, le bulletin trimestriel pourrait se résumer à
" 10/20 : travail passable. Pas de hors sujet mais beaucoup trop de superficialité dans le traitement. A oublié de choisir un parti-pris et de s'y tenir, les résultats s'en ressentent. Doit pouvoir mieux faire surtout avec la matière première choisie"
L'idée de départ pouvait être prometteuse, casse-gueule mais prometteuse...
C'est l'histoire de Marie, 25 ans, en quête de boulot, qui tombe amoureuse du fils de son futur employeur, Paul. Ils passent leur première nuit ensemble et quand elle se réveille, elle a 40 ans. 15 ans ont disparu sans qu'elle n'en ai le moindre souvenir et, pourtant, ils ont bien eu lieu puisqu'elle a eu le temps de devenir l'associée de son beau-père, l'épouse de Paul et la mère d'un petit garçon.

Jusque là, on peut se dire qu'il n'y a rien de bien original et qu'il existe quantité de films sur ce genre de distorsions temporelles : Hibernatus (congelé quelques dizaines d'années), Big (un voeu qui tourne mal et un gosse qui se retrouve dans la peau d'un adulte), Un jour sans fin (une seule et même journée qui recommence éternellement) et j'en passe.
Mais si on n'est pas dans l'originalité du sujet, on sait espère que le traitement peut donner lieu à une gentille comédie sans prétention mais efficace.
Las ! On a beau avoir de beaux et bons acteurs, ça ne fait pas tout !
On attaque sur un ton qui tendrait au burlesque.
Juliette Binoche, toujours aussi belle et lumineuse (la garce !), se la joue un peu fofolle, fait des mimiques, surjoue un tantinet, à la limite de la pantomime...
Face à elle, Kassovitz (qui n'a comme inconvénient d'être un poil trop écorché vif dans la vraie vie !) serait plutôt dans le registre de l'émotion contenue du mec dévasté par le naufrage de son mariage.
Du coup, on a beaucoup moins envie de rire, surtout que la farce, ce n'est pas vraiment le domaine d'excellence de Juliette... Alors, on oscille vaguement sans trop oser se lâcher et se détendre...
On regarde les voisins de salle... Ah ben, non, on n'est que deux...
On ricane un peu quand même histoire de justifier l'étiquette " comédie"...
Et puis, tout à coup, le burlesque cède le pas à un aspect plus dramatique, plus profond... Le truc, c'est que ça arrive à une vingtaine de minutes de la fin et que, du coup, il faut assez rapidement sauter à la conclusion. Alors, on voudrait bien sortir son mouchoir un coup pour montrer qu'on a bien compris que l'instant est grave mais comme on est dans une comédie romantique qui doit bien se terminer et que la fin de la pelloche est proche, ben, les petites fleurs et la jolie musique arrivent un peu trop vite et on n'a pas le temps de dégainer !

Et je ne parle pas de la superficialité de traitement !
On croit comprendre, parce que beaucoup de gens la haïssent, qu'elle a une femme de ménage et une nounou pour son fils et qu'elle a beaucoup de fric, qu'elle a réussi et est devenue quelqu'un d'odieux qui ne sait plus vivre autrement que par son boulot.

Sa mère et elle sont en procès

Quant à son mari, il lui suffit d'un dîner sur un bateau-mouche un peu cuité et d'une discussion pour exprimer ses regrets et, hop, emballé c'est pesé, on oublie tout et on recommence...
Celui ou celle qui a écrit ça n'a pas dû, souvent, en arriver à entamer une procédure de divorce...
Alors, oui, d'accord, c'est une comédie romantique donc légère mais, zut, ça ne pouvait pas nuire d'aller un peu plus loin que la ligne scénaristique mise en image !

Après, il y a aussi un problème de petites incohérences dans les détails...
Oui, j'ose parler d'incohérence à propos d'un film qui raconte la vie d'une femme qui se réveille 15 ans après s'être endormie !
Mais il est très différent de mettre une dose de science-fiction et de ne pas être cohérent.
Donc, l'héroïne n'a aucun souvenir de ces quinze dernières années.
Elle découvre l'euro mais elle s'exclame " oh la vache, j'ai du blé !" en regardant ses comptes en banque sur le net dont, visiblement, elle maîtrise et le maniement et dont elle connaît les codes d'accès, sans compter le taux de change de l'euro...
Elle renouvelle l'exploit dans la scène suivante en allant acheter un gâteau chez un grand pâtissier parisien et en s'effarouchant du fait qu'il vaille 350 balles ! Moi, j'dis, elle est super forte parce qu'il m'a fallu plus d'une heure en janvier 2002 pour intégrer la conversion de l'euro !
De même, elle repart à son bureau et, crac, elle assure en un rien de temps sur ses dossiers (alors que je rappelle qu'au début du film, elle venait juste de passer un entretien d'embauche). Elle sait pourquoi comment il faut ou ne faut pas procéder à telle ou telle acquisition après avoir regardé ses dossiers en moins d'une matinée.

Alors, certes, j'ai la dent un peu dure et, oui, on la voit bien chercher sa voiture dans son parking, aidée par la femme de ménage. Oui, elle note les horaires de l'école et se trompe entre la concierge et la directrice. Oui, elle instaure un " jeu" avec son fils pour que, l'air de rien, il lui indique le chemin de l'école et quelques renseignements de première importance...
Certes... Mais tout est tellement superficiel !
On peut pardonner une certaine superficialité de traitement et certaines incohérences quand la comédie est rondement menée mais pas quand on a l'ambition d'y coucher une dose d'émotion et de sérieux !
A bientôt !

La Papote


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