Magazine Journal intime

Le vent nous portera

Publié le 30 juillet 2012 par Papote

Il y a des fois où la vie est somme toute assez drôle, voire goguenarde...
Vous passez une longue période de remous assez désagréables dus à des créatures marines qui aimeraient vous faire chavirer ou vous entraîner dans leurs filets. Vous finissez par vous échouer sur un récif et, là, plus un souffle d'air. Rien ! Le désert océanique. Pas même une mouette à l'horizon...  Vous en arrivez à penser que vous finirez dévorée par Bubulle, votre fidèle poisson rouge qui trône vaillamment à côté de la barre... sauf que ça fait longtemps que ledit Bubulle est parti batifoler sous d'autres cieux mais, bon, ça, à l'instant T, on ne se préoccupe pas de régler ce genre de détails bassement matériels.
Bref...
Donc, vous traversez une période qu'on pourrait appeler " de déprime"...
Et puis, un jour, vous décidez de vous reprendre en main et de reprendre la mer (à moins que ça ne soit la mer qui vous reprenne mais, ça, c'est une autre histoire...
Ca correspond peu ou prou au moment où vous commencez à vouloir créer une collection de haute couture à base de goémon...
{mode parenthèse ON}Si ça vous arrive, je vous le dis en amie, il est temps d'arrêter la drogue, la solitude, les glaces, l'alcool et les poissons rouges ! Et si vous commencez à vouloir faire du crochet, allez consulter directement sans passer par la case départ !{mode parenthèse OFF}
Donc vous caréner la coque, vous lui remettez un coup de peinture, vous rafistoler les voiles, histoire qu'il ait une meilleure mine générale et vous le remettez à flots. C'est le printemps, les beaux jours arrivent... ou pas, d'ailleurs. Vous acceptez toutes les invitations à droite à gauche. Vous enquillez les régates...
Et au bout de quelques semaines, vous réduisez votre temps de sommeil à quelques heures par ci par là et il vous arrive de ne rentrer au port que pour prendre une douche, changer de marinière et avaler vos comprimés de vitamine C sur-dosées...
Mais ça a son charme et aussi contradictoire que ça puisse paraître : vous êtes crevée mais, dans le même temps, cela faisait longtemps que vous n'aviez pas eu une telle pêche !
On pourrait donc dire qu'à ce stade-là, vous avez le vent en poupe, votre longue chevelure flottant au gré des alizés, votre peau dorée par le soleil et salée par les embruns...
Et, c'est là, que la vie est goguenarde...

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Dans les flots limpides, une ombre se met à nager entre deux eaux.
La vigie de votre petit esquif vous crie : objet sous-marin non identifié en vue, capitaine !
C'est un poisson dont l'apparence vous est familière... très familière... Un vieux poisson de votre connaissance mais que vous n'identifiez pas encore... un poisson qui était parti nager  sous d'autres latitudes, ça, c'est sûr, mais qui vient de ré-apparaître sous votre ligne de flottaison.
Cette silhouette... Un boulet ? Un psychopathe ? Un Landru ?
L'ombre s'approche et entoure votre embarcation. Ses ambitions, elles, ne laissent pas vraiment place au doute... Elle serre de plus en plus près et il devient difficile de faire semblant de ne pas la voir. D'ailleurs, vos proches vous appellent en ricanant pour vous désigner la chose...
Ladite ombre est un poisson-boulet et comme tout boulet qui se respecte, il ne tient pas longtemps tête aux courants et finit par se prendre les pieds dans ses propres mensonges...
Mais ce poisson pas plus tôt englouti, une nouvelle ombre apparaît dans votre ciel, sur la ligne d'horizon mais, elle, pas de doute, vous la reconnaissez immédiatement. D'ailleurs, elle ne cherche même pas à se mettre en embuscade, elle se dévoile directement à vos yeux ahuris... Un psychopathe d'une espèce rarissime...
Il tente de se poser sur votre mât de misaine mais, lui, vous l'avez vu poindre son bec et, changement brusquement votre cap, vous le ré-expédiez direct à la maison mère !
Vous riez encore de ces pseudos mésaventures qu'un autre oiseau de proie vous prend par surprise en se posant direct sur le bastingage.
Saperlotte, lui, vous ne l'aviez pas du tout senti arriver ! Mais il s'installe, comme si de rien n'était. Il tente de chantonner une douce mélodie engageante, se permet même de faire de l'humour en vous demandant s'il doit se sentir dans la liste des psychopathes ou des Landru car il lit votre livre de bord...
Vous ne prenez même pas la peine de lui répondre et puis lui répondre quoi ? Qu'il est bien présomptueux de penser qu'il puisse faire partie de l'une ou de l'autre des catégories ? Non, il ne fait partie de rien car il n'est rien et c'est tellement facile de se débarrasser d'un rien, un courant d'air devrait y suffire !
Il tentera quand même de reprendre griffe sur le bastingage mais en vain, vous n'entendez même pas son cri offusqué de tant de mépris... Un rien, ça ne se voit pas, ça ne s'entend pas !
Votre petit bateau continue de voguer sur les flots bleus quand apparaît une bouteille à la mer. Un message qui se voudrait amical, dénué de tout intérêt personnel, se réjouissant même de voir que vous avez repris la mer mais vous en connaissez la plume et vous vous demandez bien ce qui motive un tel message des mois et des mois après un repas que vous aviez vécu comme une humiliation cuisante...
Il paraît que l'eau doit passer sous les ponts... L'eau peut-être mais pas votre petit bateau qui reste coincé en travers de l'arche du pont... Et puis l'eau de quoi ? L'eau pour quoi ? Il est déjà sur un bateau !!! Jouer les radeaux de la Méduse, très peu pour vous, merci !
Vous vous contentez de souhaiter bon vent à la bouteille et la rejetez à la mer sans plus de cérémonie...
Vous continuez à voguer nez au vent, devinant que la mer autour est peuplée d'autres créatures, au nombre desquelles il doit y avoir des requins, des maquereaux mais aussi des poissons-clown...

Oui, parfois, la vie est goguenarde...
S'ils savaient le mal qu'ils ont pu vous faire et s'ils savaient à quel point vous les méprisez de les voir revenir tournoyer comme des rapaces sur une carcasse... S'ils savaient à quel point, vous avez eu du mal à décider de reprendre la mer et la peur que ça peut éveiller en vous mais à quel point, aussi, vous les avez percés à jour et vous ne vous laisserez plus prendre à leurs effets de plumes et leurs chants de sirène. Il n'y a point de fierté ou de coquetterie à tirer de tout cela si ce n'est que vous avez dépassé consciemment une zone de turbulence, puis une zone sans vent. Si ça se trouve à la prochaine escale, vous mettrez la main dans un nouveau panier de crabes, vous n'en savez rien. C'est comme ça...
Le vent nous portera...

A bientôt !

La Papote


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