Tu recevras cher enfant si tu ne te fais sage
un bol de riz une écharpe en laine drue trois coups de pied au cul
qui te feront rebondir trois fois dans l’herbe folle
un beau jeu de pétanque au cochonnet manquant une tombe de pierre pour des jours meilleurs
une pincée de poivre et un pince-nez d’argent
des points de suspension dans ta figure
et au pied du sapin des cadeaux éventrés une pluie de débris des épines à foison
de l’eau dans tes chaussettes du vent dans tes souliers et des briques murant toute la cheminée
des notes de musique te riant au nez
une nouvelle famille qui ne t’aimera pas
des clous déjà tordus un lit en portefeuille
un peu de désespoir et beaucoup d’amertume
tes ongles sur la craie et ta main dans la porte
un train qui part sans toi et ton chien en gigot
des voitures sans roue sans volant sans châssis des voitures sans rien
l’anathème féroce du bon Père Noël et les pioches des sept nains.
Tu pleureras un peu mais tu pleureras plus en pensant aux cadeaux
que tu aurais reçu si tu avais été sage
une crème d’abricot un bon lait vanillé une outre de bière brune
cinq éléphants des Indes en procession royale
une vraie plume d’ange
un clown infiniment triste et infiniment drôle
un sac empli de billes
des voitures avec roues volant châssis des voitures avec tout
des luttes dans l’arène des amis généreux une fleur d’oranger naissant dans ton cartable
une carte à gratter de futur millionnaire un sourire de ton frère l’aumône d’un mendiant et tes pires ennemis qui mordent la poussière
tu riras sans la peur de pleurer un beau jour et dans ton petit soulier tu trouveras cachés
la clef d’un fort lointain une armure de cristal
une carte au trésor une pluie d’arcs-en-ciel un monde où tu existes une envie de bien faire
du papier des crayons pour voyager enfin
de quoi rester enfant au jour de tes cent ans.
Maintenant cher enfant tu es libre d’être bon ou vilain.

Un bon gigot de Noël.