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Yann Arthus-Bertrand est inquiet

Publié le 10 janvier 2013 par Rolandbosquet

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   Mes jeunes voisins, Juliette et Mathieu, se sont installés dans leur grange enfin aménagée. Juliette tenait à déposer les premiers cadeaux de leur fille Anaïs devant une vraie cheminée. J’ai ajouté le mien, bien sûr. Une peluche tout à fait ordinaire mais chargée de toute la tendresse dont est encore capable un vieux bougon de la campagne devant un bout d’chou prodigue en sourires. Méfiez-vous, me prévient Juliette. C’est une séductrice ! Il est bien trop tard ! Les yeux éblouis et le cœur chaviré, le "Papet" est déjà complètement gâteux ! Et ils sont légion ceux-là qui, comme lui, s’extasient devant ces promesses d’hommes et de femmes. Comme s’ils voulaient ignorer les combats qui les attendent pour trouver leur place dans un monde bousculé. Car ils sont de plus en plus nombreux sur terre, ces futurs conquérants. Les démographes estiment la population mondiale à plus de sept milliards d’individus. Elle s’élèverait à huit milliards lorsqu’Anaïs célèbrera sa quinzième année. Les Moustaches Vertes s’alarment. L’homme pille déjà gaillardement les ressources que la Terre met à sa disposition. Si le rythme se poursuit, ne resterait à Anaïs et à ses enfants qu’une terre dévastée. Les Moustaches Vertes n’ont pas toujours tort lorsqu’elles se préoccupent plus d’écologie que de postes ministériels. Des voix s’interrogent par ailleurs : la Terre pourra-t-elle nourrir toutes ces bouches ? Les optimistes affirment qu’elle peut le faire, selon la formule de Pierre Dac. Les pessimistes arguent le contraire. Si l’on en croit des tenants de la Théorie de Gaïa de James Lovelock, c’est la nature elle-même qui régulera le  nombre des êtres humains en fonction de sa capacité à les héberger. Déjà les démographes constatent que l’augmentation de la population aurait tendance à diminuer. Elle s’infléchit même nettement dans nos vieux pays occidentaux. La cause peut en être culturelle. Elle en est aussi physiologique. Les campagnes se désertifient et la concentration urbaine se fait de plus en plus pressante, entraînant avec elle ses cohortes de stress et, surtout, l’inévitable pollution. Soumis dès l’enfance à sa néfaste influence, le jeune mâle occidental d’aujourd’hui produirait moins de spermatozoïdes que celui d’hier. Réduisant d’autant ses possibilités de reproduction. Ainsi le nombre des naissances faiblit. Il est encore partiellement compensé par celui des vieux qui progresse pour cause d’accroissement de durée de vie. Mais comme les vieux mâles d’aujourd’hui se reproduisent aussi peu que ceux d’hier, ils ne contrebalancent pas les défaillances des jeunes. En fait, si les vieux mourraient plus jeunes, la fameuse courbe s’infléchirait plus encore. Mais Yann Arthus-Bertrand demeure malgré tout inquiet : « Lorsque je suis né, nous étions deux milliards d’humains. Nous avoisinons aujourd’hui les sept milliards. Nous ne pouvons continuer comme cela. » (*) Que faudrait-il donc ajouter à la pollution ? Certaines Moustaches Vertes, soucieuses probablement de conserver leur douillet bien-être, militent pour ce qu’elles appellent pudiquement la "croissance zéro ". L’application de cette doctrine reviendrait en réalité à organiser la pénurie. Privés d’alimentation et d’énergie, les plus faibles seraient naturellement moins nombreux et les dommages dus à la surpopulation atténués d’autant. Il est cependant fort douteux que les futurs Anaïs et autres Mathéo ne bataillent pas autant que leurs aînés pour atteindre eux aussi une vie confortable, apaisée et sereine. Commençons donc par lutter contre le gaspillage et par répartir plus équitablement l’eau et la nourriture ! Mais tout le monde ne peut peut-être pas vivre aussi frugalement qu’un vieux bougon de la campagne retiré dans sa vallée perdue au cœur des Monts ! Conscient de cette évidence pour nos sociétés repues, Yann Arthus-Bertrand poursuit donc inlassablement et magnifiquement sa quête de solutions. Jusqu’au fond des océans. (©Roland Bosquet) (*) "Femme actuelle " n°1472 du 10 décembre 2012 page 103


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