Magazine Journal intime

Mon Kindle, cet ersatz à l’arrière-goût d’opium

Publié le 14 décembre 2012 par Ecribouille @Ecribouille

Je fais partie de ces gens qui adorent lire. Pourtant, j’ai des phases où je ne lis pas du tout et où il s’agit d’un effort douloureux, comme pour manger lorsqu’on a une gastro-entérite. Dans ces moments là, je ne parviens pas à digérer plus de trois pages d’affilé. Généralement, elles surviennent à la suite d’une période d’overdose littéraire. C’est arrivé après ma licence de Lettres-Modernes, et c’est arrivé après la rédaction de mon mémoire de recherche.
Mon Kindle, cet ersatz à l’arrière-goût d’opium

Je fais également partie de ces gens qui aime les livres et surtout les beaux livres. Un livre de poche peut aussi être un beau livre, chacun a sa manière de voir. Je possède pourtant une liseuse numérique Kindle, c’est mon cathéter littéraire… et littérale.

La reprise de la lecture n’est pas évidente. Par quoi commencer ?

J’en ai lu des choses lourdes et que j’ai même adoré. Quand tu as réussi à te taper La Jérusalem Délivrée du Tasse en entier sans t’ennuyer, je pense que tu as atteint un certain degré de capacité de lecture. Mais aujourd’hui, cela me serait indigeste. Il faut attendre encore avant que je sois de nouveau capable de lire un peu de tout sans prendre une dose de vogalene en amont.

Je prends alors les livres que j’ai à ma disposition, accumulé durant l’été pendant des séances de promenades solitaires en librairie. Le dernier livre que j’ai lu avec plaisir était alors J.O. de Raymond Depardon : un splendide retour d’expérience sur la photographie sportive, les jeux olympiques et ses impacts politiques. C’est un de ces livres facile à lire (avec de belles images) et que j’ai dévoré avec appétit.

J’ai fini l’entrée, et si on passait à table ?

Pour aller plus loin dans ma quête de la reprise du goût à la lecture, je dois réhabituer mon palais cognitif à des saveurs épicées ou parfois même amer. En revanche, tu ne me feras jamais lire des endives, plutôt avoir les yeux qui tombent !

Oh tiens, ce livre m’a l’air bien copieux, appétissant, raffiné… mais j’ai peur de me brûler la langue. Alors que faire ?

Dois-je retourner aux genres qui m’ont donné goût aux lectures tard avant de dormir, m’ont réveillée en pleine nuit pour terminer ce fichu chapitre, et fait passer des week end entiers (comme le foie gras) immobile sur le canapé sans même m’en rendre compte ?
La science-fiction ? Je devrais peut-être relire quelques nouvelles de Dan Simmons pour me remettre dans le bain, et j’oserai éventuellement me plonger dans Fondation que je me promets de lire depuis des années.

Amazon, ce dealer de petite catégorie

La petite pile de livres grimpe. Ce sont surtout des bouquins achetés avant un départ en week end en me disant que je lirai ça dans le train. Cela n’a pas fonctionné, j’ai dormi. Parmi eux, il y a ce genre d’ouvrages qu’on voit en tête de gondoles de la FNAC. Des livres à succès et accessibles, je me disais que ce serait certainement une bonne idée pour relancer la machine.
Sauf que je mets énormément de temps à me décider, pire, je suis indécise. Ce n’est pas pour rien que j’ai eu droit au livre Madame Indécise pour mes 20 ans !

J’ai fini par mettre à charger mon Kindle 3, et parcourir l’autre liste de livres (numériques) que je m’étais préparée. Ce Kindle avec clavier physique, c’est un peu le BlackBerry des liseuses, il y a dedans « ce que je devrais avoir lu dans ma vie » soit des classiques de la littérature que j’ai honte de ne pas connaître réellement. Parmi eux, nous trouvons par exemple Le dernier des Mohicans ou encore Les 3 mousquetaires. C’est d’ailleurs de cette manière que j’avais redécouvert Jane Eyre, et ce fut une bonne surprise.

Pas convaincue, je n’ai pas envie de lire ces trucs que la moi d’il y a 6 mois a préparé. Il me faut quelque chose qui me donne envie maintenant. C’est comme lorsqu’on a un repas prévu depuis 3 mois avec des amis mais qu’aujourd’hui la thématique du restaurant ne nous fait plus du tout envie.
Oh et puis merde, je suis allée sur Amazon.fr et j’ai regardé les best-sellers. C’est là que je suis tombée sur Pourquoi les gentils ne se feront plus avoir en me disant qu’il s’agissait exactement de ce dont j’avais besoin en ce moment. Et cela fonctionne, je lis, je lis, je me réveille pour lire, et plus je lis, plus j’ai envie d’écrire.

La lecture, c’est un rail de coc’ qui booste ma productivité manuscrite (ou tapuscrite).

Je ne lis plus, je consomme

Et c’est terrible à dire.
J’ai l’impression que mon Kindle n’est qu’une seringue d’héroïne que je m’injecte dans l’encéphale à intervalles réguliers pour garder mes neurones actifs. Elle me donne une dose d’encre numérique, et me soulage pour ne plus ressentir cette chose honteuse d’être une littéraire qui ne lit plus.
La barre de progression du fichier avance alors de la même manière qu’un seringue qui se vide. Cela fait tellement de bien ! Et je me vois : j’appuie, j’appuie sur la touche pour tourner la page de la même manière que le malade se donnant une dose de morphine pour apaiser sa douleur.

Cela ne peut pas continuer, il faut faire quelque chose.

C’est décidé, je profite de mes prochains congés pour aller en cure de désintoxication. J’irai flâner à la bibliothèque, je choisirai le livre qui me fera envie quel que soit son domaine, et je prendrai le temps de le lire. Ce n’est pas grave si je ne le finis pas, j’aurais lu pour lire et pour profiter de ce temps de loisirs.
Le livre sera rendu avec le sourire après une bonne digestion littéraire, il ne sera pas absorbé mécaniquement dans l’unique but de satisfaire mes synapses.


Retour à La Une de Logo Paperblog