Magazine Journal intime

Ce que je déteste de la maternité

Publié le 13 février 2013 par Bizz
La mort
Ou plutôt, l'éventualité que la mort me fauche un enfant. Ou pire, les deux. Cette mort que je ne craignais pas auparavant me donne des nausées quand j'y pense aujourd'hui. Sans compter la possibilité que moi, je meure. Depuis que je suis mère, j'ai compris qu'il me fallait être immortelle pour de nombreuses années. J'ai laissé tomber mes projets de saut en parachute, je porte un casque quand je fais du vélo, je ne texte jamais au volant, je coupe mes raisins en deux pour éviter l'étouffement. On n'est jamais trop prudent.
La maladie
Celle qui me fait dormir dans une chaise berçante, les bras chargés d'un petit paquet d'amour fiévreux et incapable de gérer sa douleur sans la présence réconfortante de maman; celle qui m'oblige à laver des tout petits draps trois fois dans la journée parce que l'odeur de vomissure y est imprégnée; celle qui me fait attendre des heures à l'urgence entourée de gens, sans doute attentionnés, qui n'ont pas l'air de comprendre qu'un enfant malade n'a pas envie de faire des guilis-guilis avec des inconnus; celle qui me fait me ronger les ongles d'inquiétude et me donne des migraines d'impuissance. Cette maladie, du petit rhume désagréable à la crise d'allergie paniquante, qui gruge mon énergie et s'attaque férocement à mon propre système immunitaire, elle me fait royalement chier.
L'hypersensibilité
L'incapacité d'écouter le bulletin de nouvelles. Les absences prolongées des réseaux sociaux quand il y est question mur à mur d'une actualité qui me déchire le coeur. Les moments où j'ai l'air d'une folle, assise dans mon salon à répéter inlassablement «ben non, ben non, ben NON», parce que j'écoute de superbes émissions du point de vue artistique, mais qui abordent des sujets qui me donne mal au ventre. Cette fois où j'ai pleuré avec Bébé fille qui se faisait recoudre le front à l'hôpital; cette autre fois où j'ai versé des larmes avec Bébé fiston qui répétait en pleurant maman en frottant ses petits bras couverts de plaques rouges boursouflées et brûlantes. Toutes les fois où je pense avec fierté à mes deux petits monstres qui deviennent chaque jour des êtres plus bons et généreux. Et puis, cet instant où j'ai compris que les montages photo/vidéo d'accouchement, accompagnés d'une petite musique douce, ne m'apparaitraient plus jamais quétaines...
La conciliation travail-famille
La course, le matin, pour être à l'heure. Répéter sans cesse vite. Vite, mange tes céréales. Vite, enfile ton chandail. Vite, brosse tes dents. Vite, mets tes bottes. Vite, assied-toi dans la voiture. La course, le soir, au retour à la maison. Le souper, la vaisselle, le bain, les histoires, le dodo. Vouloir à la fois stopper le temps pour qu'ils ne grandissent pas trop vite, mais leur pousser constamment dans le dos pour ne pas être en retard. Vouloir passer un maximum de temps avec eux, mais être incapable de rester à la maison à temps plein. Avoir envie de s'investir corps et âme dans leur éducation, mais ne pas négliger pour autant la carrière qui contribue, elle aussi, au bonheur. Jongler avec les horaires, prévoir à la seconde près, rentabiliser les déplacements. Gérer deux business: le boulot et la famille. Acheter du cache-cerne en caisse de 24.
La culpabilité
Celle qu'on se fait lancer en plein visage à grands coups d'études se contredisant, de commentaires désobligeants et de situations impliquant des gens qui ne savent pas se mêler de leurs affaires et une maman. Celle qu'on s'auto-afflige pour tout et pour rien: parce qu'on a risqué notre immortalité maternelle en prenant la route malgré la tempête de neige ou en oubliant de couper nos raisins en deux; parce que le petit a assurément chopé ses otites par notre faute, mère indigne qui l'a laissé à la garderie avec un peu de morve au nez; parce qu'on a perdu patience trop vite et qu'on pense avoir puni trop fort; parce qu'on a fini plus tard que prévu au travail et que la course du soir s'en trouve plus effrénée que jamais; parce qu'on s'en veut de se sentir coupable pour tout et pour rien.
Les petits désagréments du quotidien
Mettre le pied sur le coin d'un bloc Lego à 4 heures du matin. Devoir changer de petites culottes après un éternuement. Constater qu'il n'y a plus de lait à 22h. Poser la main sur une crotte de nez gentiment déposée là par la plus grande. Changer une couche qui a débordé. Manger froid. Manger équilibré alors qu'on a juste envie d'une grosse poutine. Chercher la télécommande ou le téléphone. Les trouver, pleins de bave, dans une craque du divan.
Et, malgré tout ça, les aimer plus que tout au monde, nos enfants.

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