Réflexion vingt-sept (13 avril 2008)
Le retour de la faim dans le Tiers-Monde où les échecs des politiques de développement, de lutte contre la pauvreté, et des processus d'urbanisation ... Autrement dit, les grands discours des développeurs ne servent une fois encore à rien, même lorsque leurs objectifs visent simplement à être personnellement reconnus internationalement comme de grands visionnaires du développement ...
Lire cet article intéressant d'Eric Le Boucher sur le retour des affamés ...
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/04/12/le-retour-des-ventres-creux-par-eric-le-boucher_1033942_3232.html
Les institutions de développement occidentales essaient de produire de plus en plus d'études ardues sur le développement, sur l'eau, sur le changement climatique, sur la biodiversité ... ce que le directeur général de l'AFD appelle 'la Production Intellectuelle' ... Mais cela ne résoudra pas les problèmes des personnes que de telles institutions devraient aider et qui meurent de plus en plus de faim, en raison du renchérissement sur les marchés mondiaux des céréales alimentaires et de la nourriture. Comme d'habitude, les dirigeants et les hauts cadres de ces organismes de développement cherchent à être reconnus internationalement pour obtenir un poste plus prestigieux par la suite, ou simplement demeurer appréciés par leurs supérieurs hiérarchiques ou leurs tutelles ...
Où se jouera donc le développement demain ... dans les villes comme le pensaient en juin 2007 Thoraya Ahmed Obaid (secrétaire générale adjointe de l'ONU) et Jean-Michel Severino (directeur général de l'Agence française de développement) ... ou dans les campagnes du Tiers-Monde, pour s'adapter à une nouvelle agriculture et l'adapter aux méthodes africaines de contrôle du sol ?
Comme quoi, un simple renchérissement des denrées agricoles, parfaitement prévisible, remet complètement en question un schéma de développement sans que personne n'y ait préalablement songé ... malgré les milliers de grands penseurs en développement qui sont censés y réfléchir à longueur de journées ...
Réflexion vingt-six (28 juin 2007)
Urbanisation et développement
A la une du Monde en ce 28 juin 2007, deux articles sur l'urbanisation croissante de la population mondiale. Ces deux articles se basent sur le rapport annuel du Fonds des Nations unies pour la population (Fnuap) consacré à la question urbaine.
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3244,36-928572@51-928704,0.html
Le premier article écrit par Hervé Kempf, journaliste au Monde, rappelle qu'en 2007, pour la première fois, il y aura sur notre Terre plus de citadins que de ruraux. Et selon le rapport du FNUAP, les villes devraient regrouper près de 5 milliards d'habitants en 2030, soit 60% de la population mondiale. Cette croissance se produira essentiellement dans les pays du Tiers-Monde, particulièrement en Asie et en Afrique, et accroîtra les problèmes d'insalubrité, de pauvreté et environnementaux liés aux bidonvilles. Selon ce rapport, les bidonvilles regrouperaient déjà aujourd'hui 1 milliard d'humains (sur 3,3 milliards de citadins), vivant dans des conditions précaires, dans un environnement insalubre, caractérisé notamment par une eau rare et chère, et dans des structures sociales souvent disloquées.
Le rapport du FNUAP se conclut toutefois sur le constat « qu'il n'y a pas de main invisible qui viendra ordonner la croissance urbaine conformément aux besoins sociétaux, aux responsabilités intergénérationnelles et aux exigences de l'égalité des sexes. » Le Fonds plaide ainsi pour une relance des politiques urbaines, qui accepte le phénomène des migrations et améliore leur accueil. L'article d'Hervé Kempf se conclut toutefois bizarrement en notant une contradiction entre ce besoin d'aides financières des Etats du Tiers-Monde, qui devraient être aidés par les organisations financières internationales, et la primauté que souhaite donner la Banque Mondiale aux politiques de soutien à l'agriculture ? Y a-t-il véritablement contradiction entre ces deux types de politiques ? En aucun cas, selon moi, puisqu'il y aura (et il y a déjà) nécessité pour les campagnes de nourrir les habitants de ces villes et que relancer le soutien à l'agriculture permettra peut-être de diminuer l'exode rural qui remplit les abords insalubres des villes.
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-928643@51-928704,0.html
Le deuxième article est écrit par deux 'spécialistes' du développement (ou du moins des discours sur le développement) : d'un côté la directrice exécutive du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), secrétaire générale adjointe de l'ONU, Thoraya Ahmed Obaid, de l'autre le directeur général de l'Agence française de développement (AFD), Jean-Michel Severino.
Ces deux auteurs partent également du rapport rédigé par le FNUAP sur la question urbaine, mais en offrent une vision particulièrement idylique, aux accents essentiellement politiques, comme si les personnes que ces deux auteurs voulaient toucher n'étaient pas les lecteurs du Monde, mais les cabinets ministériels français et leurs futurs clients chefs d'états étrangers.
Leur article se termine de la façon suivante :
« Notre avenir, qu'on le veuille ou non, sera urbain. Il est urgent d'accompagner le développement urbain et de lui reconnaître sa place au sein des politiques publiques afin de tirer parti de son potentiel de développement et de réduction de la pauvreté dans les villes comme dans les campagnes.
C'est dans les taudis du monde que se livrera la bataille pour la réduction de moitié de l'extrême pauvreté d'ici à 2015. »
Ils rappellent évidemment avec raison que c'est l'exode rural qui a permis le développement de tous les pays industrialisés ... Sans présence d'une main d'oeuvre nombreuse arrachée aux campagnes, il n'y aurait pas eu de développement économique en Europe au XVIIIème et au XIXème siècle. Mais ils parlent de catalyseurs de développement, de services nécessaires pour répondre aux besoins les plus élémentaires, d'éducation des femmes pour limiter les naissances et la procréation. Ils estiment aussi de manière relativement obscure que « s'il faut bien constater que l'urbanisation concentre la pauvreté, elle n'en est pas la cause. »
Derrière cet article particulièrement vide et essentiellement utopiste voire commercial, on note l'absence d'un nouveau paradigme du développement économique ... Un développement économique peut-il se construire sur la base de cette migration vers les zones urbaines, au lieu de simplement gérer difficilement les conséquences sociales et environnementales amenées par cette fixation humaine autour des zones périurbaines ? Un développement économique peut-il être enclenché dans les villes ou dans les campagnes du Tiers-Monde ? Et sous quelle forme ?
Saucratès
Mes précédents écrits sur le Développement :
1. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2006/11/06/du-developpement.html
2. http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2006/11/25/du-developpement-suite.html
Une critique du développement
http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2006/11/11/critique-du-developpement.html
Quelques théories du développement
http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2007/04/26/théories-du-développement.html