Magazine Journal intime
La Guerre des Boutons (P'tit Gibus versus Grande couillonne)
Publié le 12 avril 2008 par CorckyJe serais ma femme, je désespérerais.
Je me tirerais une balle. Je me mettrais la tête dans le four. Je me petit-suiciderais.
Parce qu'elle est pas gâtée. Loin s'en faut.
Par exemple.
Quand je prends un bain avec Poupon la Peste.
Ma fille ne peut pas prendre de bain sans déménager deux bons kilos de jouets en plastoque "made in Taïwan", essentiellement des animaux ( de toutes les espèces et de toutes les tailles, à plumes, à poils et à écailles, qui pondent des oeufs ou pas, herbivores ou carnivores, en voie d'extinction ou déjà disparus depuis l'ère de Raymond Barre, comme le Tyrannosaurus Rex). C'est presque pathologique, comme habitude, je trouve. Des fois, elle me fait peur. Je t'ai dit que quand elle va aux chiottes, elle se raconte l'intégrale des Contes de Grimm à voix haute? Ouais. Par contre, elle tire pas la chasse. Evidemment.
Mais bref!
Je prenais donc un bain, et elle avait réussi à s'incruster en me faisant les yeux de Bambi quand il perd sa mère à cause des vilains chasseurs adhérents de l'UMP et bourrés comme des coings au gros rouge de chez Francis, bar-tabac-PMU de Trouducul-Les-Couilles-à-l'air, dans le Berry.
On était toutes les deux assises, le cul dans le bain moussant vanille-des-îles, face à face, et ma fille persistait à me percher des grenouilles en caoutchouc sur la tête.
J'aime pas avoir des grenouilles en caoutchouc sur la tête.
Alors je me suis ébrouée bien fort, telle Lassie dans l'épisode où elle sauve le petit Jim des eaux glacées d'un torrent de montagne dans lequel ce petit con était tombé en voulant récupérer la pioche de son père (précisons que sans cette pioche, le père de Jim ne pouvait plus exercer son noble métier de chercheur d'or, ce qui aurait condamné toute la famille à une misère encore plus crasse que celle dans laquelle ils étaient déjà plongés...d'où la chute du jeune drogué dans le torrent, d'où l'intervention héroïque de Lassie...c'est un vrai bonheur, comme tu suis, lecteur, faut vraiment tout te dire, hein!)
Du coup, les grenouilles à deux balles ont effectué un décollage brutal, quittant ma moumoute fraîchement tondue dans un vol plané digne d'un saut à ski à Nagano, pour venir couler à pic dans un grand "plouf" qui n'était pas sans rappeler le bruit que fait un corps convenablement lesté lorsqu'il touche la surface de la Seine (ou de la Vologne).
Hurlement de ma fille de (presque) quatre ans.
- Bouaaaaaaaaaaaaah! T'as tué les grenouilles!
Moi, un peu interloquée:
- Qu'est-ce que tu racontes? Elles sont retombées dans l'eau, l'eau ça tue pas les grenouilles, les grenouilles vivent dans l'eau! - Snirf! Oui mais celles-ci, c'étaient encore des bébéééééés! Elles savaient pas encore nageeeeer! - N'importe quoi! Les grenouilles savent nager dès qu'elles sortent de l'oeuf, eh, patate! - C'est paaaaas vrai! - Si c'est vrai! - Non! - Si! - Non! - Si! - Non! - Si! - Noooooooon! - Si-HEU!!! - NOOOOOON! - Vaaaaaaaaal !
Voilà.
Comment, à plus de trente ans, une mère de famille en appelle à sa gonzesse pour arbitrer un conflit du niveau d'une cour de maternelle, conflit centré sur la question de savoir si les batraciens sont spontanément dotés de la faculté à se mouvoir en milieu aqueux, ou si cette capacité relève plutôt de l'acquis.
Alors, je le dis.
Si j'étais ma femme, je désespérerais.