Un reportage en 4 chapitres, réalisé au mois de mars 2013 à Besançon, sur la pratique et le rôle du sport dans l'armée Française / © France Télévisions.
Plusieurs compagnies se croisaient ou attendaient leur tour pour des opérations au Liban, au Mali, à Djibouti ou en Afghanistan... Il neigeait encore un peu sur la place d'arme du quartier Joffre où nous avions planté notre caméra pour parler de sport dans l'armée Française... Du rôle d'une activité physique soutenue dans les rangs militaires. Une simple question, sans autre volonté particulière. Quelques heures de tournage programmées au 19e régiment d'artillerie de Besançon, dans le but de soumettre nos idées reçues à l'épreuve du terrain.
REPORTAGE © France Télévisions - Mars 2013Jl Gantner, Denis Colle, Philippe Drouot, Alex Baudrand, Marie Bashung
(Pour les musiques : BO de "Into the Wild"de Sean Penn composée par Eddie Vedder et BO de "Dead man" de Jim Jarmusch composée par Neil Young.
Je ne sais pas vous, mais pour moi, la caserne et l'uniforme... Les ordres hurlés sans raison à la face du petit personnel sans distinction et les corvées obligatoires de toutes sortes, ne m'avaient pas forcément laissé un souvenir impérissable. Une année au 27e bataillon de chasseurs alpins à Annecy il y a tout juste trente ans... L'adresse au dessus du lac, les dents de Lanfon, le mont Veyrier et la Tournette en toile de fond peuvent faire rêver, certes ! Mais Je l'avoue tout net : ce paysage là d'un peloton mis au pas où l'on avait cherché à me faire disparaitre dans la couleur kaki d'un bon millier de troufions réquisitionné avec moi pour l’occasion d’une tradition héritée du Directoire — ce style dont je transporte aujourd’hui l’élégante sobriété d’une chaise en noyer à pieds de sabre et son dossier à claire-voie dessiné d’une lyre d’un appartement à l’autre… — m’avait laissé un goût profond pour la rébellion, la mutinerie et l’émeute. Cette inclinaison pour l’indépendance d’esprit qui ne m'a plus jamais quitté depuis. C’était le temps du service militaire encore obligatoire, dans un contexte idéologique qui rendait la loi Jourdan du 5 septembre 1798 et ses nobles intérêts égalitaristes, pour le moins obsolètes depuis les évènements de mai 68… Je n’avais pas encore 20 ans et je me destinais alors à une vie entière consacrée à l’alpinisme de haut niveau en hésitant encore entre une certaine inclinaison pour la misanthropie et un combat politique sans merci contre toutes les formes d’injustice et d’aliénation. Ce cher vieux Bonatti et sa bataille aux Drus sur ma table de nuit pour entretenir mes cauchemars libertaires, et quelques cavernes naturelles un peu rustres pour installer mon duvet crasseux sous des volutes de poésie montagnarde. Tout ça pour vous dire de quel point de vue je partais avant de vous livrer ce témoignage professionnel de quelques gens en treillis rencontrés lors d’un tournage consacré au sport dans l’armée Française. D’aucun de mes coreligionnaires verront sûrement à travers ce compte rendu de 3 journées passées au quartier Joffre de Besançon, un hymne, pour ne pas dire une promotion de la chose militaire au lieu d’une critique en bonne et due forme attendue sur leurs écrans de principe. Et je ne sollicite aucunement leur indulgence. Car j’avoue qu’il m’a été permis de tout filmer sans restriction d’aucune sorte, sur l’insistance même d’une hiérarchie militaire parfaitement ouverte à ma volonté de tout voir. Oui, tant pis pour les postures faciles et les vérités toutes faites dont je suis souvent ceinturé dans mon métier, mais au principe du repli sur ses convictions premières, j’ai préféré l’émancipation d’un l’audit libre de tous arguments dogmatiques. Le fil d’une rencontre dont j’espère qu’il peut constituer l’objet désintéressé d’un échange de sentiments dégagé de toute autre arrière-pensée. Sportivement votre. JL Gantner