Sexe, drogue et vacuité. Voilà le leitmotiv de Moins que zéro, un roman trash et déroutant, qui cache le talent certain de son auteur pour mettre en scène le vide. Brillant mais très choquant.
"C'est le matin de Noël et je suis défoncé à la coke" Cette phrase résume à merveille le roman. Clay, jeune californien de 18 ans, rentre à Los Angeles passer les vacances de Noël. Son temps libre, il le passe avec ses amis, à tuer le temps, à faire la fête et à se droguer. Mais l'ennui est tel qu'il est déjà blasé de tout, comme tous ses camarades révélateurs de la jeunesse dorée qui n'a rien à perdre.
Je l'admets tout de go : j'ai failli abandonner ce livre dès les premières dizaines de pages tellement il est déroutant et tant la lecture m'a mise mal à l'aise. L'intrigue est pour ainsi dire inexistante : quand Clay et ses potes ne se shootent pas à la coke, ils fument des joins, se prostituent, font des tentatives de suicide ou commettent des viols. Au trou la morale, ces jeunes gens sont riches et peuvent tout s'offrir, à quoi bon alors s'encombrer de sentiments ?
"- [...] Quand on veut quelque chose, on a le droit de le prendre. Quand on veut faire quelque chose, on a le droit de le faire. [...] - Mais tu n'as besoin de rien. Tu as déjà tout", je lui dis. Rip me regarde. "Non. J'ai pas tout. - Quoi ? - Non. J'ai pas tout." Après un silence, je lui demande "Et merde, Rip, quesse que t'as pas ? - J'ai pas quelque chose à perdre." (p. 219-220)
Derrière la vacuité des personnages et la profusion de scènes insoutenables, Moins que zéro révèle le talent de Bret Easton Ellis : une description et une mise en scène remarquable du vide (vous-mêmes vous sentez vides à la lecture), et un style désinvolte et provocateur, réduit à une écriture et des dialogues minimalistes. On y retrouve également une Los Angeles noire, sans âme, où tous les vices sont possibles.
En définitive et après mûre réflexion, Moins que zéro est un bon roman, et je lirai probablement d'autres livres de l'auteur, quand mon moral me le permettra. Néanmoins, il est si trash qu'il ne pourra certainement pas être mis entre toutes les mains.
Moins que zéro de Bret Easton Ellis, France Loisirs (Piment), 2011, 240 pages