Mon univers carcéral n'a pas de clôture électrifiée, il ne dispose pas de miradors, ses habitants ont un nom mais pas de Parti. Ils ne présenteront jamais leur candidature. Ils ne seront jamais ni élus ni employés dans les beaux quartiers. Et pourtant, ils survivent tant bien que mal.
En 20 ans, la ghettoïsation a pris le contrôle de la vie quotidienne de ces bannis. Les résidents, n'ont aucun avenir, leurs revenus sont dérisoires, la misère est tellement visible que ce parc peuplé de pauvres atteint la taille d'un département.Les conseils des ministres se sont succédés sans résultats tangibles. Les plans "banlieues" ne cessent de montrer leur impuissance. Au lieu de décroître, l'effet ghetto s'enfle inexorablement. On parque les pauvres, on leur donne tout juste assez de revenus pour qu'ils ne se révoltent pas. Au lieu de rendre prioritaire l'enseignement, on laisse péricliter l'instruction publique, cette absence de sens critique laissant des boulevards idéologiques à des dogmes simplistes.
La vie dans des cages à lapin bruyantes, vandalisées, empilées sur plus de 12 étages ne conviendrait à aucun de ces braves habitants des 16ème, 8ème, enfin tous ces braves résidents des beaux quartiers de Paris où vivent les contempteurs de la "racaille" des banlieues pauvres...Vous avez reconnu cette prison à ciel ouvert, il s'agit bien de la Seine Saint Denis ou 9-3. Le 9-15 étant en voie de séquano-dyonisation...
Fin de la hollandisation du discours calqué sur le fameux :"mon adversaire, c'est la finance..." Salut les poteaux !
Pendant que je vendais laborieusement sur un marché populaire du 93 encastré entre 4 barres d'immeubles grisâtres, mes produits d'origine chinoise à une clientèle négociant à 20 centimes d'euro près -oui, oui, ça existe, je vous le garantis- j'ai éprouvé la sensation fort désagréable qu'en fin de compte, à force de fréquenter cette intense pauvreté, souvent joyeuse -est-il bien utile de le préciser- je m'habituais aussi lentement que sûrement à admettre qu'il s'agissait là de la marche normale d'une république où sur les frontons des édifices publics sont gravés la devise : "liberté, égalité, fraternité'.J'ai beaucoup ri.Jaune.Je me suis dit que la vente de colifichets à ces ménagères leur donnait l'impression d'être riches, même si ces objets ne valaient qu'un euro. J'ai convenu que l'achat des 24 yaourts espagnols à consommer dans les 3 jours pour 2€ les rassasiaient. J'ai admis que les infects gâteaux industriels polonais sans date satisfaisaient la gourmandise des petits et des grands.Finalement j'ai réfléchi et j'ai reconnu intérieurement que les ultra-libéraux qui nous traitent de bolcheviques, gardiens de goulag avaient raison dans leurs excès : je suis gardien-animateur-vendeur de produits bon marché dans un goulag version 9 point 3, la Seine Saint Denis.
Il est bon que vous le sachiez une bonne fois pour toute. "Mon univers carcéral n'a pas de clôture électrifiée, il ne dispose pas de miradors, ses habitants ont un nom....."
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Fidèles lectrices et lecteurs, il nous faut gagner la bataille contre ces libéraux qui accentuent leur pression, question de survie !
Foi d'oiseau lucide à la queue rouge !