De la difficulté d’être seul dans un lieu public. Il m’arrive assez régulièrement de prendre le métro, et je suis toujours distrait et séduit par cette virevoltante chorégraphie des usagers qui cherchent à s’isoler malgré la foule.
Remarque : je suis délibérément inclus dans cette danse… Comment trouver un peu d’intimité sur un quai, soit un siège qui ne soit pas en contact immédiat avec un autre être humain ?
Après un examen topographique des lieux, certains font de savants détours pour se mettre dans une zone relativement à l’écart, et constatent, le temps de leur stratagème, que le siège ciblé est déjà occupé.
S’ensuit la place, s’il y en a, à l’intérieur même du métro où l’on est que très rarement en solitaire, selon ce formidable concept des transports dits « en commun » soit cette addition d’individus qui en a plus que marre des bouchons, des places de parking hors de prix et qui a la noble conscience de préserver notre planète asphyxiée par le diesel et le super.
Tous ensemble, tous ensemble hey, hey ! Tous ensemble, tous ensemble mais tout seul ?
Je note toutefois que, vers minuit, les passagers on tendance à se rapprocher les uns des autres voire même à se coller entre eux s’ils pressentent un danger. La peur : c’est l’ennemi de la solitude.
Ah oui, et le ballet élégant des mains qui tiennent les poteaux moites au sein même des wagons, comme un assemblage dadaïste de phalanges superposées qui s’évitent avec précision.
Et ce mouvement des yeux qui tournoie en diagonale dès qu’un regard en croise un autre avec trop d’insistance.
Heureusement, des âmes compréhensives probablement plus férues de philosophie et de sagesse que de technologie – les japonais -, ont inventé le walkman dans les années 80.
Et puis d’autres ont créé l’IPod et toutes ces boîtes à musique avec écouteurs qui vous donnent le sentiment d’être seul malgré la densité de population qui vous cerne, seul avec Moussorgski, avec Eminem, avec Rihanna, avec Joe Dassin ou avec les cours de perfectionnement d’anglais de Berlitz, repeat after me : « You are not alone… »