Magazine Nouvelles

Les trois sourds

Publié le 22 mai 2014 par Lumbamba Kanyiki @grandkasai

Lorsque les gens n’arrivent pas à bien se communiquer et se comprendre, les conséquences peuvent être très catastrophiques comme nous allons le voir dans ce conte.

Dans une contrée éloignée quelque part dans le Grand Kasai, trois sourds vivaient sans se connaître. Ils étaient une femme et deux hommes. La femme vivait de ses travaux de champ. De deux hommes, l’un était éleveur de moutons et l’autre juge.

Un après-midi, ne voyant pas ses moutons aux environs de son domicile, le sourd qui était éleveur s’en alla à leur recherche. Il rencontra une femme qui labourait son champ. « Madame, n’auriez-vous pas vu, par hasard, mes moutons passer par ici », lui demanda-t-il. La femme croyant que le monsieur lui demandait jusqu’où s’étendait son champ, lui répondit en lui indiquant avec le doigt : « Mon champ commence ici et s’étend jusque dans cette vallée-là ». L’éleveur comprit à sa manière que son troupeau s’était dirigé en direction de la vallée. Il remercia la femme et poursuivit son chemin vers la vallée à la recherche de ses moutons. Par chance, il y trouva tous ses moutons. Grande était donc sa joie. Sur son chemin de retour, il se dit dans son for intérieur qu’il fallait remettre un cadeau à la bonne femme pour son aide.

Il revit la femme toujours en train de labourer son champ. Très content, il s’approcha d’elle et lui tendit un cadeau, mais la femme le refusa. L’homme la supplia : « vous m’avez bien aidé ; sans vous, je n’aurais jamais retrouvé mes moutons. S’il vous plaît, acceptez le cadeau que je vous donne ». La femme s’énerva, pensant que le monsieur était en train de lui faire des avances.

L’éleveur qui voulait à tout prix remettre son cadeau à la femme, se rendit chez le juge pour porter plainte contre elle. Mais il ne savait pas que celui-ci était sourd comme lui. Le juge envoya les gens chercher la femme. Lorsqu’on la ramena devant lui, alors, l’audience commença. Le juge demanda à l’homme de raconter son histoire.

«Monsieur le juge », commença-t-il « je me trouvais chez moi, à la maison. Ne voyant pas mes moutons dans les environs de mon domicile, je suis allé à leur recherche. Chemin faisant, j’ai vu cette femme qui labourait son champ. Je lui ai demandé si elle avait vu mes moutons. Elle m’a indiqué la direction que mes moutons avaient prise. Je suis allé dans cette direction et ai trouvé tous mes moutons. Je voudrais lui remettre un cadeau pour m’avoir aidé, mais elle refuse carrément de prendre mon cadeau. C’est la raison pour laquelle je suis ici. » Il croisa les bras et se tut. Le juge sentit que l’homme avait terminé sa déposition. Alors, il se tourna du côté de la femme et lui demanda de s’expliquer. Celle-ci comprit aussi qu’elle avait la parole et se mit à parler :

« J’étais dans mon champ en train de travailler. J’ai vu cet homme apparaître, venant d’on ne sait où. Il m’a demandé jusqu’où s’étendait mon champ. Je lui ai dit que mon champ s’étendait jusqu’en bas dans la vallée. Il a poursuivi sa route en direction de la vallée. Quelques minutes plus tard, je l’ai vu revenir avec quelque chose qu’il voulait me donner. Mais moi. Je ne suis pas une pute ! » Elle se mit à pleurer. Voyant que la femme ne parlait plus, le juge conclut qu’elle avait terminé sa déposition. Elle lui demanda de cesser de pleurer et se mit à réfléchir.

Enfin, vint son jugement : « Toi, l’homme, tu ne dois pas faire souffrir ta femme. Tu prendras toujours soin d’elle comme un être bien-aimé. A la prochaine fois, tu auras une lourde amende. Ramène-la sous le toit conjugal ! L’audience est levée ». Il se leva et sortit de la salle d’audience.

Lumbamba Kanyiki

Commentaires Lien Texte


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Lumbamba Kanyiki 37 partages Voir son blog

Magazine