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Oxymore et quadrature

Publié le 27 mai 2014 par Rolandbosquet

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         Le mois de juin qui s’annonce déjà bien pluvieux sera sans doute la période la plus difficile à vivre pour la future vacancière. Il s’étire généralement en longueur tout en étant trop court à la fois. Pierre Corneille aurait fait un oxymore de cette contradiction. Quelques grands mathématiciens en font un paradoxe dans le cadre des théories dite des cordes. Michel Onfray parle de redondance. Il connaît bien la nature féminine. La future vacancière qui a prévu d’étaler sa fine silhouette sur la plage craint en effet plus que tout ces affreuses redondances qui ornent son anatomie là où  ses conseillères des magazines féminins en sont totalement dépourvues. Les premières chaleurs, que les prédicateurs de la pluie et du beau temps à la télévision qualifient d’estivales, ouvrent grandes les portes du rêve. Les congés approchent. Un je-ne-sais-quoi dans l’air fleure bon le sel marin et la crème solaire, le bruissement des vagues au bleu transparent et la caresse du vent du large sur une peau bronzée. Ah un farniente sur le sable fin, les yeux mi-clos, tandis que les Apollons déguisés en dragueurs de discothèque défilent innocemment à vos pieds tout en lorgnant sur vos appât négligemment exposés ! Il faudra cependant attendre encore un mois avant de boucler la valise, de sauter dans le TGV et de gagner la crique incroyaaaable en bas et à droite de l’hexagone. Mais ce même mois de juin qui n’en finit pas se révèle également bien trop court. Depuis mardi-gras au moins sinon même la chandeleur, notre future vacancière s’emploie à se séparer de ces fâcheuses "dilatations" qui se sont greffées au fil des semaines aux endroits les plus inélégants de sa silhouette. Son sens aigu de l’organisation, qui fait l’admiration de son patron et de ses collègues, lui a même dicté une conduite de la plus grande  fermeté. Si, au bout d’une quinzaine, le régime ne produit pas les effets attendus, elle change de magazine. Elle a, depuis, étudié, une à une, toutes les revues étalées à hauteur de ses yeux dans le kiosque à journaux de la station de métro, à côté des rayons produits de beauté de la superette de son quartier, autour de la caisse du salon de thé où elle grignote avec ses collègues lors de la pause de midi et dans la salle de repos de sa "boite" lors de la pause-café. Elle a scrupuleusement suivi les précieuses recommandations des "magasinières" qui lui prédisent la disparition sans coup férir de ces quelques livres de trop là où il ne faut pas. Et elle ne peut toujours pas entrer dans le  petit jean qu’elle avait acheté au printemps de l’an passé et qu’elle avait porté au moins deux fois sinon trois. Non pas qu’elle ait l’intention de le remettre cette année. La coupe n’est plus du tout au goût du jour et la couleur, je ne vous dis pas, une horreur ! En réalité, il lui sert uniquement de mesure, d’indicateur, de signal. Et là, le signal est mauvais. L’expérience lui a montré qu’un mois, fut-il trop lent, reste encore trop court pour résoudre la quadrature du cercle. C’est pourquoi elle a pris une décision d’une pure folie. Sa copine, qui peut contempler une vitrine de pâtisserie sans même prendre dix grammes, lui a dit qu’elle est insensée, démentielle, extravagante. Elle ne l’a pas écoutée. Elle n’a même pas attendu la fin du mois de mai pour poster son mail de confirmation. Elle va suivre un jeûne d’une semaine entière dans un monastère du Poitou. Ce serait bien le diable si, après cela, elle ne parvenait pas à se glisser dans le petit maillot qu’elle vient de commander sur le site internet des Galeries Lafayette ! Sinon, ce serait la preuve irréfutable que le monde, décidément, tourne bien de guingois.

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