J’espère pour vous, cher(e)s lecteurs/trices, que vous aurez eu le temps de partir en vacances avant la sortie du dernier numéro de Valeurs Actuelles. Pour ceux qui l’ignorent encore, Valeurs Actuelles est une manière de fan-club de tout ce qui touche de près ou de loin à la droite. Si vous voulez une image plus parlante, le journal est un peu à Nicolas Sarkozy ce que Ok Podium fut à Claude François: une ode au léchage de boules sans le moindre sens critique. Dans le titre du canard, « valeur » est bien sûr à prendre au sens économique. D’ailleurs, quand la droite parle de valeurs, c’est le plus souvent pour adjoindre un flic au moindre comportement social.
Donc interview de Sarko, le mec qui fait passer Chirac pour un modeste pickpocket, le gars qui réussit l’exploit d’avoir un égo encore plus gros que son cul, le mecton qui ne devrait plus avoir le droit de se présenter nulle part ailleurs que devant un juge; gaule turgescente et jaculations concomitantes (le correcteur d’orthographe de Windows n’a pas l’air de connaître le mot « jaculation », ce gros pervers) de la presse qui ne savait plus trop quoi foutre entre la trêve à Gaza et cet été désespérément morne où l’on a pas encore trouvé de façon originale de faire périr ses gosses. Pour mémoire, les années précédentes, on a pu avoir recours à la piscine, au congélateur, au pot de fleur, à l’arrière d’une bagnole surchauffée, mais cette année, que dalle, à peine deux trois marmots qui clamsent en colonie de vacances. On a bien tenté un petit revival avec l’affaire de Montigny-lès-Metz, mais à l’instar du PS et de la gauche, ça n’a pas pris. Époque de merde.
La droite aime donc fliquer, disais-je avant d’être interrompu par un paragraphe consacré aux personnes de petite taille. Tu enlèves le flic à la droite, c’est comme si tu lui arrachais le cœur, le portefeuille et sa raison d’être, c’est comme si tu apprends à écrire aux membres d’Indochine, c’est comme si tu m’interdisais le vin et les clopes. Or derrière Sarko, il y a encore une infinité de gaziers prêts à tout pour que blanc et le rouge dégagent du drapeau tricolore. Si tu as bonne mémoire, il y avait à l’UMP un mouvement qu’on pourrait situer légèrement à droite du Front National qui s’appelait la droite forte. Pour éviter de devenir la droite morte, elle a cessé de cirer les talonnettes de Sarkozy pour se ranger sous le panache et sous la mèche de notaire dépressif de François Fillon. Car si le flic est le cœur de la droite, la trahison est son moteur.
Et parmi ces sémillants jeunes gens, il y a une tête de pipe qui gagne à être connue pour peu que vous vous intéressassiez à la faune politique niçoise qui n’est sans doute pas pour rien dans l’appellation (d’origine contrôlée, puisqu’on parle de la droite) de crétin des Alpes. Notre ami se nomme Eric Ciotti. Une rapide recherche étymologique nous apprend que Ciotti pourrait être un hypocoristique du nom/prénom Felice (qui veut dire joie) et qu’on peut le rapprocher de ciotta qui désigne un estropié, un boiteux mais aussi un caillou. Le prénom Eric provient quand à lui du vieux norrois, et signifie roi puissant ou éternel. On voit bien que les mots ne racontent pas que des conneries, puisque notre copain est aussi chauve que président bienheureux du Conseil Général des Alpes Maritimes, et que sa pensée est légèrement boiteuse.
Le garçon est également député et chargé des questions de sécurité à l’UMP. Autant dire qu’il n’est pas porté sur les questions de prévention mais plutôt sur la schlague. Parmi ses méfaits, on peut citer une proposition de loi (rejetée car inconstitutionnelle) visant à infliger des peines de zonzon aux parents d’enfants délinquants, une autre proposition proposant d’instaurer un encadrement militaire pour les mêmes, et l’infameuse « loi Ciotti » qui a permis de sucrer les allocations familiales aux parents des adeptes de l’école buissonnière (abrogée depuis). Je ne pensais pas que je dirais ça un jour, mais voilà un homme qui déteste encore plus les gosses que moi.
A droite, qui dit sécurité dit « immigration » et « salauds d’assistés qui sont tous des fraudeurs ». Au rayon des sanctions prévues contre les assistés, le brave Eric a créé au sein de son département une brigade anti-fraude qui aurait permis d’économiser 15 millions d’euros (on attend encore qu’il se laisse pousser les bollocks pour s’attaquer à la mafia locale et économiser encore plus, mais là n’est pas le sujet). Pour parvenir à ce brillant résultat, le Conseil Général va convoquer tous les bénéficiaires de RSA depuis plus de deux ans pour les astreindre à des « vérifications ». C’est extrêmement sympatique, mais la CAF procède déjà elle-même à des contrôles de situations tous les trois mois (avec la déclaration de ressources) et tous les ans (en vérifiant la conformité des avis d’imposition aux déclarations trimestrielles, recoupement d’infos avec d’autres organismes…). Comme la vieille tradition française de délation n’a jamais dépéri, il y a même des contrôles inopinés de temps en temps qui permettent de récupérer de coquettes sommes quand la fraude est avérée. Le système est certes perfectible, mais les mesures proposées par Ciotti ne vont même pas aussi loin et l’impunité est loin d’être la règle. Là on voit que le député UMP est un homme de goût, c’est qu’il a demandé à l’INSEE l’accès à divers fichiers qui n’ont rien à voir avec la mission qu’il s’est fixée, comme l’immatriculation des bagnoles et les données des allocataires de la CAF (qui ne sont pas tous bénéficiaires du RSA).
Autre poney de bataille de M. Ciotti, car un cheval c’est bien trop haut pour une si faible hauteur de vue: empêcher les hordes d’immigrés avides de nos généreuses prestations sociales de traverser nos frontières. Car si Dieu a posé des frontières, c’est bien qu’il voulait séparer le bon grain français de l’ivraie étrangère, non? Certes, Ciotti n’est pas franchement un nom français de souche, et certes le pays niçois est l’un des derniers à avoir été rattaché à la France, ce qui devrait inciter Eric à réfléchir avant de balancer des âneries. Mais selon Eric Ciotti, on rentre en France comme dans un moulin, on se paye grassement sur la bête et on reste ad vitam æternam. D’une part ses propos sur l’immigration sont un tissu de conneries aussi épais que les archives de Valeurs Actuelles (regarde là si tu veux). D’autre part, il ment aussi sur l’attribution des prestations: aucun organisme de sécurité sociale n’accorde de prestations en l’absence d’un titre de séjour en cours de validité, exception faite de l’aide médicale d’Etat qui est tout de même soumise à trois mois de résidence et à une condition de ressources. Le maintien de droits est au maximum d’un an, si le demandeur n’a pas trouvé d’emploi ou ouvert un droit à la CMU.
Donc Eric Ciotti est un gros mytho malhonnête ou incompétent ou les deux. J’espère que Valeurs Actuelles ne tardera pas à lui consacrer un numéro.