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Ça ne peut pas continuer comme ça mais il ne faut rien changer pour moi.

Publié le 14 octobre 2014 par Rolandbosquet

manifestations

      Il fut une époque pas si lointaine où les rues résonnaient régulièrement de chants révolutionnaires. Les bourgeois fermaient leur porte à double tour et les commerçants baissaient leur rideau de fer. Les Compagnies Républicaines de Sécurité profitaient de l’aubaine pour sortir de leurs casernes et les banlieues se vidaient de leurs habitants qui se répandaient en hordes bruyantes et chahuteuses jusque dans les centres villes. La télévision filmait des responsables syndicaux et des hommes politiques de gauche sagement alignés en tête du cortège et suivis d’une foule vocéférante brandissant des pancartes contestataires. Non aux licenciements, non à la baisse des revenus, non à l’augmentation du gaz, non à la suppression des jours fériés. La liste des items était sans limites. Le journal de 20 heures montrait quelques visages emblématiques, tendait un micro complaisant aux meneurs et un commentateur rappelait le nombre important de manifestants comptabilisé par les organisateurs et celui, moins généreux, établi par la Préfecture. Parfois suivaient quelques images de casseurs en action puis tout rentrait dans l’ordre jusqu’à la semaine suivante. Hélas, le folklore citadin ressemble de plus en plus à celui des campagnes. Il se perd et se dilue dans les méandres de la modernité. On descend de moins en moins dans la rue pour réclamer ou contester. Quelques énergumènes tentent encore, de temps à autre, de peser ainsi sur le vote des députés. Ils se réunissent le dimanche, ce qui évite de perdre une journée de travail, et de préférence par beau temps ce qui permet de sortir poussettes et landaus. La marche revendicatrice est joyeuse, les enfants brandissent leurs petits panneaux bariolés, leurs parents déclarent vouloir protéger la famille et leur progéniture contre l’invasion des mœurs délétères qui avilissent la civilisation et obèrent l’avenir de la nation. Mais la crise est là et chacun reprend son travail le lundi matin. L’emploi est devenu une denrée trop rare pour être gaspillée. D’autres s’y sont récemment essayés eux aussi mais avec plus de succès. Qu’ils s’appellent bonnets rouges ou pharmaciens, ils ont été entendus par les autorités qui ont reculé. Ils se feront de plus en rares désormais puisqu’il suffit à présent de brandir la simple menace de bloquer les accès aux grandes villes, malgré une loi votée à la quasi-unanimité par les Assemblées, pour obtenir gain de cause. Chacun sent pourtant confusément que la situation ne saurait perdurer. Société bloquée, individualisme forcené, égoïsme à tous les étages ou presque, perte d’identité, doutes sur l’avenir, désespérance et anxiété. Des jeunes, faute de perspectives, vont faire valoir leurs diplômes à l’étranger tandis que d’autres vont chercher l’aventure dans le djihâd. « Ça ne peut pas continuer comme ça, chantait Ricet Barrier. Il va bien falloir changer quelque chose ! » Faudra-t-il, pour cela, que la majorité dite silencieuse, soi-disant repérée par les instituts de sondages, descende à son tour massivement dans la rue pour exprimer avec force toute sa colère face à l’immobilisme ? Ce jour-là, nul doute que notre monde aura fait un vrai pas en avant vers son avenir radieux.

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