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Alexandre Tharaud

Publié le 06 décembre 2014 par Rolandbosquet

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        Réunion annuelle des vieux gamins du Céladon autour de la table de notre amie Marthe Dumas au Mas du Goth. Frugal menu normand s’il en est : noix de St Jacques de Granville et girolles à la crème normande, pintades bardées sur un lit de Grannys arrosées au cidre et au calvados, camembert, pont-l’évêque et livarot et teurgoule comme de bien entendu pour clôturer en apothéose. Jacques et Sophie de retour de Québec où s’exposent ses vouivres s’étaient munis du dernier disque d’Alexandre Tharaud enregistré en public avec l’orchestre Les Violons du Roy. En guise sans doute de pied de nez à ses 45 ans et à tous ceux qui n’avaient pas jugé bon de l’écouter il y a dix ans, il y interprète le fameux concerto n°9 dit le "Jeunehomme" de Mozart. Il aborde l’allegro, pourtant si volubile et lumineux, avec un sérieux presque austère mais peut-être la faute en revient-elle à l’orchestre aux phrasés sévères et anguleux.  Mais Alexandre Tharaud semble trouver sa place avec l’andantino où il nous décrit un paysage plutôt rêche en symbiose avec la rudesse de l’hiver canadien et la rigueur de l’orchestre. Pointilleux et tendu, son jeu exprime parfaitement la douleur des sentiments romantiques qu’annonce Mozart. Le rondo presto continue de suivre le compositeur qui préfère malgré tout les émotions en demi-teinte avant de se jeter, comme d’habitude, dans un rayonnant élan de vie. On pourrait dire que le rondo en la majeur qui suit ne fait que préparer l’entrée en scène de Haydn. Mais ce serait se montrer désagréable envers Joyce DiDonato bien que son chant manque peut-être ici d’un peu d’abandon et de chaleur d’âme si l’on se réfère à Cécilia Bartoli dans le même exercice. Avec le concerto en majeur de Joseph Haydn, c’est au tour du piano de montrer un romantisme un peu épais contre un orchestre dépouillé et plein d’esprit à la fois. Alexandre Tharaud semble, quant à lui, tellement plongé dans le romantisme de Mozart qu’il en oublie la simplicité de la partition de Haydn qu’il a sous les yeux. Et pour autant que le finale soit diaboliquement échevelé sinon même délirant, l’interprète est-il autorisé à "en rajouter" avec plus de brutalité que de véritable démesure ? La discussion s’engage. Qui défend le pianiste dans l’andantino. Qui reproche à l’orchestre son austérité. Qui s’avoue charmé par la voix de Joyce Di Donato mais qui ne le serait pas. Qui regrette une lecture trop pesante de Joseph Haydn. L’avis général sera résumé par Colette : Tharaud m’avait éblouie avec Rameau. ! Nous n’en termineront pas moins la soirée par une tasse de mélange de malabar moussonné du Viêt-Nam et de Kwilu du Congo. Car, demain comme chaque jour, le monde continuera sa course tranquille vers un avenir qu’il espère radieux.

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