Sois métèque et tais-toi

« L’homme occidental est trop souvent un enfant gâté qui est devenu aveugle. » (Moi-même)

On se les représente trop souvent sous l’apparence de basanés hâves, incultes et déguenillés venant crier famine à la porte d’un pays riche et (paraît-il) généreux, mais beaucoup d’entre eux, peut-être même la majorité, apportent avec eux un savoir-faire dont ils viennent faire profiter de leur propre initiative un pays vieillissant ; mais surtout, beaucoup s’évadent d’un pays qui n’est qu’une immense prison à ciel ouvert, prostré sous la surveillance permanente d’un tyran qui y règne depuis toujours. Alors imaginez-les quand ils apprennent qu’au-delà des mers, des hommes ont l’incroyable privilège de pouvoir choisir eux-mêmes leurs chefs et peuvent même les critiquer sans que cela les conduise sur la paille humide du cachot voire au cimetière !

Pour pouvoir bénéficier eux aussi de ce courant d’air frais (quand bien même ce ne serait que ça, ça en vaudrait toujours la peine) qu’est la démocratie représentative, ils n’ont pas tous bravé mille dangers dans un inconfort de galériens : de toute façon, n’est-ce pas déjà un souffrance suffisante, un crève-cœur, un déchirement sans nom, de quitter les rivages aux bords desquels on a grandi, de laisser derrière soi ses parents, ses amis, tous ses repères ? J’ai toujours admiré le courage des migrants, moi qui ai toujours un pincement au cœur quand je quitte ma chère Bretagne pour une semaine ! Faut-il que la vie au pays natal soit devenue étouffante et même impossible pour qu’ils en arrivent là ! Et quelle récompense obtiennent-ils en contrepartie de leurs sacrifices, quand ils posent le pied sur le sol de ce pays merveilleux où tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ? Quand bien même on pourrait excuser les contrôles de police au faciès, les quolibets des gens du cru et les discriminations à l’embauche, il resterait toujours l’inexcusable : ils ne peuvent même pas voter. Ils ont quitté leur pays parce qu’ils ne pouvaient pas choisir eux-mêmes leurs chefs, et quand ils arrivent ici, c’est la même chose ! Bosser, consommer, payer des impôts, faire des gosses, d’accord, autant qu’ils veulent, mais voter, donner son avis, pas question ! Sois métèque et tais-toi, quoi ! Et ils voient défiler sous leur nez des milliers de « bons Français » qui ont la chance, eux, de pouvoir s’exprimer mais, trop souvent, n’en profitent même pas ! Le plus misérable des smicards doit leur faire l’effet d’un nanti !

Conclusion : Françaises, Français, que vous ne profitez pas de votre droit de vote, passe encore, mais que vous ayez en plus le culot de le refuser à des hommes et des femmes qui font tout autant parti que vous de la société, ça, je ne vous le pardonne pas ! C’est vraiment raisonner en occidental pourri-gâté ! À bon entendeur, salauds !

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