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Faire des vagues

Publié le 10 février 2015 par Rolandbosquet

vague

    Jacques Brel les chantait si bien ces vagues de dunes pour arrêter les vagues et ces vagues rochers que les marées dépassent ! La mer du nord était déjà un terrain vague fort menaçant pour les plats pays. Or, à l’heure du réchauffement climatique et de la montée des eaux, mieux vaut être Moïse que Pharaon. Ainsi, afin mieux connaître ces redoutables déferlantes, des chercheurs bataves ont édifié une usine qui en fabrique. Des vagues avec ou sans rouleaux, des vagues avec écume et des vagues sans écume. Des vagues poussées par des vents de mer et d’autres par des vents de terre. Et qu’elles soient grandes, moyennes ou petites, discrètes ou imposantes, violentes ou caressantes, ils les comptent et les mesurent avec soin. Puis ils les propulsent contre des rochers, des dunes ou des falaises de grès ou de calcaire. Combien de temps leur faudra-t-il pour réduire ce bloc de granit en grains de sable ? Combien de temps leur faudra-t-il pour charrier ces mêmes grains de sables du Cap Gris-Nez aux Calanques de Cassis ? Soucieux de répondre avec précision, le chercheur en chef attend donc patiemment, assis sur son tabouret et chronomètre en main, que l’expérience parvienne à son terme. Munis de leur double décimètre, ses confrères iront de leur côté ausculter les vagues des grandes marées de vives-eaux des 21 février et 21 mars dans la baie du Mont St Michel. Avec un peu de chance, un vent fort de 7 ou 8 beauforts soufflant de l’Atlantique augmentera encore leur vitesse qui dépassera alors non seulement celle d’un cheval au galop comme autrefois mais peut-être même celle d’une Jeannie Longo sur son vélocipède. Certes, les innombrables spectateurs qui auront fait le voyage en autocar depuis les coteaux de Moselle ou les pentes du Puy de Dôme pour admirer ce spectacle extraordinaire seront alors plus proches du sauve-qui-peut que de la poésie. Mais ils en rapporteront des souvenirs inoubliables et des photos époustouflantes qui ne manqueront pas de faire des vagues de jaloux lorsqu’ils rentreront au pays. En attendant, c’est une grande vague d’indignation qui submerge actuellement le monde. En effet, faute de digues suffisamment bien entretenues, des vagues de richesses se seraient subrepticement insérées dans des fissures et, guidées par des conduits habilement disposés, se seraient déversées vers des bassins exotiques aux niveaux d’imposition beaucoup plus bas sinon même inexistants. L’affaire ne date pas d’hier et nul besoin n’était aux comptables de s’asseoir eux aussi sur leur tabouret et d’attendre que les réserves soient vides pour estimer la durée d’écoulement. N’importe quel inspecteur des finances ayant pratiqué l’école communale au milieu du siècle dernier est à priori capable d’apprécier le temps nécessaire à une banale baignoire pour s’assécher, tout en tenant compte évidemment d’une éventuelle évaporation et de la direction du vent. Quoi qu’il en soit, grâce aux confidences argumentées de quelque secret sous-marin, le pot aux roses inonde désormais les médias et répand une immense houle de colère dans les mornes plaines des contribuables ordinaires. Jusqu’où montera-t-elle ? De quels sommets culminants ira-t-elle lécher les rives ? Le monde, quant à lui, poursuit, imperturbable, sa croisière triomphante sur les canaux de son futur.  

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