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Cucumis sativus

Publié le 13 mai 2016 par Rolandbosquet

cornichon

    De l’influence du réchauffement climatique sur  la germination des semis de printemps dans le cadre de la culture "bio" en milieu ouvert des cucurbitacées. Tel était le titre initial de cette chronique qui se veut résolument champêtre sinon même jardinière. Mais la place me manque cruellement pour insérer tous les signes, espaces comprises, dans la case prévue à cet effet. Ce qui représente non seulement une atteinte intolérable à ma liberté d’expression mais presque un casus belli. C’est pourquoi j’irai malgré tout plus avant sans autre souci que d’apporter ma modeste pierre à l’édifice culturel qui soutient tant bien que mal notre admirable civilisation depuis tant de générations. Certes, bêcher la terre du jardin potager et en ôter les herbes indésirables, l’enrichir d’un fertile compost fait maison et disposer çà et là des poquets de cinq à six graines de cucumis sativus peut être considéré comme une activité plutôt vulgaire sinon même méprisable pour un grand esprit attaché à côtoyer les sommets de la pensée philosophique. Cette dernière n’en approche pourtant jamais d’aussi près les étoiles que lorsque ses pieds sont solidement ancrés dans la glaise du quotidien et l’art du jardinier soucieux de mettre toutes les chances de son côté n’en est guère éloigné.  Il consiste en effet non seulement à apprécier la pluviosité moyenne de sa contrée, l’exposition a u soleil de ses plantations, l’éloignement de prédateurs tels que limaces, escargots, nécroses bactériennes et autres maladies fongiques mais aussi, et avant même toute entrée en action, à consulter le calendrier lunaire. Certains pensent que la lune qui parvient à soulever les océans lors des marées est également capable de faire lever des semis. Or la lune, actuellement en trajectoire descendante et en phase croissante, pénètre dans la constellation du Lion, le signe même de la générosité et de la détermination. Mais bien qu’elle ne dévoile à l’observateur qu’une moitié de son disque, elle croisera le 15 de ce mois à 22h41" exactement le terrible nœud lunaire, moment critique s’il en est où toute activité de jardinage est fortement déconseillée, sauf à voir, pour le récalcitrant, ses efforts voués à l’échec. On voit par-là combien il importe pour le jardinier de demeurer aussi attentif à son contexte immédiat qu’à son environnement cosmique. Quoi qu’il en soit, travailler de ses mains n’a par ailleurs jamais empêché quiconque de réfléchir. C’est ainsi par exemple que l’allemand Otto von Guericke observe les effets de l’électricité après avoir fabriqué un globe de soufre en rotation et que Pierre et Marie Curie découvrent le radium à l’issue de longues et laborieuses manipulations. Délivré des fastidieuses contraintes thèse-anti-thèse-synthèse, l’esprit peut en effet vagabonder tout à son aise et se révéler ainsi particulièrement créatif. Le jardinage est à cet égard une saine occupation qui aère aussi bien les poumons que l’imagination et peut-être même l’intelligence. Mais il est vrai hélas que la course du monde n’en sera guère changée pour autant. Des centaines d’hommes, de femmes, d’enfants seront toujours frappés par la maladie, la guerre et la famine. La pauvreté poursuivra ses ravages tandis que la richesse sera toujours plus insolente. Tremblements de terre, inondations, tempêtes et incendies persisteront, frappant les plus faibles et les plus démunis. Mais comment un humble jardinier dans son courtil perdu au cœur des Monts pourrait-il remédier à lui seul à tous les malheurs du monde ? Il pourra au moins échapper pendant quelques heures aux pantomimes qui agitent les milieux dits "d’en haut" et qui nous laissent comme toujours bien des choses à penser.

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