Magazine Journal intime

Les liaisons dangereuses

Publié le 20 juin 2008 par Corcky

Sais-tu que depuis la création de ce blog, tu as laissé exactement 5225 commentaires?
Faut croire que t'as beaucoup de choses à dire.
Ou alors pas grand-chose à foutre.

Peu importe.

Toujours est-il que c'est de ça que je voulais te parler aujourd'hui.

Les commentaires.

Les commentaires, sur un blog, c'est un peu l'équivalent de la critique de Télérama (si tu es un peu branchouille) ou de Télé Z (si tu es un peu pedzouille) sur les programmes du soir.
C'est ce qui donne un peu de sel à la tambouille que le blogueur a mitonnée en loucedé dans son  coin.
C'est  un baromètre d'humeur.
Le dernier salon où on cause.
Parfois, ça tourne au forum de discussion, et là c'est carrément l'orgasme intellectuel, surtout quand le niveau s'élève un peu au-dessus des histoires de coussin péteur.

Il se crée, entre le petit blogueur et son lectorat régulier, un lien relativement fort et complexe, une sorte de version pixelisée des Liaisons Dangereuses, si tu préfères, avec son lot de séduction, de calcul, d'affection sincère, d'amitié un peu embarrassée par la virtualité de tout ce business, et parfois de coups de gueule finalement bien salutaires et sympatoches (Sergaï se souviendra de notre prise de bec de l'année dernière, Sergaï, je t'embrasse, grand fou).

En gros, sans commentaires, ben on s'emmerde.
Les commentateurs, on les aime.

Même quand un énorme boulet vient à s'incruster dans tes pages.
Surtout quand un énorme boulet vient s'incruster dans tes pages.

Car, ami lecteur, le commentateur pénible et régulier, qui revient hanter tes pages jour après jour, c'est un cadeau du Ciel, et malheureusement, c'est pas donné à tout le monde.

Oh, bien sûr, la plupart des blogueurs ont eu, à un moment donné, leur délicieux Neuneu à Crète Rouge, celui qui débarque en braillant "Kikou" et ponctue chacune de ses éructations de "lol" hystériques,  qui essaie de placer un ou deux bons mots complètement à côté de la plaque, et finit généralement par en arriver au fait, c'est à dire à faire de la pub pour son propre skyblog, de la façon la plus consternante qui soit: "Viendez déliré chez wam, c tro cool".

Celui-là ne compte pas, ami lecteur, car il est aux commentateurs de blogs ce que le moineau est à la volaille parisienne: d'une banalité affligeante et d'un ennui mortel.

Non, moi je te parle du commentateur vraiment unique, celui (ou celle) qui, billet après billet, persiste et signe dans sa connerie en étalant aux yeux de tous tes lecteurs un égo tellement démesuré qu'il en devient presque touchant, qui distribue les bons et les mauvais points comme Gérard Klein dans le pire épisode de l'Instit' et qui rayonne d'auto-suffisance, cette assurance consternante du citoyen-blogueur sûr de son bon droit et persuadé qu'il se doit de partager sa grande sagesse avec le bon peuple.

Celui, ou celle, qui ne cesse de donner des conseils, tel Maître Yoda face à un apprenti-Jedi balbutiant.
Qui vient te reprendre avec condescendance quand il estime que tu n'as pas employé une terminologie suffisamment explicite, percutante ou engagée.
Qui corrige tes fautes de syntaxe ou d'orthographe, mais aussi celles des autres commentateurs, avec la bienveillance un peu hautaine d'un agrégé de littérature gavé au Bescherelle.
Qui parfois, quand tu abondes involontairement dans son sens, te lèche servilement les fesses et te porte aux nues alors que tu ne lui as rien demandé, mais qui n'hésitera pas à te morigéner affectueusement le jour où ton opinion (ou celle de tes commentateurs) n'aura point l'heur de lui complaire.
Et gare à toi si tu le fâches pour de bon: Sa Majesté Suprême risque de dégainer Excalibur et de partir en croisade, de déclencher une Guerre Sainte dont tout le monde se foutra (sauf lui, ou elle), et de lancer contre toi une salve de petits prouts nauséabonds qu'il prendra pour des missiles tomahawks supposés te plonger dans les affres de la culpabilité, puis de l'agonie bloguesque.

Ce casse-couilles professionnel, ami lecteur, est à différencier du loleur, du débile mental, du lèche-cul de base, de la pute passée par chez toi dans le seul et unique but  de grappiller quelques visiteurs, et du gros lourd qui se prend pour un Tonton Flingueur et veut absolument tester son humour de merde sur ton blog avant de se lancer pour de bon chez Valdez, Oncle Paul, Mac Cout et les autres salopards (le gros lourd se chie un peu dessus à l'idée de se faire rembarrer par les Tontons, c'est l'équivalent du Soldat Ryan qui débarque à Omaha Beach).

Personnellement, je n'ai malheureusement jamais eu la chance de récupérer un énergumène pareil sur mon blog, en tout cas pas de manière suffisamment durable pour que la fête soit plus folle.

J'ai bien eu quelques skyblogueurs trépanés du bulbe, une chaudasse venue faire de la pub pour un site porno, et un socialiste cacochyme ayant tenté de vanter son blog "Désir d'Avenir" (à qui il a fallu expliquer que les mots "avenir" et "Ségolène Royal" pouvaient à première vue paraître assez antinomiques).

Mais jamais de véritable coucou nicheur, ce drôle d'oiseau qui pose ses valises chez toi et décide de s'y incruster longtemps, longtemps, très longtemps.

Crois bien que je le regrette, parce que j'ai trouvé quelques perles rares sur des blogs voisins, et ça m'a déclenché des crises de jalousie absolument effrayantes.

Oui, j'envie mes camarades blogueurs et blogueuses, je l'avoue.

Oui, j'aurais aimé avoir un spécimen pathologique dans mes pages, un bon gros connard récidiviste, une magnifique pétasse montée sur ressort et sur ses grands chevaux, un lecteur ou un lectrice dépourvu d'humour mais possédant le dernier modèle de correcteur orthographique Microsoft greffé au bulbe, un donneur de leçons diplômé, une parano pathologique persuadée que tous les blogs de la planète s'unissent dans l'ombre pour lui cracher à la gueule, je me serais même contentée d'un sarkozyste primaire qui aurait tapé du poing à chacun de mes billets un peu politiques, ou d'un fan de Carla Bruni psychotique dopé aux amphétamines.

Pourquoi, te demanderas-tu peut-être, ami lecteur.
Pourquoi vouloir à tout prix héberger un scolopendre vicieux, réchauffer un cafard dans son sein, subir un spécimen particulièrement pénible de casse-bonbons?

Parce que.
Parce que rien n'est plus jouissif que de tarter régulièrement la tronche d'un con.
Rien n'est plus drôle que de laisser ce con s'enfoncer dans sa connerie sous les yeux ébahis d'un public qui, au départ, n'était pas venu pour ça, mais qui en définitive ne crache pas sur un bon spectacle gratos.
Rien ne vaut une bonne petite séance de kick boxing virtuel en direct.

Et puis surtout, quelque part, avoir son boulet attitré, ça te donne une sorte de cachet, un goût, une saveur unique, qui permet d'identifier ton blog au premier coup d'oeil: "Ah, ouais, c'est chez X que sévit le célèbre Ducon!".

Eh ouais.

Mais parce que tu connais ma légendaire magnanimité, ma générosité sans faille et ma mythique mansuétude, je m'en vais à présent me taire, et honorer cette citation de Pierre Doris:

La tolérance : c'est quand on connaît des cons et qu'on ne dit pas les noms.



  

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