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A bas les mecs sympa !

Publié le 10 décembre 2017 par Legraoully @LeGraoullyOff

A bas les mecs sympa !C’est peut-être parce que j’ai un peu trop regardé les Guignols quand j’étais adolescent, mais je me méfie du mot « sympa ». Pendant la dernière cohabitation, on n’arrêtait pas d’opposer un Chirac « sympa » à un Jospin « austère ». « Sympa », Chirac ? Depuis quand ? Depuis sa sortie sur « le bruit et l’odeur » ? Depuis qu’il a bétonné Paris ? Depuis qu’il a piqué dans la caisse ? Même en guignol, je ne l’ai jamais trouvé « sympa » : quand j’étais petit, j’avais même plutôt peur de ce personnage avec une grande gueule de loup, une grosse voix qui ne lui servait qu’à dire des grossièretés et un caractère de cochon qui pouvait le faire exploser de rage à tout moment. Mais surtout, à travers l’opposition Chirac-Jospin, je retrouvais ce que j’endurais au collège : je l’avoue, je n’étais pas « sympa » du tout, j’étais « l’intello de service », celui qui protestait quand il y avait trop de boucan (c’est-à-dire presque toujours), celui qui avait de bonnes notes… Et j’étais donc la cible privilégiée du « mec sympa », le cancre fier de lui, celui qui orchestrait les chahuts, celui qui mettait les rieurs de son côté, éventuellement en m’humiliant devant tout le monde dès que je commettais une erreur…

A bas les mecs sympa !Carlos Gohsn vu par votre serviteur.

Depuis cette époque, pour moi « sympa », ce n’est pas tout à fait un compliment. C’est même presque une insulte. À la base, « sympathique » a la même étymologique que « compatissant », une personne « sympathique » est donc, littéralement, quelqu’un qui sait être compréhensif, qui est prêt à partager vos joies et vos peines sans vous juger. Or, quand on dit qu’un type est « sympa », on ne dit pas exactement ça : le mot « sympa » a une mauvaise odeur, elle sent à plein nez le politicien véreux qui assure sa popularité en payant sa tournée au café du commerce, le bellâtre musclé et bronzé qui vous ravit toutes les jolies filles sous votre nez, le patron pas fier qui donne une tape dans le dos de ses employés comme on donne une caresse à un chien bien dressé… Bref, le mec « sympa » est trop souvent une crapule qui sait se faire aimer par qui il faut, celui qui oriente ses faveurs en fonction de son intérêt personnel, éventuellement en écrasant un peu plus ceux que la majorité a choisi comme boucs émissaires : tout le contraire de la sympathie au sens originel. À ce tarif-là, n’importe quelle fripouille peut être « sympa » : Donald Trump, Sylvio Berlusconi, Carlos Ghosn, Vincent Bolloré… Même Jean-Marie Le Pen a été qualifié de « mec sympa » par Serge Moati. Je ne plaisante pas !

C’est peut-être parce que « sympa » est une pseudo-qualité facile à acquérir que c’est aussi un faux compliment qu’on donne aux types qu’on n’apprécie pas plus que ça et dont on veut se débarrasser à bon compte. Hier, un particulier m’a dit qu’il trouvait mes dessins « sympa » : qu’est-ce que ça veut dire ? Certainement pas qu’il les trouvait bien faits ou pertinents, en tout cas… Je crois que je préfère encore ceux qui me disent qu’ils n’aiment pas du tout ce que je fais, au moins, c’est honnête, même si ce n’est pas… sympa !


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