Le journal du professeur Blequin (160)

Samedi 8 décembre

10h40 : Du vent, de la pluie, du crachin…Un cocktail qui ne donne pas envie de sortir ! Hé, vous autres, c’est bon, Macron l’a abandonnée, sa taxe carbone, vous allez pouvoir continuer à pourrir la planète, rentrez chez vous, vous allez attraper froid !

Dimanche 9 décembre

10h45 : Quand je partage sur les réseaux sociaux des liens vers mes dessins, je tombe parfois sur les travaux d’autres caricaturistes amateurs et je suis affligé. Pas sur le plan graphique, car je ne prétends pas dessiner mieux que tout le monde, mais au moins sur le fond : la majeure partie des dessins que je vois ‘hurlent avec les loups » et se mettent à genoux devant les idées reçues. Ainsi, en ce moment, le propos dominant se résume à « Macron, salaud » ! C’est vrai que Macron mérite qu’on lui en mette plein la gueule, mais se contenter de taper sur les individus qui détiennent le pouvoir, c’est tourner un peu en rond. Je me demande parfois ce qu’auraient fait nos grands dessinateurs satiriques aujourd’hui décédés : Siné aurait sûrement été enthousiasmé par le mouvement des gilets jaunes mais il n’aurait certainement pas pardonné les dérapages racistes et homophobes car, n’en déplaise à Philippe Val, Siné était profondément anti-raciste et, plus largement, anti-discrimination. Cabu n’aurait pas épargné Macron, pas plus qu’il n’a épargné un seul de ses prédécesseurs, mais cet ennemi du tout-bagnole ne se serait certainement pas reconnu dans la lutte contre l’augmentation des prix de l’essence : il ne serait sans doute pas gêné pour représenter les gilets jaunes en beaufs. Reiser, quant à lui, n’aurait probablement jamais dessiné Macron : il avait peu dessiné Giscard et n’avait jamais dessiné Mitterrand ; il n’aimait pas le pouvoir quelle que soit la personne qui le détient. Mais il n’aimait pas le désordre non plus : il ne s’était pas reconnu dans le mouvement de mai 68, je pense que les gilets jaunes ne lui auraient pas plu davantage ; il serait même probablement navré de constater que la population demeure incapable de se passer du pétrole…

Pour qu’on ne m’accuse pas de sympathie envers Macron…

Lundi 10 décembre

18h30 : Je participe au pot de départ d’une collègue chercheuse : ce n’est pas tous les jours que le laboratoire voue paie le Champagne, convenons-en ! De ce fait, je rate complètement le discours de Macron, MAIS JE M’EN FOUS ! Je n’ai jamais aimé Macron ! L’année dernière, j’avais voté Hamon, ne l’oublions pas ! Et je n’aime pas non plus les gilets jaunes ! Je ne veux pas les voir, je ne veux pas les connaître !

Mardi 11 décembre

12h40 : Il faut croire que cet imbécile de Macron n’a pas que des défauts : après les trois semaines qu’on a eues, qu’est-ce qui l’aurait empêché de s’octroyer les pleins pouvoirs (l’article 16 de la constitution lui en donne le droit) et de mettre des chars dans les rues ? Il ne l’a pas fait. Il aurait aussi pu démissionner, ce qui serait revenu à abandonner un navire en perdition, ou plus simplement dissoudre l’assemblée, ce qui nous aurait rappelé quelque chose… Il n’a rien fait de tout ça. Je ne cherche pas à prendre sa défense à tout prix mais j’en ai marre de cette agitation : dans deux semaines, c’est Noël, c’est l’une des rares périodes de l’année où je peux me permettre de me recroqueviller sur moi-même et de ne me consacrer qu’à mes créations, ce n’est pas à ce moment-là que je vais supporter du changement, même en mieux ! Et entre nous : SURTOUT PAS en mieux !